Holidays ohh holidays comme chantait Michel Polnareff il y a un bail. Yes, I’m on holidays. Et que de bonnes vibes pour commencer ces vacances ! Un café à la main, mes oreilles comblées de bonheur, et du soleil.
Metallicaaaaaa !!
Car oui, il est là. Enfin… Je ne me suis jamais caché, je suis un grand fan devant l’éternel du groupe californien. Après nous avoir balancé sans prévenir un single inédit en novembre annonçant le futur album, il aura fallu patienter un peu plus de 4 mois pour voir le bébé dans les bacs. 3 singles supplémentaires plus tard et pas mal de café, 72 Seasons est sorti le 14 avril et tourne donc en boucle dans mes écouteurs depuis vendredi matin. Et je headbang à tout va alors que mes doigts grattent nerveusement mon air guitar. Je prévois même une revue pour ces vacances tellement j’ai de choses à dire dessus. Cela fait bien longtemps que je n’ai pas joué à l’exercice de la chronique lors de la sortie d’un album et même faire une chronique tout court ! Mais long story short, this album kicks Ass !
New PP
Comme vous l’aurez remarqué, j’ai changé de photo d’accueil et de profil pour ceux qui me suivent sur les ERRESSE comme disent les djeuns. C’est Hildr du blog Hildr’s World qui me l’a trouvée par hasard et j’ai tout de suite adoré le concept qui se trouvait totalement à la croisée de mes gouts musicaux et littéraires. Une synthèse de l’essence même de ce blog, le métal et la fantasy réunis, bon il manque la Taverne en bas de Barad Dûr. J’ai cherché qui était le designer afin de lui demander l’autorisation d’utiliser son dessin, et après moults investigations, il semblerait que ce soit Redbug. Néanmoins, je ne sais pas comment le contacter ni dans quelle mesure je suis en droit d’utiliser son travail (je suis un peu nul pour les droits d’usages j’avoue) alors si vous en savez plus que moi je vous invite à me laisser des commentaires sur les démarches à suivre.
Série
En ce qui concerne les séries, je n’ai pas encore regardé l’épisode 7 du Mandalorian, il m’est donc impossible de vous donner un avis pour le moment. Par contre étant abonné Canal + je vais avoir la chance de bénéficier très prochainement de tout le catalogue de Apple TV + gratuitement avec mon abonnement, et ça c’est une bonne nouvelle, ça veut dire que je vais pouvoir regarder la série Histoire de Lisey, issue du roman éponyme de Stephen King, à laquelle il a directement participé. Depuis le temps que je voulais la voir, cette histoire à une saveur spéciale pour moi. Je devrais pouvoir bénéficier de tout un tas d’autres productions, j’y ferai un tour en temps et en heure. Vous le savez peut-être mais je ne suis pas forcément très séries, je préfère passer mon temps libre à lire ou à parcourir des livres de Jeu de Rôle, préparer des parties. Lorsque je fais du temps d’écran c’est plutôt généralement pour y jouer à des jeux vidéos, comme LOTRO sur lequel je suis revenu récemment afin d’admirer la beauté de la Terre du Milieu, et il y a pas à dire, ils ont beaucoup améliorer le système.
Point lecture/JDR
Puisque nous parlions de lecture et de Jeu de rôle, je poursuis ma lecture du Silmarillion par petites touches, tout en lorgnant à nouveau vers mon Conan, la faute à ce JDR dont je vous parlais la semaine dernière et dont j’ai déjà lu une bonne moitié du livre. Une revue est à venir aussi ( ça fait beaucoup de revues, ça, tavernier !) alors que je projette ma première partie pour très bientôt. Pour en revenir à Conan, quel est le rapport me direz-vous ? Et bien tout simplement l’Annexe N.. Oui vous avez bien lu. J’ai parcouru l’annexe N et dorénavant je connais des choses, sombres, ténébreuses (j’adore cet adjectif), indicibles. Trèves de plaisanterie, l’annexe N n’est pas une zone interdite du hangar 18 en zone 51, ou encore une remise condamnée du sous-sol dans lequel est confiné Mulder à qui on a adjoint la pauvre Scully qui n’a rien demandé. Il s’agit encore moins d’une backroom huppée des quartiers bien pensants de la haute société. Non l’annexe N est une liste d’auteurs qui ont inspiré à l’époque Gary Gigax et Dave Anerson, les papas de D&D. On peut y retrouver au premier rang des noms tel que Robert Howard, Jack Vance, Fritz Leiber, et H.P. Lovecraft. Et quand on regarde la couverture de l’aventure ci-dessous comment ne pas y voir une inspiration toute lovecraftienne ?
Vous l’aurez compris je suis conquis. J’aime l’ambiance un peu old school, le côté pulp. Il parait que la nostalgie c’est le mal, mais ce monde me manque parfois, il était fait de véritables rencontres, de liens sincères, de vérités bien établies ou du moins peu démenties. Aujourd’hui, internet a créé une ultra connexion où les gens ne cultivent plus le goût du réel, du convivial, de la simplicité. Tout est déformé, montré du doigt et interprété. La cacophonie ambiante en devient insupportable. C’est pourquoi une bonne table de jeu de rôle entre amis, un bon repas, quelques dés, des crayons et une franche dose de bonne ambiance alors que le soleil se couche par la fenêtre et que les ombres s’allongent, ouvrant la porte à des créatures inommables qui rampent en leur sein, d’un aspect bien au-delà de votre imagination, mais que pour autant, le temps d’un soir vous allez affronter, repoussant les ténèbres et protégeant le monde à son insu. Croyez-moi DCC a vraiment l’air d’offrir tout cela.
D’ailleurs en parlant nostalgie et musique plus haut dans ce billet, voici une petite pépite qui saura peut-être vous faire saliver.
Sur ce, je vous souhaite un bon dimanche, moi je retourne à l’écoute de mon album en boucle, et mes grimoires, accompagné d’un bon café.
Excusez-moi d’ouvrir la taverne si tard, mais je rentre de voyage. Si si, je reviens d’Egypte. Mais installez-vous, moi aussi j’ai besoin d’un bon café après tout ça.
Donc comme je vous disais je reviens d’Egypte, des pyramides pour être précis. Moi et mes compagnons sommes rentrés dans un tombeau ancien que j’avais moi-même découvert. Malheureusement tout ne s’est pas passé comme prévu, et la mort fut au bout du voyage. Ah oui, je ne vous ai pas précisé ! Ce voyage je l’ai fait assis sur mon fauteuil favori, une bonne tasse de café à la main, non pas avec un livre mais lors d’une session de jeu de rôle maitrisée de main de maitre par Xapur des blogs Lance 1D20 et Les Lectures de Xapur. Encore un grand merci à lui de m’avoir permis d’être pour une fois joueur et non MJ. Ce fut un très bon moment convivial autour d’un jeu vraiment plaisant, L’appel de Cthulhu sur un scénario directement écrit par Steve Harris et Bruce Dickinson.
Powerslave d’Iron Maiden – 1985
Évidemment je blague, mais je n’ai pas cessé de songer à cet album pendant la partie. Ça me fait penser qu’il me faudra continuer mes articles sur cette gamme puisque j’ai depuis acquis d’autres manuels, mais si cela vous intéresse vous pouvez déjà aller relire ma revue du Manuel de l’Investigateur.
Cela m’a très fortement donné envie de rejouer et/ou maitriser. Depuis le mois d’octobre, je m’étais mis en pause car cela me prenait trop de temps avec deux parties par semaine, et malheureusement ce dernier n’est pas extensible, pour autant je sens bien que cela me démange de rejouer, de préparer, d’explorer des univers. Contrairement au jeu vidéo, où vous êtes limités par le côté technique inhérent à tout logiciel, où vos actions ne peuvent être que celles prévues ou imaginées par les développeurs, contraints eux-mêmes par les limites technologiques justement, ici tout est possible, tout est plus ou moins réalisable, y compris descendre en shield-skate les escaliers d’un rempart tout en décochant des flèches, même si pour ça il vous faudra quand même une sacrée dextérité et une bonne dose de chance aux dés ! (Et beaucoup d’imagination aussi 😉 )
Alors je jette mon bouclier, je saute dessus et descend la rampe en tirant !
Quoiqu’il en soit puisque nous parlons de jeu vidéo, après quelques sessions de New World, j’ai trouvé le jeu intéressant, l’histoire assez captivante, mais le système de personnalisation ressemble plus à un bon RPG qu’un MMO. En parlant du côté MMO, le fait que tout le monde soit mélangé ne crée pas d’immersion ni une grande communication. Tu parles anglais c’est bien, tu ne le parles pas, bon courage pour trouver un groupe francophone… quand ceux-ci répondent à tes messages… ( moments vécus). J’ai donc reconnecté un autre jeu, mais j’y viendrai plus tard.
Côté lecture, j’ai commencé LeSilmarillion, mais un soir voulant lire au lit, j’ai pris ma liseuse sur laquelle malheureusement je n’avais pas ce dernier en numérique. Souhaitant à tout prix continuer à parcourir la magnifique Terre du Milieu de Tolkien, je me suis lancé sur Le Retour du Roi que j’avais coché dans ma liste de 2023, après la lecture des deux premières parties, dans la nouvelle traduction de Daniel Lauzon. Et… je l’ai fini ! Une série d’articles est en préparation à ce sujet. En effet, je n’ai pas sorti beaucoup de revues ces dernières semaines, parce que tout simplement je préfère prendre mon temps de bien rédiger mes articles surtout lorsqu’il s’agit d’un de mes auteurs favoris que je n’ai encore jamais chroniqué sur ce blog.
Quoiqu’il en soit cette lecture m’a fortement donné envie de relancer un des jeux sur lequel j’ai passé un nombre d’heures incalculable, peut-être le jeu que j’ai le plus joué : The Lord Of The Ring Online. Tout cela m’a donné une idée d’article un peu différent sur l’unboxing de ma version collector du jeu. Stay tune donc ! En attendant un petit cadeau, mon tout premier screen de LOTRO pris en mai 2007 lors de mon premier jour de jeu. Que de souvenir.. Si vous vous posez la question je suis l’elfe chasseur (Legolas sort de ce corps !!) et mon pseudo était donc Telcontarion. J’ai longtemps hésité à l’utiliser ici. Il a pendant longtemps été d’ailleurs mon identité sur le net. Si un jour vous me voyez modifier mon identité, vous saurez pourquoi, ce sera une nostalgite aigüe. À mes côtés, il s’agit d’un très bon ami, autant fan de l’univers que moi et parrain de mon ainée qui se prénomme Arwen. Je crois que ceci en dit beaucoup sur mon attachement à la Terre du Milieu.
Le pseudo de mon ami est un joli anagramme, saurez-vous le retrouver ?
Pour conclure ce ragot, nous parlerons de l’épisode 5 de The Mandalorian, un autre univers que j’aime beaucoup, qui a fonctionné à plein régime sur moi ! L’action 100% mandalorienne et les cliffhangers finaux nous laissent présager une fin de saison vraiment passionnante, j’aurais tendance à dire que ça laisse à penser qu’il y aura une saison 4 également.
En attendant je vous souhaite un bon dimanche rempli de joie et d’imaginaire. Pour ma part je vais retourner en Terre du Milieu, soit par les livres, soit par les jeux (vidéos ou rôliste !).
À très bientôt !
Namarië.
Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs.
Déjà en février, comme le temps passe vite. Il file et j’ai l’impression de n’avoir quasiment rien lu de l’année encore. Bon ce n’est pas tout à fait vrai, je suis dur avec moi-même comme souvent. Faisons donc le point de ce premier mois devant un bon café, histoire de reprendre des forces après un déménagement longue distance, hier, de la meneuse de chèvre la plus excentrique au nord de la Loire. Il faut bien s’entraider entre lecteurs, même si elle n’est pas team Coffee.
Coffee
Donc répertorions mes lectures du mois, j’ai terminé L’Affaire Charles Dexter Ward, l’intégrale 3 de Lovecraft des éditions Mnémos, j’ai englouti plus de 500 pages sur environ 900 du premier tome de Conan en poche version Patrice Louinet, j’ai relu une bonne partie de mon manuel de base de Vampire : la mascarade 5e édition et j’ai écouté plus de la moitié du Messie de Dune de Frank Herbert sur Audible, la suite de Dune qui me plait énormément. Je compte le terminer dans la semaine à venir, afin de démarrer en audio L’Eveil du Léviathan de la série de livre The Expanse de James S. A. Corey qui n’est autre que le nom de plume utilisé par Daniel Abraham et Ty Franck. Comme je l’ai dit j’ai bien envie que cette année oscille entre horreur/fantastique et Science Fiction. Ça fait très longtemps que je veux lire The Expanse, j’ai même déjà lu deux fois les premières pages. Je ne pense pas pour autant délaisser la Fantasy, mais elle se fera plus discrète et probablement que ce seront des lectures des nouvelles éditions révisés de Tolkien acquises en fin d’année dernière.
Dans d’autres registres j’ai écouté pas mal de podcasts et regardé des actuals plays. J’ai terminé le chapitre 1, soit 48 épisodes, des Chroniques de Chicago de Monsieur Alceste, fini de visionner également deux des ses émissions sur youtube, les fameux Messy Critical. Pour compléter mes lectures vampiriques, j’ai reçu le dernier ouvrage qui me manquait, le supplément de contexte sur le Sabbat, une faction qui n’est plus jouable dans cette version mais propose un antagoniste de haut niveau pour vos parties. Le blog proposera des revues sur la gamme très bientôt.
Mes lectures du mois : 1 terminée, 2 à plus de la moitié, sans compter le JDR.
Je me suis également penché sur Delta Green, un jeu de rôle publié par Arc Dream Publishing. Il s’agit d’une version contemporaine de l’appel de Cthulhu. Un mix entre X-Files et le classique de Chaosium. Le background du jeu m’a énomément plu. À la base développé comme un supplément pour l’Appel de Cthulhu de Chaosium (Descartes puis Sans Détour en France), les créateurs – rédacteurs de l’univers ont décidé de se lancer en solo et ont créé leur propre maison d’édition. Ils ont choisi le système Gumshoe pour piloter leur univers, un dérivé du Basic Role-Playing (BRP) utilisé dans L’Appel de Cthulhu mais plus simple à mon sens, privilégiant le narratif de manière encore plus prononcé que le BRP. La gamme n’existe qu’en anglais, aucun éditeur français ne souhaitant se risquer à acheter les droits de traduction puisqu’ils sont double, d’une part ceux détenus par Chaosium et de l’autre par Arc Dream Publishing. N’espérez donc pas en profitez en français pour le moment. Il existe néanmoins un ouvrage qui s’intitule La Chute de Delta Green publié chez Studio Deadcrows, une traduction d’une campagne parue chez Pelgrane Press aux USA. Il couvre une période spécifique de la timeline de l’univers se situant dans les années 60/70.
Les arrivages de la fin du mois.
Ce n’est pas la première fois que je m’intéresse à du contemporain, lors du premier confinement avec ma team nous avions joué pendant un temps à L’Affaire Greenberg en Chroniques oubliées Contemporain, une campagne complétement folle, totalement lovecraftienne mais se déroulant en 2018, au moment où Trump devient président. Le pitch m’avait beaucoup attiré. Delta Green est exactement dans la même veine, ou est-ce l’inverse ? Peu importe. Ce qui compte c’est le fun quand on joue. Comme j’aime me faire une idée de ce qu’un système de jeu et un univers peuvent rendre, je me suis écouté une partie en 3 actes réalisée par une team très sympa, La JDR Accademy. J’ai beaucoup ri et adoré l’ambiance autour de la table. Je vous donne le lien du premier épisode, il y en a 3.
Sur ce mini bilan de mois, je vous souhaite un bon dimanche, plein de lecture et de repos. Moi je retourne à mes livres, mes revues, avec du bon métal en fond , et un café pas très loin. Évidemment.
Bonsai !
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Ce soir, la tempête balaie les murs extérieurs de ma ville alors que la nuit enveloppe tout de son linceul de ténèbres. Le vent roule, se contorsionne, hurle et frappe sous les rebords du toit tandis que la pluie fouette et tapisse mes carreaux. Au travers, le paysage se liquéfie, parsemé de goutelettes scintillantes telles des milliers d’étoiles, et d’autant de coulées multicolores aux reflets oniriques. Malgré ce déchainement de fureur, sur mon bureau, une bougie famélique éclaire mon clavier, sa lumière vacillante vient parfois caresser les pieds d’un Cthulhu assis sur son trône qui me surveille à moitié endormi de sous mon écran. Mon carnet de notes et mon livre à portée de main, c’est avec un sourire malicieux que je m’apprête à rédiger cette revue. Howard Phillips Lovecraft. On peut dire qu’il a les honneurs de mon blog dernièrement, et c’est avec un plaisir non dissimulé que je poursuis cette série d’articles qui verra tous les volumes de Mnémos chroniqués. Il le mérite. Ma première revue à son sujet remonte à une lecture audio faite en 2018 du texte l’Appel de Cthulhu tiré de l’intégrale de Bragelonne qui à l’époque était le premier effort de publication assez complet tentant de regrouper tous ses textes importants en une édition unique. Puis j’avais fait le choix de parler du tome 2 de cette série intégrale, alors qu’on trouvait beaucoup plus d’éléments sur la blogosphère en rapport avec le premier tome. J’en étais à ma découverte de l’auteur, je ne savais pas vraiment vers quel type d’édition me diriger, d’ailleurs il y a beaucoup d’éléments de ces premières chroniques que je vais enfin pouvoir réviser à travers cette série d’articles, mes analyses n’étaient pas toujours justes. Mes recherches s’affinant – entre temps j’avais terminé de lire les 3 premiers tomes édités chez Bragelonne et il ne me restait plus que le quatrième concernant les contrées du rêves – je découvris un peu tard que Mnémos avait fait un financement participatif afin de retraduire tout Lovecraft en un magnifique coffret de 7 volumes. Manque de chance, j’avais loupé le train. J’allais devoir attendre la sortie dudit coffret en espérant qu’il en resterait. Ce ne fut pas le cas, mais la maison d’édition allait faire mon bonheur : ils annonçaient la publication de chaque tome séparemment dès 2022. Bingo ! L’occasion était trop belle d’autant plus que le premier tome en question contenait les textes que je n’avais pas encore lus : Les Contrées du Rêves. Alors, êtes-vous prêt à descendre avec moi les soixante-dix marches menant à la caverne de la flamme pour rencontrer Nasht et Kaman-Thah, les prêtres barbus ?
Quatrième de couverture :
Parallèlement à ses textes regroupés par la suite sous l’intitulé du Mythe de Cthulhu, H.P. Lovecraft a créé tout un univers onirique, une contrée sauvage et magique. Découvrant ses démons et ses beautés, ses cités aux merveilleuses flèches d’or, ses falaises d’onyx ou ses mers crépusculaires, Randolph Carter, le double littéraire de l’auteur, poursuit une quête sans fin, celle de Kadath l’inconnue.
Pour la première fois en France, l’intégrale de l’œuvre de fiction de Lovecraft est publiée dans une traduction unifiée, réalisée par David Camus, qui a consacré dix ans à ce chantier. Cette édition en sept tomes est complétée d’un large choix d’essais, de correspondances, de poésies et de textes révisés par l’écrivain, de cartes en couleurs, ainsi que d’études et de très nombreuses notes par les meilleurs experts de l’œuvre.
Textes de Lovecraft contenus dans ce volume : La Quête d’Iranon (The Quest of Iranon), Polaris (Polaris), La Malédiction qui s’abattit sur Sarnath (The Doom That Came to Sarnath), Hypnos (Hypnos), L’Étrange maison haute dans la brume (The Strange High House in the Mist), Le Bateau blanc (The White Ship), Celephaïs (Celephaïs), Ex Oblivione (Ex Oblivione), Ce qu’apporte la lune (What the Moon Brings), Le Livre ( The Book), Les Chats d’Ulthar (The Cats of Ulthar), Les Autres Dieux (The Other Gods), Le Témoignage de Randolph Carter (The Statement of Randolph Carter), La Quête onirique de Kadath l’Inconnue (The Dream-Quest of Unknown Kadath), La Clé d’argent (The Silver Key), À Travers les portes de la clé d’argent (Through the Gates of the Silver Key), Azathoth (Azathoth).
Mon avis :
Cette édition intégrale possède un écrin somptueux qui ne cesse de me ravir, moi l’amoureux des livres. Couverture rigide, dos élégant, que je préfère en blanc d’ailleurs comme ma présente édition plutôt que le noir du coffret intégral (mais ce n’est qu’une question de goûts), double pages de garde intérieures décorées d’une magnifique carte des Contrées du Rêve en couleur, et un papier à l’épaisseur idéale, le tout pour une prise en main agréable. Même si HPL disait lui-même que l’objet-livre ne comptait pas, seulement son contenu, je ne peux tout de même que m’extasier devant cette finition de qualité qui se veut à la hauteur de l’oeuvre de l’auteur de Providence. Indéniablement, cette édition surpasse tout ce qui a été fait jusqu’ici en France, que ce soit dans la finition, l’esthétique, mais surtout dans la traduction et l’agencement des récits et contes. Ce recueil ainsi que le second n’ont pas été totalement le fruit du Crowdfunding. En effet le travail avait commencé en 2010 avec une première édition de ces Contrées du Rêve qui a servi de base. Après une introduction générale de l’intention de cette nouvelle traduction par David Camus, nous avons deux préfaces, celle de la première édition, suivie d’un addendum pour le présent livre. Elle nous donne le ton de ce recueil, les enjeux, et ce que le traducteur a tenté modestement de rendre à César – surnom que Lovecraft n’aurait pas renié lui qui se faisait appeler Lucius le romain. Trois textes viennent compléter la version publiée en 2010 : Ex Oblivione, Ce qu’apporte la lune et Le Livre, pour un total de 17 entrées.
Dans chacun des autres volumes de l’intégrale, l’ordre chronologique d’écriture des textes a été privilégié, mais il n’en va pas de même pour celui-ci. David camus nous en explique la raison en préface :
Ici, le parcours – puisqu’il s’agit, dans tous les cas, d’une proposition de voyage – emprunte la temporalité des rêves, qui n’est pas toujours chronologique. Les œuvres sont donc présentées dans l’ordre qui nous a paru offrir la meilleure expérience de lecture – ou onirique, si vous préférez. Une expérience qui débute par « La Quête d’Iranon », dont les décors évoquent l’Antiquité, et se prolonge, en passant par les temps modernes, jusqu’au voyage entrepris par Carter au sein même de ces Contrées, où il recherche Kadath.
David Camus
Voilà l’itinéraire tracé, nous n’avons plus qu’à nous allonger tranquillement, la tête bien calée sur notre oreiller et à sombrer au pays des rêves pour y retrouver toute la féérie onirique déployée par Lovecraft. Mais que nous raconte ces textes ? Qu’évoquent-ils ? Et pourquoi les avoir regroupés ensemble ? Je vous propose de découvrir mes notes de lectures dans leur état brut afin de vous faire une idée.
La quête d’Iranon : On dirait du Tolkien dans sa poésie aux accents antiques, aux noms chatoyants. La morale de la quête d’Iranon c’est que lorsqu’on perd ses rêves on meurt. Le rêve rend éternel et le beau repousse la mort. C’est aussi une métaphore du passage à l’âge adulte selon moi.
Polaris : Rêve et réalité se confondent à la lueur des étoiles. Où commence le rêve ? Où finit la réalité ? Le rêve est une porte entre les mondes? Rythme, conception, figures de style et vocabulaire poétique, tout y est. Un de mes préférés. La passivité du héros est une métaphore à peine voilée du sentiment d’inutilité de Lovecraft pendant la WW1 alors qu’il ne put rejoindre un bataillon d’engagement pour des raisons de santé.
La Malédiction qui s’abattit sur Sarnath : remake de Sodom et Gomorrhe avec de belles descriptions qui perdent le lecteur, alors que la finalité est présente dès le début. Thème (étonnant ?) de Lovecraft sur la peur de l’autre, de l’inconnu.
Hypnos : il pose les jalons de la suite de son œuvre avec « l’indescriptible » laissant l’imagination du lecteur faire le reste. Voyage astral ? A-t-il réellement un ami ? Le rencontre-t-il réellement à la gare ou s’agit-il déjà de sa statue ? Encore une fois perte du réel. Peur du vieillissement et de la mort.
L’étrange Maison Haute dans la Brume : Conte onirique, symbolique du chemin vers le rêve (on monte), histoire d’ambiance avant tout. première nouvelle où nous apercevons la ville de Kingsport qui n’est autre que la transcription de la cité de Marblehead dans le Massachusetts avec ses maisons de style coloniale qu’affectionnait particulièrement HPL.
Le Bateau Blanc : Quête onirique d’un royaume mais les présages sont trompeurs. Et la mort ou le désespoir guette celui qui veut trop savoir.
Celephais : Encore une fois le rêve rend fou et aveugle. Il peut conduire un homme de la misère au suicide en cherchant à braver l’interdit.
Ex Oblivione : Les drogues pour oublier le monde, rêver et mourir.
Ce qu’apporte la lune : Plutôt la mort dans l’horreur que la folie et la peur. Comme souvent tout démarre bien, le décor est bucolique puis l’horreur et la nécrose s’installent.
Le livre : Occultisme mystique, livre magique ouvrant sur d’autres dimensions de l’espace. j’adore!!
Les chats d’Ulthar : Conte onirique incroyable, montrant toute l’affection que HPL portait aux chats qui le lui rendaient bien.
Les autres Dieux : Texte relatant l’histoire d’un soi-disant sage voulant percer le secret des dieux dans les royaumes oniriques, à chacun d’y voir une morale.
Le témoignage de Randolph Carter : Excellent texte à l’ambiance crypte et cimetière, comme dans le molosse, précurseur aussi à mon sens de Charles Dexter Ward. J’adore !
La quête onirique de Kadath l’inconnue : Presque un roman, un voyage au bout du rêve. Suite d’aventures, digne d’un jeu de rôle, où il réintègre énormément de thèmes et de personnages déjà révélés dans d’autres textes (Pickman, les Chat D’Ulthar, les ruines de Sarnath, etc)
La Clé D’argent : Un conte sur l’enfance, l’âge des rêves que Carter s’efforce de retrouver par tous les moyens.
À travers les portes de la clé d’argent : Cette suite écrite sur l’insistance de Hoffman est beaucoup moins bonne que la précédente. L’influence de Lovecraft m’y semble mineure tant les ficelles sont grosses et peu poétique.
Azatoth : Un de mes poèmes en prose favori que j’avais déjà cité lors de la revue du tome 2 du Mythe par Brage.
Il m’est difficile de choisir mes textes préférés tant j’ai été envouté tout le long de ma lecture. Un voyage sublime, d’une poésie incroyable qui pose un contraste saisissant avec les textes qui traitent de l’horreur cosmique et pour lesquels il est plus connu. Ici le fantastique se veut féérique, onirique, et l’auteur nous y livre une prose poétique à bien des égards. Il m’est plus aisé de vous dire plutôt ceux qui m’ont moins marqué sur ce recueil, comme À travers les portes de la clé d’argent, qui d’ailleurs est le fruit d’une collaboration que Lovecraft n’avait pas vraiment souhaité, ne voulant pas apporter de suite à La Clé d’Argent. Les textes sont inégaux en terme de longueurs, certains allant de quelques pages tandis que d’autres comme La quête onirique de Kadath l’inconnue font la taille d’un roman, et quel roman, malgré certaines redondances ! Nous sommes à la limite de l’oeuvre de Fantasy. Je dirais tout de même que j’ai une affection toute particulière pour Polaris, Celephais, Le livre qui semble avoir été une tentative de retranscrire en prose les Fungi de Yuggoth, un ensemble de sonnets poétiques, Le témoignage de Randolph Carter pour son côté macabre et suggestif, La Clé D’argent pour sa quête du monde de l’enfance qui nous est à jamais perdu, et Azatoth pour sa sublime poésie colorée. Je pourrai rajouter La Quête d’Iranon, L’étrange Maison Haute dans la Brume,Le bateau Blanc et bien évidemment La quête Onirique de Kadath L’Inconnue chacune cultivant l’étrange et le surnaturel mais possédant bien souvent une morale ou un message caché. David Camus nous dit à juste titre que Lovecraft, ne cesse de nous échapper pour mieux nous envelopper. En tout cas aujourd’hui il ne peut plus fuir sa renommée, bien qu’il arriverait encore à tourner ça en dérision, voire à croire que tout ceci n’est qu’un rêve.
Conclusion
David Camus nous livre une traduction très pure, au plus proche de la version originale, qui m’a fait redécouvrir Lovecraft. Sa préface nous donne les pistes de lecture à suivre, les chemins cachés au détour d’une phrase, d’un titre, et il peut être intéressant pour vous de la relire à posteriori une fois le voyage terminé comme moi je l’ai fait, car certains éléments ont un sens nouveau. Les notes de bas de pages qui parsèment le tout facilitent la compréhension globale et sont un véritable plus. Ici, Lovecraft n’est pas traité comme un auteur à la mode qui fait gagner de l’argent, mais bien comme un artiste, un esthète de la littérature à l’univers complexe et magique qui mérite d’avoir une traduction à la hauteur de son talent. Mnémos y ajoute un écrin de très belle facture qui rend le voyage d’autant plus agréable. L’hommage et le respect de l’oeuvre sont perceptibles à tous les niveaux, ce qui semble bien être l’objectif de cette présente édition, validé de bien belle manière. Et si d’avenir on me demandait quelle édition je recommande pour découvrir Lovecraft, je répondrai sans détour (désolé pour le jeu de mot, les fans du JDR comprendront) : l’intégrale MNÉMOS.
Ainsi s’achève notre ballade onirique, le réveil approche, on se retrouve très bientôt pour la suite des revues sur cette intégrale, en attendant, rendez-vous sur les chemins des Contrées du rêves, en bon rêveur que nous sommes, lecteurs d’imaginaire.
Bonsai!
Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs.
22h30. Je viens de refermer mon livre, Je Suis Providence de S.T. Joshi.
Un grand vide s’empare de moi alors que, mon livre encore entre les mains, je contemple fixement mon exemplaire des Montagnes Hallucinées & Autres Récits d’Explorations des ÉditionsMnémos posé à gauche devant moi, sur la table basse du salon. Tremblotante à côté de mes livres empilés, la flamme de ma bougie parfumée ondule, faiblarde, avant de s’éteindre. Comme un signe. Je viens de passer un mois avec HPL et pour moi c’est comme s’il venait de mourir pour la seconde fois, seul, ignoré, oublié, sans descendance. Pourtant cette fois-ci, ce n’est pas tout à fait vrai. Cette fois-ci, j’étais là, j’ai été témoin, je l’ai accompagné, impuissant à changer quoi que ce soit à sa destinée, bloqué dans les couloirs du temps. Un témoin muet, inaudible. Un témoin touché au cœur.
Lire un auteur mort dont on connait les généralités communes est une chose, mais lire Je Suis Providence c’est comme le voir ressuciter pleinement, c’est vivre à son époque, prendre part à ses relations, ses expériences, son évolution, ses études, ses correspondances, son quotidien, pendant 47 ans. Alors l’accompagner jusqu’à cette fin si poignante après tant de mots partagés, c’est comme perdre un ami.
Je comprends – du moins je peux avoir une début d’idée – ce qu’a dû ressentir David Camus après plus de 10 ans passés à retraduire Lovecraft, parce que moi, après un mois complet à partager son quotidien et lui le mien, je suis parcouru de beaucoup d’émotions différentes allant de la tristesse à la consternation en passant par l’admiration et le rire.
Il est 22h30 et je n’ai pas envie de dormir. J’ai envie de prendre mon livre sur la table et relire une de ses nouvelles, la toute première que j’ai lu, La Cité Sans Nom. Me mesurer à nouveau à l’immensité de son talent littéraire. Et me perdre dans l’abîme du cosmos, sombrer jusqu’à n’être plus qu’un petit point, perdu parmi les étoiles…
8 Janvier 2023. Kerbaden.
Cette Préface a été écrite dans la foulée de la fin de ma lecture. Pour la première fois je voulais saisir l’instant. Pour la première fois je voulais écrire à chaud, le cœur encore saignant, ce qui me traversait. Au départ, je m’étais fixé l’idée de rédiger toute ma revue d’une traite car, oui, je ne voulais pas dormir. Je voulais rester encore un peu avec lui, à son chevet. Et vous vous demandez sans doute ce que j’ai fait après avoir écrit ce passage… nous en parlerons plus tard. En tout cas je n’ai pas pu tout écrire. Je me connaissais, je le savais. Il fallait laisser refroidir les cendres avant de fouiller dedans. Allez, suivez-moi, je vous emmène de l’autre côté de l’Atlantique, à Providence.
Hello There !
Une fois n’est pas coutume, seulement un mois après sa lecture, et dans la foulée des Onos Awards, où Lovecraft fut le grand vainqueur de 2022, je publie ma revue. C’est suffisamment rare pour être souligné. Vous verriez mes articles en attente, certains sont sur des livres lus il y a deux ans ! Mais au jeu de la mémoire et des notes, je m’en sors plutôt bien. Alors pourquoi écrire si vite sur ce livre qui m’a profondément marqué, à tel point que j’y pense encore malgré d’autres lectures entamées ? Pour graver dans le marbre cette expérience. Ce blog c’est un peu mon journal de lecture (j’y reviendrai plus tard), et autant je me moque dans quel ordre sont rangées certaines lectures, autant celle-ci j’ai eu besoin qu’elle soit ancrée temporellement, parce que pour moi, il va y avoir un avant et un après. On se remémore tous certaines choses par rapport au contexte, c’est l’une des mémoires dont nous disposons. Il arrive que, certaines fois, certains éléments disparaissent de cette mémoire contextuelle pour passer dans la mémoire à long terme, tout simplement parce que nous l’avons perdu. Hors ici, je ne le veux pas, cette revue est un témoignage, tout autant qu’un hommage. Une trace, infime soit-elle, dans l’immensité du net. Elle ne survivra pas à l’oeuvre de Lovecraft, je n’ai aucun doute, ni non plus je l’espère à ce livre colossale qui parle d’un homme avant tout.
Quatrième de couverture :
Howard Phillips Lovecraft (1890-1937) est un auteur qui fascine autant par son oeuvre que par sa personnalité. Ayant influencé avec ses récits fantastiques et horrifiques (comme L’Appel de Cthulhu) de nombreux écrivains comme Stephen King, ses fictions et sa vie ont été soumises à de nombreuses interprétations pas toujours exactes, véridiques et précises.
Spécialiste des littératures de l’imaginaire et de Lovecraft en particulier, S.T.Joshi travaille sur sa biographie depuis plus de 20 ans. Par son érudition et son ampleur, elle est aujourd’hui considérée comme la référence au niveau mondial.
Pour la première fois en France, sous la direction de Christophe Thill et avec le concours d’une équipe de dix traducteurs, cette biographie est proposée aux lecteurs.
Traduit de l’anglais (américain) par Thomas Bauduret, Erwan Devos, Florence Dolisi, Pierre-Paul Durastanti, Jacques Fuentealba, Hermine Hémon, Annaïg Houesnard, Maxime Le Dain, Arnaud Mousnier-Lompré & Alex Nikolavitch.
Un Essai plusieurs fois tenté.
D’aussi loin que je me rappelle, dès la sortie du livre, j’ai eu envie de le lire. Je me le suis donc procuré en Ebook. Mais le nombre de pages, monstrueux sur ma liseuse, et les débuts généalogiques très factuels ne m’avaient pas permis de rentrer dedans, car il ne s’agit pas ici d’un roman. Début novembre, ça faisait deux mois que je ne lisais plus suite à un covid plutôt retord qui m’avait fatigué au-delà de ce que je pouvais imaginer. Alors que je préparais mes petites commandes de Noël, le site de la Fnac me proposa d’autres produits basés sur mes achats précédents. Le premier sur la liste était le tome 1 de Je suis Providence. Hésitant, vu mon peu d’engouement pour la lecture à ce moment là, l’idée me vint que si je n’avais peut-être pas réussi à le lire c’était à cause du format numérique. Dans un geste réflexe je l’ajoutai à mon panier, en me disant que je verrais bien, que ça se tente. De plus, il ne s’agissait ici que du format semi poche, qui était moins épais et peut-être plus digeste. Il faut comprendre mon désarroi de l’époque : Je suis un amoureux des pavés, pourtant celui-ci me faisait peur et m’avait même repoussé en Ebook. Cependant j’étais dans un « ras le bol » général, un trop plein de fantasy, par rapport au JDR et mes lectures, plus rien ne me bottait, la dépression, ce monstre sur le seuil, guettait à ma porte. Lire une bio allait peut-être me donner de l’air, de plus je n’étais pas obligé de me forcer à tout avaler, je pouvais la picorer. Je ne savais pas que ce livre allait m’entraîner par-delà le mur du sommeil et de mon heure de coucher habituel, moi qui n’arrivais plus à veiller le soir. Au final, je l’ai dévoré d’une traite, enchaînant les deux tomes, dans une boulimie livresque comme je n’en avais pas connu depuis longtemps. Mais alors pourquoi cela a-t-il été magique ?
Tout commence à Providence.
Pour situer le contexte et mes essais ratés, je me dois d’expliquer ma rencontre avec celui que je pensais être le reclus de Providence à l’époque. Notre premier contact eut lieu dans ma jeunesse lorsque Stephen King le cita dans une préface et qu’un ami me parla du Jeu de Rôle L’Appel du Cthulhu auquel il était en train de jouer. Je fis bien le lien avec le titre instrumental éponyme de Metallica sur Ride The Lightning mais ça en resta là. Plusieurs années plus tard, la culture littéraire en plus, je situais largement Lovecraft, mais la fantasy ayant jeté son voile rouge sur moi, je ne pris pas le temps de lire son oeuvre, jusqu’a ce qu’on me propose de faire d’une pierre deux coups et de découvrir la lecture en audio et HPL. J’ai déjà parlé de cette expérience et je ne vais pas y revenir. J’étais aspiré, mon âme était perdue. 4 ans plus tard, toute l’intégrale Bragelonne dévorée – et encore plus tard, je prends davantage de plaisir à lire l’édition de Mnémos dans la traduction de David Camus, plus complète, plus proche de l’original, mais ça c’est une autre histoire à venir bientôt – , je ne pouvais me contenter d’en rester là. Il faut me comprendre, je suis un peu obsessionnel : quand quelque chose me fascine, il me faut creuser, il faut que j’en sache plus sur le sujet qui me taraude, et si c’est une oeuvre, je me dois de connaitre son auteur, son contexte et son processus de création. Pour deux raisons, tout d’abord j’ai une soif de connaissance inextinguible. Lorsque la porte a été ouverte, ma curiosité, ma soif de découverte sont dures à étancher. Tant que je n’ai pas la sensation d’avoir fait le tour d’une question, je passe difficilement à autre chose. Ensuite, tout simplement parce que je n’aime pas dire des âneries sur un sujet que j’aime, et en ce qui concerne Lovecraft beaucoup de choses ont été dites et peu sont vraies.
Beaucoup de gens imaginent Lovecraft, enfermé entre ses quatre murs, volets clos, écrivant compulsivement des textes aux sens étranges, misanthropiques, pessimistes, en proie à toutes sortes de pathologies mentales, dépressif, mélancolique, incapable de nouer de contacts normaux avec ses semblables. Certains croient même qu’il a en sa possession un étrange livre auquel il fait référence dans ses textes, Le Nécronomicon d’Abdul Alhazred, et qu’il a percé des mystères qui l’ont rendu fou. D’autres disent qu’il n’a jamais quitté Providence, ville de taille moyenne du Rhode Island, située entre New York au sud et Boston au Nord.
S. T. Joshi né en 1958, découvrit Lovecraft à l’âge de 13 ans. Captivé par ces récits et la prose surnaturelle de HPL, il se lance lui-même dans l’écriture de fictions avant de changer d’avis à l’age de 17 ans et de vouloir devenir critique littéraire. Il choisit de rejoindre l’université de Brown à Providence, réputée posséder plusieurs documents manuscrits de Lovecraft, dans le seul but de rédiger une idée de livre qui le travaille : H. P. Lovecraft: Four Decades of Criticism (1980). Totalement sous l’emprise de l’oeuvre et fasciné par l’homme, il continue de travailler et de publier sur Lovecraft, Lovecraft’s Library (1980; rev. ed. Hippocampus Press, 2002), An Index to the Selected Letters of H. P. Lovecraft (1980; rev. 1991), Selected Papers on Lovecraft (1989), and An Index to the Fiction and Poetry of H. P. Lovecraft (1992). Il édite également les mémoires de Sonia Davis The Private Life of H. P. Lovecraft (1985) et Collected Poems (1988) de Donald Wandrei, contemporain et ami de Lovecraft. Le temps avançant, sa connaissance de l’auteur devint très approfondie et assez complète. Ses recherches constantes l’amenèrent à exhumer des lettres ainsi que des textes manuscrits originaux, permettant de rééditer dans leurs justes formes certains des plus grands récits de Lovecraft, passablement déformés dans les mains d’Arkham House. Son travail de recension méticuleux et précis de tout ce qui touche au Maitre de Providence l’incita naturellement à s’intéresser aux autres auteurs de fictions, contemporains ou influenceurs, gravitant autour de Lovecraft, complétant ainsi son panorama littéraire de fictions fantastiques. En 1993 il se lance dans la rédaction de ce qui allait devenir LA biographie de référence d’un auteur désormais célèbre grâce en grande partie à son travail : Je Suis Providence. En 2010, Hippocampus Press publie une version intégrale et mise à jour de la biographie, suite aux découvertes réalisées entre temps. Il aura fallu plusieurs années pour que ce livre arrive en France grâce à l’impulsion de passionnés et un crowfunding. Je vous renvoie à l’article d’Actu SF sur la genèse de ce livre monumental dans tous les sens du terme. Bien qu’on voit à quel point ce livre n’est pas un livre comme les autres, pourquoi est-il à ce point un must pour tous les fans de Lovecraft ?
Du Gentleman Colonial au Cosmicisme.
Pour comprendre l’oeuvre d’un auteur, je pense qu’il faut en saisir sa pensée, sa vision philosophique. Nous sommes le produit de notre éducation et de notre époque. Lovecraft n’échappe pas à la règle bien qu’il le réfuta pendant très longtemps et se voulait un gentleman du XVIIIe siècle. Il n’hésitait pas d’ailleurs à signer Grandpa nombreuses de ses lettres, signifiant ainsi qu’il se sentait vieux avant l’heure. Pour autant qu’est-ce qui a pu le conduire à tant de décalage et souhaiter être né deux siècles plus tôt et comment a-t-il pu finir par développer un schéma de pensée conduisant à son cosmicisme ?
« le passé est réel — il est tout ce qui existe ». Pour Lovecraft, le futur est une inconnue tant il est imprévisible ; inversement, le présent n’est que le résultat inévitable de tous les événements passés, que nous en soyons conscients ou non.
S. T. Joshi
Le début du livre s’attarde à nous expliquer les racines de Lovecraft, que ce soit tout d’abord sa terre natale, le Rhode Island, aussi bien que sa généalogie. Passé ce préambule qui a finalement fini par me happer, notament pour sa dimension historique sur les origines de l’état d’implantation de l’écrivain, on entre dans le vif du sujet avec une description de son environnement familial. Issu de l’aristocratie de Providence, il se retrouve très vite orphelin de père dans des circonstances dramatique et c’est son grand père maternel, Whipple Phillips, qui va se charger de son éducation. Cette figure paternelle de substitution, qui ne manque pas de ressource financière étant un homme d’affaire audacieux, ouvrira la perception et développera la curiosité du jeune Howard notamment grâce à une bibliothèque fournie située dans les soupentes du grenier et n’hésitera pas à passer tous les caprices de son petit-fils lorsque ce dernier voudra obtenir certains accessoires pour ses études. D’un un autre côté c’est dans ce terreau familial aristocratique, que les germes du racisme de Lovecraft vont naitre. Élevé dans l’aryanisme, qui n’était pas encore la théorie que les nazis en feront, Lovecraft, comme beaucoup de ses contemporains, pense à tort que la race indo européenne est une race culturellement supérieur, et je simplifie beaucoup.
Vers six ou sept ans, j’étais un païen fervent, tellement intoxiqué par les beautés de la Grèce que j’en vins à croire à moitié aux anciens dieux et aux esprits de la nature. J’ai véritablement édifié des autels à Pan, Apollon et Athéna, et j’ai guetté au crépuscule, dans les bois et dans les champs, les dryades et les satyres. Un automne, je crus fermement avoir aperçu des créatures sylvestres en train de danser sous des chênes ; une sorte « d’expérience religieuse »aussi vraie à sa manière que les extases subjectives des chrétiens. Lorsqu’un chrétien me dit qu’il a « ressenti » en lui la réalité de son Jésus ou de son Jéhovah, je peux lui répondre que j’ai « vu » Pan aux pieds fourchus et les soeurs des Phaëtuses d’Hespérie.
H. P. Lovecraft
Car le petit Lovecraft, bien qu’il vive reclus, n’allant pas à l’école, est une personne vive d’esprit. À deux ans, il récite déjà de la poésie. Grandissant, il se passionne tout d’abord pour l’antiquité. Ses lectures des philosophes grecs et romains l’inspirent et il commence à rédiger des poèmes. Puis vers ses huit ans, il découvre les sciences. Sa soif de connaissance inextinguible sur ce nouveau sujet d’étude et de passion le pousse à réclamer un nécessaire de chimie pour des expériences et un téléscope pour regarder les étoiles. Ahh, les étoiles. Tout petit déjà, il est attiré par l’immensité du ciel. Un amour qui ne se démentira jamais. Il commence à rédiger très tôt des journaux amateurs qu’il distribue au sein de sa famille et de leurs amis sur ses découvertes scientifiques, il propose des almanachs précis sur les mouvements stellaires. Un peu en marge, celui qu’on regarde avec distance depuis le bord du champ alors qu’il a l’œil à son téléscope, est couvé par sa famille. Malheureusement, la fortune familiale s’effondre et sa mère et ses tantes se voient contraintes de déménager. L’heure d’essayer d’aller à l’école à sonner, et Lovecraft envisage une carrière d’astronome. Malheureusement, il est un élève moyen en mathématiques.
Adieu carrière scientifique, d’ailleurs il ne sent pas la santé de continuer à aller à l’université. Pour autant il n’est plus le reclus qu’il a été. Il s’est fait des amis. Ils ont des jeux, ils créent une association de détective tant il se passionne pour les aventures de Sherlock Holmes. Car il lit beaucoup. De tout, y compris du pulp magazine, littérature populaire bien souvent sans envergure. Alors qu’il traverse une période dépressive dûe à son incapacité à réaliser son rêve et son échec scolaire, il écrit dans le courrier des lecteurs de certains pulps et à force de critiques, parfois acerbes voire comiques notamment sur l’astrologie, il va nouer des contacts qui vont lui permettre de se lancer dans le journalisme amateur. C’est ce tremplin qui permettra à Lovecraft d’envisager l’écriture comme remède à ses névroses. Je condense et schématise volontairement car le but de cette revue n’est pas de vous raconter en détail le livre, mais de vous montrer à quel point le texte est riche, détaillé, précis et documenté.
Facette méconnue de Lovecraft, il possède un humour décapant, la preuve avec cette réponse faite à un astrologue dénommé Hartmann, ici déformé en Francisco artmano dans un courrier des lecteurs :
«Le transit croisé de Jupiter et d’Uranus au-dessus du soleil et de la lune alternativement radiaux le 9 mars 2448 prouve sans ambiguïté que le monarque américain sera renversé cette année-là lors d’un soulèvement populaire emmené par le général José Francisco Artmano et qu’une nouvelle république sera fondée, la capitale étant ramenée de Mexico à Washington. Plus terrible encore, le trigone collusif quaternaire de Mars, Mercure, Vulcain et Saturne, dans la 13e maison du Cancer le 26 février 4954, sert de signe avant-coureur immanquable pour nous montrer le jour horrible où notre Terre périra infailliblement par suite de l’explosion subite et inattendue des gaz volcaniques qu’elle renferme.»
« […] le calcul du transit à rebours alterné excentrique de la future projection de la comète de Delavan autour du carré quartile progressé de l’inclinaison prolongée de l’orbite rétrograde de Saturne éclaircit la situation confuse en l’espace d’un instant, élucide le problème d’une manière aussi simple qu’évidente et rend à l’homme l’espoir sans lequel le cœur se briserait. » Bref, la comète de Delavan heurtera la Terre 56 ans avant l’explosion de notre planète et emportera tous les habitants du globe sur sa queue pour les emmener vivre « à jamais […] dans la paix et l’abondance » sur Vénus. Voilà le genre humain sauvé ! Tout le monde, cependant, n’en sortira pas indemne :
Je m’aperçois à mon grand regret que des fragments de l’explosion de la Terre en 4954 frapperont la planète Vénus où ils créeront d’énormes dégâts et causeront de graves blessures au señor Nostradamo Artmano, le descendant en droite ligne de notre talentueux professeur Hartmann. Le señor Artmano, sage astrologue, sera touché au crâne par un gros volume d’astronomie soufflé depuis la Bibliothèque publique de Providence, et son esprit se ressentira tellement de sa commotion cérébrale qu’il ne sera plus en mesure d’apprécier les préceptes divins de l’astrologie
H. P. Lovecraft, complété et cité par S. T. Joshi.
Pour autant ces éléments nous montrent deux choses et répondent à nos questions. Lovecraft était issu d’un milieu bourgeois qui véhiculait encore les valeurs coloniales du XVIIIe siècle, avec notamment tous les travers que l’on accorde à l’auteur comme son antisémitisme, son racisme notoire, et son caractère hautain. Néanmoins, Joshi, par sa présentation et sa prise de position affirmée et subjective, nuance ce tableau par une description précise des mœurs de l’époque, un travail de recherche documenté avec preuves à l’appui. Il analyse de manière perspicace le terreau familial de Lovecraft, nous livrant ainsi une compréhension nouvelle de sa personne, avec citations à l’appui et extraits de lettres. Pour autant, il ne l’excuse pas. Loin de là. Comme il le souligne dans la préface, son travail n’est pas fait pour glorifier l’homme mais bien pour restituer la vision de l’écrivain au travers du prisme de son époque avec tout l’arrière-plan politique, économique, intellectuel, social et culturel nécessaire. Son travail de biographe, aussi minutieux que celui d’un historien, le pousse obligatoirement à prendre parti, permettant ainsi au lecteur de pouvoir se forger sa propre opinion par accord ou désaccord avec l’une ou l’autre des positions. L’étude de sa pensée philosophique que l’auteur considère, » non seulement comme intéressante en elle-même, mais aussi comme formant la base d’une grande partie de son œuvre ainsi que de son comportement personnel » nous permet de voir avec justesse l’homme qui se cache derrière les mots, et ses textes prennent un sens nouveau. Il veut permettre à Lovecraft de pouvoir nous transmettre sa vision avec justesse, puisqu’il ne peut plus le faire lui-même.
Ce à quoi je fais allusion ici, c’est la cristallisation esthétique de ce sentiment brûlant & inextinguible où l’émerveillement se mêle à l’oppression, où l’imagination sensible ressent lorsqu’elle se confronte, avec ses limitations, à l’abîme vaste & provocateur de l’inconnu. Voilà qui a toujours été l’émotion majeure de ma psychologie, & bien qu’elle soit moins répandue chez la majorité de nos concitoyens, il s’agit néanmoins d’un facteur permanent & clairement défini dont peu de personnes sensibles sont entièrement dépourvues.
H. P. Lovecraft
Alors comment Lovecraft finit-il par tendre vers le cosmcisme, ce mouvement de pensée qui postule qu’il n’y a pas de présence divine connaissable dans l’univers et que les humains sont particulièrement insignifiants dans l’infini intergalactique ? À la lueur des éléments présentés, on déduit aisément les causes et les raisons qui conduisirent le maître de Providence à adhérer à cette philosophie. À mon sens, Lovecraft avait une hyper sensibilité aux choses qui l’entouraient, il était doté d’une très grande conscience de lui-même ainsi que de l’univers et de son immensité. Au fur et à mesure que sa connaissance scientifique croissait, un sentiment d’insignifiance, renforcé par sa propre expérience de vie, s’installa en lui. Fasciné par les vastes espaces interstellaires, et consterné par les plates préoccupations humaines, au sein d’une époque dans laquelle il se sentait en décalage, il bâtit cette doctrine qu’il entreprit de verbaliser dans ses écrits. Mais plutôt que de désespérer, au contraire, il essaya de profiter un maximum de son temps pour continuer à apprendre, s’émerveiller.
Tout finit à Providence.
Sa nature tripartite : l’amour de l’étrange et du fantastique, l’amour de l’ancien et du permanent, l’amour des vérités abstraites et de la logique scientifique.
S. T. Joshi
La vie de Lovecraft se déroule sous nos yeux. Parfois détestable, parfois poignant, souvent drôle et pertinent, l’homme ne laisse pas insensible que ce soit par ses prises de positions assez extrêmes, propre à la jeunesse par méconnaissance du monde, ou par son incacapcité chronique à rentrer dans le moule d’une société qui aime formater les gens afin que chacun y joue son rôle. Il existe cependant un point de bascule assez frappant dans sa vie, un moment charnière qui transformera l’homme : son passage à New York. Il y passera deux ans suite à son mariage avec Sonia Davis, un échec retentissant pour celui qui est assexué et ne vis que pour la transcendance intellectuelle. Son racisme et son antisémitisme atteignent des hauteurs répugnantes qui se manifestent notamment dans un texte écrit à cette période alors que sa production littéraire au sein de la mégalopole est assez maigre, Horreur à Red Hook. La ville cosmopolite l’étouffe, seuls ses amis, intellectuels comme lui, lui permettent de tenir le coup. Pourtant, à bout nerveusement, et appauvri au delà de l’inimaginable, nous le plaignons. Comment peut-on vivre avec seulement 2 dollars pour se nourrrir par semaine ? Comment supporter de le voir se faire voler ses costumes alors qu’il n’a déjà pas d’argent et que son apparence et inestimable pour lui ?
En fait, il y a peu de personnes inutiles & ratées qui me découragent et m’exaspèrent plus que ce vénérable Ach’Pé-El. Je connais peu de personnes dont les accomplissements sont si éloignés de leurs aspirations ou qui, en général, ont encore moins de raisons de vivre. Il me manque toutes les aptitudes que je souhaiterais avoir. J’ai perdu, ou vais probablement perdre, tout ce que je chéris. D’ici une décennie, à moins que je ne puisse trouver un travail qui me rapporterait au moins dix dollars par semaine, je devrai choisir le chemin du cyanure, puisque je ne pourrai plus garder les livres, les tableaux, les meubles et autres objets familiers qui sont ma seule raison de rester en vie […]
H. P. Lovecraft
Il faut parfois pourtant traverser les flammes de l’enfer, pour renaitre : lui a été forgé dans les braises de New York. Son retour à Providence, avec tout ce qu’il affectionne, ses batisses coloniales, ses jardins apaisants, ses sept collines qui dessinent leurs profils dans l’encadrement de sa fenêtre, sera l’eau qui refroidit le fer chauffé à blanc. Un nouveau Lovecraft apparait, et ses textes ne seront plus jamais les mêmes. C’est là, dans les mois et années qui suivent le retour, qu’il va écrire deux de mes textes préférés : L’affaire Charles Dexter Ward et Les Montagnes Hallucinées. Le premier n’est ni plus ni moins qu’autobiographique en un sens tant les références à lui-même sont nombreuses, et bien que Joshi nous présente pour chaque période une étude minutieuse et détaillée de chaque texte dans leur contexte, apportant des éléments que seules les sources personnelles de Lovecraft, telles des lettres, des carnets, des notes griffonnées nerveusement peuvent étayer, il n’est nul besoin de cette analyse pour comprendre, après ce que nous venons de lire, en quoi ce texte est très personnel, tel une thérapie. Lovecraft évolue. Ses nombreuses relations épistolaires, car il ne refuse jamais de répondre à quelqu’un qui le contacte, cumulant jusqu’à presque 97 entrées de correspondances en cours à la fin de sa vie, lui permettent de revoir sa pensée philosophique, d’affiner sa compréhension du monde, à tel point que le Républicain aryaniste conservateur convaincu du début du XXe siècle va se transformer en socialiste, votant même pour Roosevelt avec son New Deal à l’orée de sa dernière décennie. Il révise sa position sur les gens de couleurs et devient plus tolérant au fur et à mesure qu’il s’ouvre et voyage, au point qu’il souhaite lui-même que certains écrits de jeunesse dans son journal amateur, The Conservative, puissent disparaitre. Joshi nous décrit dans le détails ses excursions et voyages à partir de carnets dédiés écrits de la main même de HPL, dont le plus célèbre qui fut édité rapporte un voyage au Québec qui changera drastiquement son jugement sur les non anglo-saxons qu’il détestait tant auparavant.
L’homme grandit. Le carcan étouffant de son éducation et du terreau de sa jeunesse se fissure mais trop tardivement : il a gâché son temps il le sait. La pauvreté s’insinue de plus en plus, au fur et à mesure que les années passent, et ce qui pourrait lui permettre de subvenir à ses besoins, à savoir son talent et sa culture littéraire, il refuse de les brader. Il n’a même pas soumis L’affaire Charles Dexter Ward aux maisons d’éditions alors que certaines s’intéressent, sans qu’aucun projets n’aboutissent, à ses écrits et réclament un roman. Il a réussit à comprendre qu’au travers du fantastique, de la SF ou de l’horreur, les genres littéraires qui l’attirent, il pouvait faire une critique sociale, et présenter sa vision de la position de l’homme dans l’ordre des choses, notamment à partir de ses lectures scientifiques qui à l’époque exploraient beaucoup de directions différentes (certaines sont d’ailleurs aujourd’hui démenties, notamment par Einstein). Son érudition scientifique qui transparait dans ses textes n’est pas feinte et trouve sa source dans ses passions de jeunesses et des rêves irréalisés. Sa vision artistique ne se marchande pas sur l’autel du mercantilisme et du capitalisme qui selon lui salit tout. Il est un esthète et en tant que tel préfère mourir avec ses idées plutôt que de se vendre. Il s’abreuve de la substantifique moëlle de chaque livre, chaque échange, chaque voyage, quitte à sacrifier son alimentation. La connaissance comme sustentation. Malheureusement, et j’aimerais pourtant que ce soit vrai, la connaissance ne permet pas au corps de survivre, et sans corps, pas d’esprit. Lovecraft, qui a finit par réussir à trouver des motifs de satisfaction et de plaisir dans la vie développe un cancer de l’intestin grêle diagnostiqué beaucoup trop tard et meurt, stoïque et silencieux tel un gentleman, le 15 mars 1937. Il est incroyable de constater qu’il a tenu jusqu’à bout à son statut d’intellectuel, au point de tenir un journal de son hospitalisation jusqu’à ce qu’il ne puisse plus écrire, déchiré par la douleur. C’est lorsque le New York Times publie son carnet de malade quelques jours plus tard, que ses amis New Yorkais apprennent la triste nouvelle.
Sa première publication posthume, mais certainement pas la dernière, nous en sommes témoins. Howard Phillips Lovecraft est enterré au cimetière de Providence – Rhode Island, en petit comité avec son unique tante restante, sa mère étant morte de folie en 1921. Il avait 47 ans.
La résonnance.
Alors que nous approchons de la fin de cettre revue, qui est allée bien au-delà de ce que j’aurais imaginé, j’aimerais répondre à cette question posée en début d’article : pourquoi ce livre de près de 1800 pages, si j’additionne le total des deux volumes, m’a-t-il autant marqué ? En quoi l’histoire d’un auteur méconnu de son vivant, raciste, mysogine par endroit, mais aussi sensible, intellectuel, intelligent, cultivé, et curieux a-t-elle pu me fasciné ?
Tout d’abord que les choses soient bien claires : je ne cultive aucune forme de racisme ou de mysoginie quelconque, mais ça je pense sans doute que ça transparait dans ce blog. L’oeuvre d’HPL, m’avait frappé bien avant que je me confronte à l’homme. Son cosmicisme résonnait en moi de manière particulière, car très tôt j’ai développé de mon côté semblabe philospophie alors même que je ne l’avais pas lu, ni été influencé. Et c’est là une des pierres angulaires de mon expérience de lecture : la résonnance de la perception du monde. De bien des manières ce livre m’a permis de comprendre comment son expérience de vie à pu lui permette de produire une oeuvre unique, d’une qualité rare. Comment sa sensibilité, son raffinement ont été une malédiction et une bénédiction. J’y ai vu bien des choses. Je me suis senti beaucoup moins seul d’un seul coup. Ce que certains appelle pessimisme, moi je l’appelle réalisme. Grâce au travail sensationnel de S. T. Joshi, tellement bien agencé et fluide dans sa narration, j’ai pu pendant un mois partager le quotidien de quelqu’un qui hormis des travers détestables propres à son époque, était d’une rare intelligence, d’une profonde sensibilité, dans une grande détresse parfois, mais qui plaçait l’intellectuel au dessus de tout. Il a toujours su garder son flegme tout britannique, lui qui prêtait allégeance à la couronne d’Angleterre. Cette personnalité m’a vraiment interpellé, résonnant profondément quant à ma philosophie, et ma vision du monde.
Pour encore plus mettre en balance ce que je viens de dire, ma relectrice N°1 me fait remarquer que je devrais peut-être, au vu du pavé qui s’annonce à lire pour vous, découper ma revue et la publier en deux parties, en faire un autre article pour plus tard. Non, je ne le veux pas. Ceci est ma trace, ma petit oeuvre à moi, modeste, dans l’infini de textes qui peuplent notre monde, et s’il il est trop long pour vous, trop indigeste, tant pis. Tout comme Lovecraft, le seul lecteur que j’ai en tête lorsque j’écris, c’est moi. Et pour ça je ne transigerai pas avec ma prose.
Pour clore cet article, je dois vous confier que suite à cette lecture beaucoup de chose me sont passé par la tête. Comme je l’ai dit en ouverture, ce soir là lorsque j’ai terminé cette biographie, je ne pouvais le quitter, et mon esprit vagabonda un moment avant de prendre mon livre et de lire La Cité Sans Nom. Tout en lisant me vint une idée, une vision. Tout d’abord je repensai à cet expérience de journalisme amateur. Et si mon blog était mon journal amateur ? Et si cet espace que j’ai depuis bientôt 5 ans était cet endroit où je pouvais y transmettre ma vision du monde ? Ainsi renaisse les phénix. Puis dans la continuité un autre élément me percuta. Adolescent je rêvais de vivre aux USA, ou du moins de les visiter. À 45 ans je n’ai toujours pas concrétiser ce rêve. Faute d’opportunités, de moyens. Et si ? Et si ce premier voyage là-bas, avant de me conduire dans le Maine, que j’ai beaucoup parcouru en livre à cause d’un autre auteur, passait, pour sa première étape, par Providence, avant de remonter au travers de la Nouvelle Angleterre, via Kingsport, Dunwich, Arkham puis vers Bangor. Bien sûr, si j’arrive jusque là…
Conclusion
Pourquoi cela est-il magique ? Exploitée minutieusement, cette correspondance monumentale permet de retracer le fil quasi quotidien de la vie de Lovecraft tant elle fourmille de détails, de sa liste de course New Yorkaise avec les prix correspondants aux horaires des changements de car lors de longues excursions.
Joshi nous expose son quotidien et le met en parallèle avec son oeuvre. Tel le cycle de la vie, dont il estimait n’être qu’un des multiples grains insignifiant de passage, il a été inspiré par d’autres comme Chambers, Bierce, Dunsany, Poe, puis dans une perpétuation, offrit ses idées, son oeuvre à l’imitation, partageant son univers avec Robert E Howard, Clark Ashton Smith, Robert Bloch, August Derleth – que je ne porte pas particulièrement dans mon coeur, même avant la lecture de ce livre – chacun rajoutant sa personnalité et sa sensibilité par dessus, et il nous invite, nous, maintenant, à perpétuer la fiction d’horreur fantastique, à reprendre le flambeau et à faire nôtre ses yog sotthtories, comme il les appelait.
Je suis Providence est une biographie colossale sur un auteur devenu incontournable et qui je l’espère à présent est immortel, à la manière d’un shakespeare ou un Hugo. S. T. Joshi nous restitue sa vie et sa philosophie, tant dans leurs aspects négatifs que dans la manière dont il a transformé la littérature. Le Maître de Providence s’avère être un commentateur avisé et piquant des événements de ce début de XXe siècle. Sous la plume du biographe, le quotidien s’écrit, l’auteur fantastique devient humain avec tout ce que cela implique. Nous sortons de cette expérience avec de nouvelles clés de lecture quant à son oeuvre. Les mythes mensongers nés à la fin des années 50, malheureusement véhiculés en grande partie par celui qui permit que son oeuvre fut publiée, sont battus en brèche, pulvérisés. Le reclus de Providence, n’était finalement pas si reclus que ça. Mais pour le découvrir, il vous faudra faire comme moi, et prendre le car. Il parait que le chauffeur vient d’Innsmouth. Vous verrez, il est sympa. Alors qu’attendez-vous ? Montez. Regardez, il n’y a pas de lune ce soir, on voit très bien les étoiles. D’ailleurs, là-bas dans le champs, un homme nous fait au revoir, debout près de son téléscope.
Note : 11/10
Bonsai!
Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs.
2023 est là. N’étant pas très protocolaire sur ce sujet parce que je n’ai jamais vu ce qui pouvait être grisant à ce que notre planète réalise une révolution autour du soleil, le changement d’année étant surtout à mon sens le début d’une nouvelle année fiscale, je vous souhaite tout de même une bonne année, pleine de joie mais surtout, surtout ! de santé. Moi, je vis plus au rythme des années scolaires, donc je ne me sens pas trop concerné par ce point du calendrier. Et puis, j’ai toujours préféré les fêtes de lumière des solstices, comme Noël ou la Saint Jean, le coeur de l’hiver, le début de l’été. Oui, ça fait très païen, je le reconnais ! Allez, tenez! On est dimanche matin et j’aime bien offrir des tournées de café, je vous ressers ?
Et sinon avez-vous vu que OCS a perdu le catalogue HBO ? Une tristesse pour moi qui suis abonné depuis des années, essentiellement pour les séries liéés à Westeros. Bon, la saison 2 de House Of The Dragon n’étant pas pour tout de suite, je suis assez tranquille pour qu’une solution de diffusion soit trouvée, mais ça pose l’épineuse question de la multiplication des plateformes et de leurs abonnements, tous à quasi 10€. En ces temps difficiles d’inflation et de crise énergétique, j’ai du mal à croire que ce soit l’avenir. Ces plateformes finiront par couler d’elles même, faute d’abonnés. HBO max, Paramount +, Apple TV, Netflix, Disney +, Canal +, Prime Video, les gens ne sont pas des vaches à lait et ne peuvent pas indéfiniment passer à la caisse, bien souvent parce qu’uniquement une partie du contenu les intéresse. Quand j’ai passé mon diplôme de commerce il y a presque 20 ans (oui c’était une autre vie à l’époque, j’en ai vécu plusieurs), nos formateurs disaient que l’abonnement était l’avenir, et que tout fonctionnerait comme ça. Ils étaient visionnaires c’est sûr. Il y en avait déjà à l’époque avec la téléphonie, bien que les formules étaient quelque peu différentes, mais bon. Quoiqu’il en soit, je ne suis pas un grand dévoreur de séries. Je suis très sélectif sur mes programmes, donc je ne me prends pas trop la tête avec ça. Je laisse venir, mais le marché va devoir évoluer s’il veut survivre je pense.
Sinon côté lecture, je suis en train de découvrir Conan le Cimmérien dans l’édition poche. Un travail de retraduction méticuleux par Patrice Louinet qui respecte l’ordre de publication originale de Weird Tales. Après avoir côtoyer pendant des mois Lovecraft alias Lucius le romain civilisé, me voilà avec un de ses correspondants et amis, Robert E. Howard, et, croyez-moi, il y en a des choses à dire sur la vision totalement opposée – et pourtant assez similaire sur la finalité des choses – des deux hommes. L’un prône la civilisation, garante de l’évolution et du bien-être de l’homme – Lovecraft – là où l’autre n’y voit qu’un accident dû à la sédentarisation et affirme que l’état naturel de l’homme est la barbarie et qu’elle triomphe toujours de la civilsation – Howard. Cette lecture est ultra intéressante à qui veut bien gratter le vernis comme nous y invite Patrice Louinet dans sa préface.
L’avantage des aventures de Conan, c’est qu’on peut les prendre pour ce qu’elles sont, des aventures, et les lire comme telles sans se creuser la tête! C’est vivant, coloré, fait de récits courts, et évidemment il y aura une revue sur ce premier tome d’une série qui en compte 3. Pour ceux qui aimerait en savoir plus sur Howard, je vous renvoie là encore vers la magnifique série diffusée sur Arte, Aux Sources de la Fantasy avec John Howe comme guide.
Pour l’heure, je prépare mon bilan et mes prévisions qui seront publiés dans la semaine à venir, puis ensuite il y aura une série de revues sur Lovecraft dont j’ai déjà commencé à parler la semaine passée avec le somptueux travail de François Baranger sur Les Montagnes Hallucinées. Je vous renvoie d’ailleurs à mes derniers articles en bas de page. Bon, je vais aller lire tiens. J’ai Conan qui doit grimper en haut d’une tour immense !
Le dimanche est là, sous le soleil, un weekend un peu court dans mon cas après les longs ponts du mois de mai, mais puisqu’il faut finir l’année scolaire, autant la finir en beauté et travailler d’arrache pied, y compris les samedis. Pour autant, l’idée de vous retrouver et de vous partager mes ragots avec…
Bon dimanche de Pentecôte ! La taverne ne connait pas les fériés, ou du moins travaille aussi les jours fériés, tel un stakhanoviste du bonheur qui chercherait à apporter joie, café et chaleur aux siens, peu importe le calendrier et les circonstances. Et le tavernier est d’excellente humeur. Laissez-moi vous offrir un café maison… chauffé…
Bon dimanche et bienvenue à tous les habitués de la taverne, et si c’est votre première fois, ne soyez pas timide, venez partager un café et parler de culture geek avec nous. Bien que le weekend ait été long, je n’ai pas eu l’occasion de préparer cet article en profondeur. La faute à mes passions…
Aujourd’hui je ne vais pas vraiment vous parler de Lovecraft qui, comme vous le savez peut-être, est un des mes auteurs préférés, mais plutôt de celui qui a su donner vie à cet univers cosmique incroyable, François Baranger. Artiste né en 1970, aux multiples talents, romancier, illustrateur et concept designer pour le cinéma (Harry Potter, Le Choc des Titans) ainsi que pour des jeux video, il nous dit avoir découvert Lovecraft adolescent et très vite avoir eu envie d’illustrer les textes, notamment son préféré : Les Montagnes Hallucinées. Il se trouve que c’est le mien également, alors comment dire que lorsque ces magnifiques livres sont sortis, je n’ai pas caché mon envie de les avoir, ce qui conduisit une de mes filles, de 12 ans à ce moment là, à prendre sur son argent de poche pour me l’offrir à Noël. Probablement que cette couverture incroyable a stimulé son imagination, a éveillé quelque chose en elle au point de vouloir me l’offrir, et qu’elle me rejoindra un jour par delà ces montagnes plus hautes que l’Everest, où la folie guette. En attendant je la remercie tendrement et lui dédicace cette revue. Bisous, et encore merci ma puce.
Quatrième de couverture :
« Corona Mundi… Toit du Monde… »
Toutes sortes de formules fantastiques nous vinrent aux lèvres tandis que nous contemplions, depuis notre point d’observation vertigineux, l’incroyable spectacle.
Arkham, 1933. Le professeur Dyer, éminent géologue, apprend qu’une expédition scientifique partira bientôt pour l’Antarctique avec pour ambition de suivre les traces de celle qu’il avait lui-même dirigée en 1931. Dans l’espoir de dissuader cette tentative, Dyer décide de faire un récit complet des tragiques événements auxquels il survécut, cette fois sans omettre les passages qu’il avait écartés à son retour, de peur d’être pris pour un fou. Deux ans plus tôt, les navires affrétés par l’université Miskatonic avaient accosté le continent glacé au début de l’été austral, et le contingent de quatre professeurs et seize étudiants s’était mis aussitôt au travail. Les premiers résultats ne s’étaient pas fait attendre et le biologiste de l’expédition, le professeur Lake, était parti de son côté avec plusieurs membres de l’équipe afin de suivre une piste fossilifère prometteuse. Au bout de quelques jours à peine, il avait annoncé par radio avoir découvert de stupéfiants spécimens d’une espèce inconnue, extraordinairement ancienne, avant de cesser toute communication après une terrible tempête. Pressentant le pire, Dyer s’était porté à leur secours le jour suivant. Ce qu’il avait découvert sur place dépassait ses craintes les plus folles…
Paysages déserts glacés, créatures innommables vieilles de plusieurs millions d’années découvertes dans un état de conservation anormal, étranges structures géométriques au sommet de montagnes noires, plus hautes que l’Everest… Cette nouvelle de Lovecraft a inspiré des générations d’auteurs et de réalisateurs, de John Carpenter, lorsqu’il réalise The Thing, à Guillermo del Toro qui rêve de la porter à l’écran.
Fasciné depuis toujours par l’univers de H.P. Lovecraft, François Baranger, illustrateur reconnu dans le monde pour ses talents de concept artist pour le cinéma et le jeu vidéo, s’est attelé à la tâche « cyclopéenne » de mettre en images ses principaux récits.
Mon avis :
Pièces maîtresses parmi ma collection, ces deux tomes, parus à un an d’intervalle, sont d’une qualité rare. Une préface de Maxime Chattam, auteur à succès de thrillers mais que je connais plus pour sa casquette de rôliste, ouvre le tome et comment ne pas être d’accord avec lui lorsqu’il parle du travail de François Baranger. L’essence même de l’histoire semble avoir été cristallisée dans de somptueuses photographies alors que nous avons affaire à des illustrations. Il a su donner vie de la plus belle des manières à un récit des plus fantastiques. Dans une interview récente au podcast C’est plus que de la SF (lecteur en bas de l’article), François Baranger expliquait que ce qui le fascinait dans les textes lovecraftiens, ce n’était pas l’horreur, mais le mystère. Avec un don remarquable pour les jeux de lumière, camouflant certaines zones ou en mettant d’autres en avant, par teintes ou par détails météorologiques, il instaure une ambiance, qui petit à petit s’empare de nous, comme la folie se saisit des protagonistes. Les ombres, le choix de l’angle de vision, contribuent à susciter l’angoisse chez le lecteur, encore plus particulièrement dans le tome 2 je trouve, où les souterrains et galeries très loin de la lumière du jour permettent à l’imagination de s’enflammer.
Mais c’est peut-être encore dans ce qu’il y avait de plus compliqué à montrer en pleine lumière qu’il excelle. François Baranger a su donner vie à une cité dont les descriptions de Lovecraft rendaient difficile la perception. Avec ses angles et ses formes géométriques atypiques, le défi était de taille. Grâce à lui, nous pouvons voir, sous nos yeux ébahis, la cité des Anciens prise dans les glaces éternelles de l’Antarctique, dérouler ses paysages sur des kilomètres ! Les détails sont d’une minutie incroyable, et comme les héros du texte nous avons le souffle coupé, les nappes de nuages contribuant toujours à nous laisser baigner dans un mystère angoissant.
Ce travail, fait par numérique pour des raisons évidentes de gain de temps et de praticité, permettant de tester plusieurs couleurs et trames, magnifie le texte de Lovecraft. Les tons bleutés et gris rendent le froid omniprésent et j’ai dû plus d’une fois aller chercher un plaid lors de mes lectures tardives au cœur de la nuit. La grande taille des albums (27 x 35,7 cm) est parfaitement adapté à ce style de livre visuel, et Baranger indique qu’il voulait ce format, il avait une idée très précise depuis longtemps de ce qu’il voulait faire. Un projet mûri sur plusieurs années et concrétisé une première fois avec L’Appel de Cthulhu, première album illustré de la série, ce qui était un choix logique au vu de la popularité du titre et lui permettait de vérifier la viabilité commerciale du projet afin de réaliser son véritable rêve de gosse : donner vie à son texte favori dont les images le hantaient depuis sa première lecture.
Chaque tome possède 64 pages. Les illustrations sont en double page et le texte en surimpression. Il est parfois dur à déchiffrer, mais je dis ça vraiment pour pinailler. Certaines phrases sont mises en exergue par une police plus grosse de manière à faire ressortir l’élément phare qui a inspiré à l’artiste son choix d’illustration. Pour autant, je ne m’attarderai pas sur le texte, j’ai déjà donné mon ressenti sur ce roman de Lovecraft que l’on retrouve dans le tome 2 du mythe édité chez Bragelonne, et dont il s’agit ici exactement de la même traduction. C’est peut-être là, où le bat blesse. Depuis que j’ai lu la nouvelle édition intégrale traduite par David Camus chez Ménmos, que j’ai lu et écouté chez Audible la version anglaise, je suis profondément attristé de me dire que sur ces magnifiques illustrations ne se trouve pas surimprimée la meilleure des traductions réalisées. Heureusement pour les puristes, il existe aussi un version anglaise.
Conclusion
François Baranger nous offre une oeuvre titanesque, cyclopénne, qui je n’en doute pas, avec le temps et la rareté, deviendra collector. Après L’Appel de Cthulhu et Les Montagnes Hallucinées en deux tomes, il ne compte pas s’arrêter là, ce qui prouve que le succès est au rendez-vous aussi bien en France qu’à l’international. L’Abomination de Dunwitch est sorti fin 2022 et il travaille déjà sur Le Cauchemar d’Insmouth. Pour ma part, même si je pense rêver debout et que j’ai peu de chance que l’auteur puisse lire ces lignes, je rêverais de voir L’affaire Charles Dexter Ward, en double album également. C’est mon second texte préféré du Maitre de Providence, et je serais prêt à donner mon âme à Yog Sothoth pour ça. Bon peut-être pas… mais en tout cas mes euros à François Baranger. Allez, réjouissons-nous d’avoir un artiste d’un tel talent en France et souhaitons lui un vif succès afin d’avoir le plus de ces albums illustrés. Bravo l’artiste.
Note : 10/10
Bonsai!
Voici l’interview réaliser par le podcast C’est plus que de la SF :
Editeur : Bragelonne – Traduction : Arnaud Demaegd – Date de parution : 16/10/2019 et 21/10/2020 – 64 pages
Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leur auteuret ont été proposé gratuitement par François baranger sur ses réseaux sociaux. La photo Entête d’article est la propriété de la Taverne et ne saurais être utilisé sous peine de Shoggoth au fond du lit.
Les vacances de Noël touchent à leur fin. De drôles de vacances, passées au mileu des malades qui toussent et reniflent. Des malades fiévreux. Des malades qui dorment. Bref des malades. Pour ma part, même si ces vacances ont été des vacances de malade en quelque sorte, puisque j’ai joué au garde-malade, j’ai eu un autre type de maladie : le syndrome Peter Pan version Light. Pour ceux qui ne connaissent pas, c’est le fait de rester bloquer dans l’enfance, avec tous les comportements associés. Point de colère ou de frustration pour moi, sinon j’aurais passé mes vacances à hurler vu celles-ci, mais plutôt un état contemplatif et nostalgique d’une période bénie qui est omniprésente depuis quelques temps dans le paysage culturel : les années 80-90.
Qu’est-ce qui vous rend nostalgique ?
Question WordPress dans ma page d’accueil.
En ouvrant mon WordPress ce matin pour rédiger cette article, voilà la question que j’y ai trouvé. Comme une résonance. Et mon Noël a été d’une manière très nostalgique. Nintendo a toujours évoqué pour moi, la période bénie de mon enfance avec notre NES acheté à deux avec mon frère en économisant durement l’argent récolté aux anniversaires et à Noël, Zelda étant mon meilleur souvenir de jeu avec Lifeforce. Joueur PS et PC depuis plus de 20 ans, la Switch a fini par débarquer à la maison. Papa Noël m’a amené en complément deux jeux : Zelda : Breath of the Wild que j’ai trouvé magnifique et tellement apaisant, et Dragon Ball Z Kakarot, qui reste, là encore, un de mes mangas d’enfance préféré. Avec l’achat de la Switch Oled, la Fnac offrait Zelda Skyward HD et je n’ai pu résister à l’achat du légendaire Link’s Awakening remasterisé, jeu initialement sorti sur Gameboy en 1993. Me voilà donc paré pour de longues heures de retour en enfance !
Une photo de mes cadeaux :
Il y a eu des livres aussi, évidemment. Mes filles savent que je suis un grand fan d’Alan Rickman qui nous a malheureusement quitté trop tôt, et m’ont offert le magnifique Madly Deeply, paru récemment. J’ai hâte de me plonger dedans. J’ai eu également L’Affaire Charles Dexter Ward, mon deuxième texte préféré de Lovecraft, ce qui me permet de continuer tout doucement la somptueuse collection intégrale de Mnémos. Grand fan de cartes, le magnifique Atlas de la Terre du Milieu est enfin dans ma collection. Je regrette néanmoins qu’il faille de nos jours des sorties de séries pour voir ce genre de réédition (l’édition originale date de 1981). Le monde de l’édition ne fonctionne plus que comme ça. Une série arrive : « Vite rééditons ce livre dont elle est issue, ou connexe à l’univers ! » Ce côté mercantile culturel me lasse. Je comprends la nécessité de vivre, mais quand le gain devient supérieur à l’enrichissement culturel, il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark de l’Edition. J’imagine que nous, consommateurs, défaillons aussi quelque part. Toujours dans le côté Nostalgie, j’ai pu enfin me procurer le BluRay de Terminator 2, un de mes films cultes ! Je pense vous en parler prochainement dans un article dédié, parce que le cinéma c’est aussi de l’imaginaire, et que j’ai une vrai passion pour l’univers de Terminator, la première franchise SF à m’avoir vraiment fait peur.
J’avais aussi évoqué au début des vacances, que nous étions très Star Wars à Noël, mais l’essai Andor s’est révélé désastreux. Là encore, on rejoint le problème cité plus haut : la surenchère de produits sur une franchise qui marche. Je n’arrive pas à comprendre comment certains podcasts et autres youtubers ont réussi à me vendre ça. J’aurais dû rester sur ma première impression : cette série est inutile. Nous avons regardé les deux premiers épisodes : pas de rythme, le personnage principal est construit sur le schéma classique du flashback laissant planer un traumatisme de l’enfance, et surtout le début de l’intrigue ne repose que sur des jalousies de bas étage ! À la fin du deuxième, la question s’est posée : « On fait un troisième ? » L’avis a été unanime : NON ! J’ai entendu certains dire que c’était la meilleure série Star Wars avec son intrigue et sa photographie somptueuse… Mon dieu… Je suis désolé mais au bout de deux épisodes il n’y a rien de culte. Quand Le Seigneur des Anneaux est sorti, quand Star Wars est sorti (le premier qu’on a rebaptisé Un nouvel Espoir), quand Alien est sorti, quand Terminator 2 est sorti, quand Pulp Fiction est sorti, tous ces films, au bout d’une heure de visionnage, on savait que c’était culte. Après le premier épisode du Mandalorian, aussi. Ici, certainement pas.
Enfin au rang des bons visionnages des vacances, j’ai fini la première saison de Ash vs Evil Dead dispo sur Netflix. Réalisé et produit par Sam Raimi, c’est une suite à sa trilogie CULTE, elle, de Evil Dead, et le frisson est garanti ! J’ai A-DO-RÉ. Amateurs d’hémoglobine qui aimez les héros drôles et badass, foncez ! La série peut se regarder sans avoir vu les films, une astuce scénaristique résume le tout.
J’aurais encore plein de choses à vous dire, mais l’heure de la reprise a sonné ! On se retrouve très bientôt, en attendant, portez-vous bien !
Allons, les vôtres vont peut-être arriver prochainement. Et puis, être en vacances ne signifie pas toujours que des bonnes choses, bien souvent on court pour faire ce qu’on n’a pas le temps de faire le reste de l’année ! Et de toute façon la Taverne reste ouverte, par ce temps, je ne vais quand même pas empêcher les gens de venir passer un bon moment, avec une boisson chaude, des douceurs à déguster, et un bon livre. Allez, tenez ! Je vous sers un café pour la peine, offert par la maison, il a fait si froid cette semaine que je suis sûr que vous ne serez pas contre. Ils ont même supprimé les transports scolaires ici, pendant 2 jours… alors qu’il n’y a pas eu une once de glace sur les routes. Drôle d’époque.
Mais bref, laissons le vent souffler dehors et faire voltiger la neige, si on parlait plutôt des livres que je me suis acheté depuis la rentrée et que j’ai déjà lu pour certains ? Je crois même que des revues arrivent ! Parce que ces petites vacances vont être l’occasion de vider le stock de livres accumulés et d’en écrire les revues. Préparer mes Onos Award aussi. Cocooner en mode café, livre, musique, entre deux moments passés avec mes filles. Regarder des films en famille. Chez moi, on est très Star Wars pendant les vacances de Noël, et ça tombe bien je n’ai pas encore regardé la série Andor dont on dit le plus grand bien. On se refera peut-être Obiwan aussi, que j’ai bien aimé pour ma part dans l’ensemble, malgré quelques faiblesses de rythme et de structure. Obiwan… Mon personnage fictif préféré avec Ned Stark et Onos évidemment. Il y aura peut-être aussi une petite partie de JDR Star Wars avec les filles, ou de Elfes, le JDR issu des BD de Jean-Luc Istin aux Éditions du Soleil.
Mais je m’égare ! Excusez-moi, vous avez déjà fini votre café, tenez je vous ressers et je vous montre ma pile de livre.
La voilà. Ça faisait longtemps que je ne m’étais pas lâché comme ça. Oui, je sais certains en récupère encore plus que moi en un mois, mais chacun fait à la hauteur de ses moyens. Et pour moi, en trois mois, ce n’est pas mal !
Les Contrées du rêves Tome 1 – Mnémos
Intégrale Lovecraft trad. Davis Camus
Je suis Providence Tome 1 et 2 – Helios
S. T. Joshi
Fondation – Folio SF
Isaac Asimov
Fondation et Empire – Folio SF
Isaac Asimov
Le Roi en Jaune – Édition Callidor
Robert W. Chambers
Comment Ecrire de la fiction ch. 2 – Cargyll
Damon Knight
Necronomicon – The best Weird Tales
HP Lovercraft
Les Montagnes Hallucinées tome 2 – Mnémos
Intégrale Lovecraft traduction Davis Camus
Ecotopia – Folio SF
Ernest Callenbach
Conan intégrale 1 – Livre de Poche
Robert E howard trad. de Patrice Louinet
Elric, Intégrale 3 – Pocket
Michael Moorcock
Le Dieu Estropié, Le Livre des Martyrs T 10 – Leha
Steven Erikson
Il y en a que je vais lire très rapidement, dès que j’aurai fini Le Dieu Estropié, comme Ecotopia, ou Le Roi en Jaune. Et il y en a que j’ai déjà lus, je les ai mis en italique dans le tableau. Trouver Elric intégrale tome 3 de chez Pocket a été un calvaire, et il est arrivé légèrement abîmé alors que le port coûtait aussi cher que le bouquin. Fondation me fait depuis très longtemps de l’œil et j’ai souhaité découvrir Conan suite à ma lecture de la bio de Lovecraft. D’ailleurs, un épisode approche sur Howard et Lovecraft dans le documentaire diffusé le dimanche matin sur Arte. Quoi ? Vous ne l’avez pas vu ? Attendez.. là, le voilà.
Aux sources de la Fantasy | H.P. Lovecraft Si vous êtes impatients, l'épisode dédié au maître de Providence est en ligne sur @ARTEfr avec @artofmmignola et S.T. Joshi comme invités 👍https://t.co/i55xKJnbUh
Je vous mets le lien vers le replay des 3 premiers épisodes. Au programme, un voyage à la découverte des Frères Grimm, de William Morris, HP Lovecraft et Robert E Howard. Format court, John Howe, illustrateur mythique de Tolkien, en guise de guide, ce docu est une pépite et je tiens à remercier Alexy Metzinger pour ce magnifique documentaire.
D’ailleurs, ça m’a donné une envie de lecture prochaine : Malice de John Gwynne. De l’avoir vu sur les étagères de Robin Hobb dont j’ai dévoré les livres, dans le documentaire d’Arte…
Il me fait très envie. Mon dernier achat compulsif remonte à…
…ben il y a 2 semaines : Ecotopia. 😀
Mais bon, c’est Noël et allez savoir si le Père Noël ne connait pas les Éditions Leha ? En attendant, je vais diminuer le tirage de la cheminée, pour pas qu’il se brûle le derrière !
Tandis que Papa Noël prépare sa hotte, fait la révision du traineau et la vidange des rennes, et qu’on se les gèle, je reprends mes revues. Il y a un certain laisser-aller depuis un an et demi, je vous l’accorde. Manque de régularité, de diversité. Et la chronique à venir prochainement ne va pas arranger le dernier point, vu que je vais encore traiter de fantasy et encore de gros pavés qui, empilés les uns sur les autres, permettent de bâtir les piliers sur lesquels tout bon cycle de fantasy ambitieux repose. Pour autant nous allons un peu voyager vers d’autres univers et d’autres auteurs les prochains temps, que ce soit en terme de lectures ou d’articles. J’en ai besoin. La preuve, voici un nouvelle rubrique dont l’intérêt est de vous donner des news de ce que je lis, j’écoute, regarde aussi, parfois, même si je ne suis pas particulièrement un binge watcher de série.
Le livre des Martyrs m’a beaucoup accaparé en 2022, la 8e revue vient de sortir, la lecture du tome 9 est terminée depuis 6 mois, et je viens d’entamer le tome 10. J’ai aussi lu l’excellentissime La Complainte de Danseur, écrit par l’ami de Steven Erikson et cocréateur de l’univers malazéen, Ian Cameron Esselmont. J’avais annoncé que cette année serait malazéenne ou pas, et elle l’a été de bien des façons, que ce soit en terme de lecture ou d’activité du blog en ce qui me concerne ! J’ai même eu la joie de rencontrer lesdits auteurs à la Librairie Critic de Rennes lors de leur tournée dédicaces au mois de juin en France. Mais une coupure s’avère nécessaire. Prémice de cette coupure d’ailleurs, cet été j’ai relu du Tolkien dans sa nouvelle traduction, une envie née de la lecture de La chute de Gondolin en février. Je n’avais pas lu autant cet auteur depuis presque une petite dizaine d’année. Cette année j’ai aussi commencé à lire l’intégrale Lovecraft de chez Mnémos, une redécouverte de l’auteur assez rafraichissante ! Et là, je viens de finir de lire la magnifique biographie de Lovecraft, Je Suis Providence, par S. T. Joshi dont je parlerai très prochainement, tant elle m’a marqué.
D’ailleurs, vous ai-je déjà parlé de mes auteurs phares ? Ou de mes groupes fétiches ? De mes films ou séries préférés? Et bien ce sera pour un prochain ragot, appuyé au comptoir de la taverne, avec un bon café chaud, alors que le grésil neigeux crépitera sur les carreaux bordés de givre et que l’odeur du feu de bois flottera sous les poutres racornies et noircies par le temps. En attendant, gardez le chaud et lisez !
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