Hello There !
Bon dimanche de Pentecôte ! La taverne ne connait pas les fériés, ou du moins travaille aussi les jours fériés, tel un stakhanoviste du bonheur qui chercherait à apporter joie, café et chaleur aux siens, peu importe le calendrier et les circonstances. Et le tavernier est d’excellente humeur. Laissez-moi vous offrir un café maison… chauffé aux flammes de l’enfer. Oui, Satan et moi c’est une vieille histoire, il me prête ses allumettes parfois.

From Ghost-merch.com
Le café de Papa Emeritus, le café qui te secoue les puces
Con Clavi Con dio
La taverne va aujourd’hui consacrer son article dominical à prêcher la bonne parole. Non pas celle de Jésus, qui nous a quitté il y a 2000 environ maintenant, mais celle du Rock nouveau et éternel. En effet, jeudi soir votre serviteur et fidèle dévoué à la cause métallique était à Rennes pour un concert d’anthologie d’un groupe suédois nommé Ghost, et je n’étais pas seul puisque ma petite dernière de presque 12 ans m’accompagnait. Autant dire que le plaisir était double : d’une part celui de voir pour la première fois sur scène ce groupe qui est ma révélation et mon coup de coeur de l’année dernière, et d’autre part de transmettre la flamme, le flambeau à une de mes filles qui semble vraiment avoir le virus – difficile parfois de dire chez un jeune adolescent ce qu’il en sera de sa future orientation musicale, et même artistique de manière générale, mais je crois qu’elle a récupéré les gènes de son papa si on se fie à ses écoutes et ses lectures.
Mais avant de vous parler de ce jeudi 25 mai 2023 dont je me rappelerai encore pour longtemps, je me dois de vous donner un peu de contexte, tout d’abord en ce qui concerne mes goûts musicaux. Bien sûr si vous êtes habitués de la Taverne et que vous écoutez ce que je joue dans mes Jukebox, vous connaissez mes inclinations sonores, ma passion dévorante pour le Rock en général et le Hard Rock et le Metal en particulier. Comme je l’ai expliqué cela vient de mon père qui possédait une belle collection de 33 tours (oui à l’époque on ne disait pas vinyle) avec de petites pépites tel que Led Zeppelin, Deep Purple, les Stones, Black Sabbath, Genesis, Dire Strait, les Beatles et j’en passe. Mon premier choc fut à l’age de 8 ou 9 ans, dans un casque au volume poussé à bloc, pour voir ce que ça faisait de mettre fort alors qu’on me l’avait interdit. À l’époque les casques étaient énormes avec un cordon en tire-bouchon. Assis sur mon lit, j’avais placé sur ma platine disque dans ma chambre – récupéré de mon père qui en avait acheté une toute nouvelle, dernier cri, avec lecteur CD –le disque de In Rock, un album de Deep Purple qui me fascinait pour sa couverture représentant le Mont Rushmore sur lequel ne figurait plus les têtes des présidents bien connus (oui j’étais déjà passionné d’histoire et je connaissais leur nom) mais les visages de ce que je supposais être les membres du groupe. Le choc était acté, depuis longtemps programmé, la collision fut violente, assourdissante, grisante, entêtante, addictive, libératrice : moi le petit garçon chétif, malade et mal dans sa peau, j’avais trouvé un échappatoire, une voie, une délivrance, une renaissance. Dorénavant je dédierai ma vie au force du M–et–al.
J’ai tanné mes parents pour apprendre la guitare à partir de ce moment-là. Puis j’ai même intégré l’harmonie de mon village et son école de musique. C’était devenu ma vie. À l’âge de 11 ans j’ai demandé pour mon anniversaire un walkman, célèbre ancêtre du MP3 qui donne des sueurs froides aux jeunes d’aujourd’hui qui ne comprennent pas toujours comment on y glisse une cassette. J’étais justement le roi de la Tape, j’en avais de toutes sortes, des originales, des 60 minutes, des 90 minutes. Bien moins encombrantes que le disque, elles me suivaient partout, elles étaient le premier élément que je triais en préparant mon sac pour l’internat le dimanche après midi. On faisait des échanges dans les cours de récré, on empruntait pour copier les albums que les autres avaient découvert. Le monde du metal était un univers chaleureux, bienveillant, et bien que mon image de moi-même était faussée, n’étant pas réellement cette petite chose inutile et fragile — mais ça je l’ai découvert plus tard en grandissant encore –, au sein de ces gens bienveillants, on ne me jugeait pas, on échangeait, on partageait. Je n’écoutais pas que du rock ou du métal d’ailleurs puisque je jouais au sein d’une harmonie, je pouvais avoir des albums de musiques de film, de Mozart, de Brel, Brassens, Regianni.
He is
Alors que j’entrais dans ma vie active, assez jeune il faut le dire, une rencontre a changé beaucoup de choses. J’en ai déjà parlé sur ce blog, notamment dans mes articles musicaux sur Magnum ou encore Cheap Trick. De 7 ans mon ainé, initié au Rock par son grand frère, Laurent qui n’est plus maintenant mais qui en pensée était avec moi jeudi soir, a été plus qu’un ami. Il fut un guide musical pour moi. Sa collection gigantesque de CD, de 33 tours, de cassettes, reste l’une des choses les plus impressionnantes que j’ai vu de toute ma vie. La sienne était dédiée à la musique et au Rock en particulier. À peine sorti de ma cambrousse ravitaillée par les corbeaux à une époque où internet n’existait que dans les films de science fiction, je ne connaissais que quelques groupes, et encore parmi les plus connus. Il fut néamoins surpris lors de notre première conversation au travail devant la porte de notre entreprise alors que nous regardions les gens passer de voir que je pouvais connaitre du haut de mes 19 ans des groupes comme Saxon ou encore Accept. Mais il faut bien le dire aujourd’hui, il me surnommait MMA pour Metallica, Maiden, AC/DC, une manière à lui de se moquer de mon étroite culture. Sous sa tutelle, j’ai alors découvert des groupes incroyables. Beaucoup étaient issus des années 70 et 80, les années de sa jeunesse, et de ma petite enfance dans mon cas. Thin Lizzy, UFO, MSG, Black Sabbath — que je n’avais qu’effleurer – Dio, Scorpions dans sa période Hard Rock et non commerciale, Blue Oyster Cult, Rush, Uriah Heep, Greatwhite et j’en passe. C’est avec lui que je suis allé voir mon premier concert en 1998 à Nancy. Il s’agissait de Bernard Lavilliers, un rebelle à sa manière. Puis nous avons enchaîné avec Iron Maiden, Alice Cooper, Motorhead, ZZ Top, Toto, Dio — à qui j’ai pu toucher la main en faisant les cornes du diable. Il m’avait donné la passion de ce son un peu passé, de ces riffs psychédéliques, de ces groupes déjantés, tels que Twisted Sister ou encore Kiss. Une passion qui ne m’a jamais quitté depuis. Sans pour autant renier mes groupes fondateurs, il avait élargi mon horizon musical et apporté de nombreuses heures de plaisir dans les heures les plus sombres de mes nuits. La musique a toujours été mon échapatoire, mon défouloir, ce qui m’a maintenu à flots durant toutes ces années, hanté, parfois avec grands fracas, par mes démons intérieurs.
Laurent nous a quitté en 2018. Trop jeune, comme pour beaucoup. Mais il restera celui qui m’aura apporté le remède.
He is…
Year Zero
En mars 2022, alors que nous rentrions avec ma complice d’une longue journée de route, j’ouvre ma boîte mail dans ma cuisine afin de faire le tri quotidien que tout être humain se doit aujourd’hui de faire – il est où le temps béni des lettres papier ? – je tombe sur ma newsletter mensuelle de Hard Force magazine. Ce dernier présente la sortie du nouvel album d’un groupe dont je n’avais jamais entendu parler: Ghost. Ils expliquent qu’il s’agit de leur cinquième album, nommé Impera, que le groupe est suédois – il semblerait que ce soit la Terre Promise du Rock ces dernières années – et ils donnent le lien vers une vidéo sortie par le groupe présentant les quatre premières chansons de l’album, jouées dans les conditions live. Par curiosité, je clique sur le lien. Vous vous rappelez cette séquence dans le film Ratatouille, lorsque le critique goûte vers la fin du film le plat qu’on lui apporte, et se sent comme retourné en enfance ? Et bien je en vois pas de meilleure image pour exprimer ce que j’ai ressenti à ce moment là.
Ghost puise dans toutes les racines musicales qui sont les miennes. Des sons, aux arrangements des groupes des années 70, 80, à une iconographie qui se veut volontairement provocatrice et dérangeante, Tobias Forge, le créateur et leader du groupe, qui est de ma génération, a su apporter un vent de fraicheu sur la scène rock tout en offrant aux amoureux de ce genre musical une sacrée madeleine de Proust. Encore une fois, il est évident que si on s’arrête aux apparences, on ne peut découvrir la profondeur et la simplicité de ce que nous propose ce groupe. Profondeur dans les textes qui possèdent plusieurs niveaux de lecture. Simplicité dans les compositions et les arrangements. Forge a su extraire la quintessence de tout ce qui avait fonctionné avant lui.
Mais Ghost, ce n’est pas qu’une musique ou un decorum. C’est un univers. Je ne vais pas expliqué ici de quoi il est constitué, ce serait beaucoup trop long, et cet article l’est déjà bien assez. À chacun de le découvrir, tout comme je l’ai fait moi-même. Mais après, vous le savez, j’ai beaucoup de mal à faire les choses à moitié.
Ritual
D’après Spotify, Ghost est le groupe que j’ai le plus écouté en 2022. Bien devant Metallica, qui pourtant tenait la palme depuis bien longtemps. Les Four Horsemen ont d’ailleurs depuis longtemps adoubé les jeunes suédois à tel point que James Hetfield possède une guitare sur laquelle figure l’inscription « Papa Het », une allusion à peine voilée au titre que se donne le chanteur de Ghost, à savoir Papa Emeritus, haute figure du clergé caricatural qu’a fondé Forge, et qui préside à chaque rituel, en bon prédicateur qui convertit les foules à la Sainte Parole Metallique.
C’est donc tout naturellement qu’en novembre, lorsqu’une tournée française est annoncée, que j’ai sauté sur l’occasion de les voir, alors qu’ils passaient non loin de chez moi à Rennes. J’en profitai pour prendre une place à ma fille, devenue fan au point de réclamer à ses anniversaires et Noël, les CD du groupe. Le rendez-vous était pris, nous étions conviés au rituel, et la fête s’annonçait belle. Elle l’a été, au-delà de tout ce que j’aurais pu imaginer. J’ai vu beaucoup de concerts dans ma vie. Mais celui-ci est indéniablement dans mon top 3. Attention, je ne parle pas que de musique. Bien que la set liste était incroyable et que les morceaux se sont enchaînés avec une qualité rare. Non, je parle de tout ce qui fait un spectacle, et s’il y en a un qui a bien compris ce que signifiait ce mot, c’est Tobias Forge. Pendant deux heures, il nous convie à un rituel dans un decorum évidemment aux couleurs de son Église – fictive, soyons bien d’accord– les lumières, les effets pyrotechniques, la mise en scène, tout est au service d’un vrai show qui transporte son public. Fait rare, je suis ressorti du concert, alors que je n’avais pas de bouchons, sans avoir de sifflements dans les oreilles. Ce qui prouve à quel point chaque détail est calculé. Nul doute que notre cher Papa Emeritus IV souhaite que chacun reparte en pleine santé. Je dirais même, que la qualité de la balance était incroyable. Aucun musicien ou choriste était en retrait. Chacun avait sa place et était audible de manière satisfaisante.
Que dire ? Que je retournerai les voir ? Sans aucun doute ! Que le regard de ma fille aux anges a aussi compté ? Absolument ! Partager ça avec un être aimé est forcément plus fort. Et bien que j’aurais aimé faire découvrir ce groupe à Laurent, je ne doute pas qu’il n’était pas très loin de moi et qu’il devait apprécier aussi.
Venez à la messe avec moi, la porte est toujours ouverte.
Programme du rituel du 25 mai 2023 :
Imperium
Kaisarion
Rats
Faith
Spillways
Cirice
Hunter’s Moon
Jesus He Knows Me
Ritual
Call me Little sunshine
Con clavi con Dio
Watcher in the Sky
Year zero
He is
Miasma
Mary on a cross
Mummy dust
Respite on a spitalfields
Kiss the go goat
Dance macabre
Square hammer









Mes photos du concert, tous droits réservés, Onos Media.
Bon dimanche de Pentecôte !

Bonsai !
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