Revue Littéraire : Les Annales du Disque-Monde – Le Huitième Sortilège (Tome 2) de Terry Pratchett

ENFIN! Je l’ai ENFIN fini!  …Alors que je l’ai commencé au mois de mai.

Que ce fut difficile à lire, malgré son petit nombre de pages (255). Pourtant le résumé, la couverture, une magnifique illustration de  Marc Simonetti qu’on ne présente plus (Game of Thrones,L’Assassin Royal etc.),  le tout couplé à mes premiers pas en avril dans le monde déjanté de Pratchett qui s’était soldé par un vrai bon moment de lecture, m’avaient fortement incité à lire le deuxième livre de la série. (Pour aller plus loin, je vous renvoie vers la chronique du premier tome : La Huitième Couleur de Terry Pratchett (Tome 1 des annales du Disque-Monde ). J’avais été surpris de voir de-ci de-là, que les premiers tomes n’étaient pas les meilleurs après cette Huitième Couleur plutôt sympathique. Il faut croire que finalement la réalité m’a rattrapé! Allez c’est parti, on va disséquer tout ça.

Résumé (Quatrième de couverture):

Octogénaire, borgne, chauve et édenté, Cohen le Barbare, le plus grand héros de tous les temps réussira-t-il à tirer Deuxfleurs et Rincevent des griffes de leurs poursuivants?

Question capitale, car le tissu même du temps et de l’espace est sur le point de passer dans l’essoreuse. Une étoile rouge menace de percuter le Disque-Monde et la survie de celui-ci est entre les mains du sorcier calamiteux: dans son esprit (très) brumeux se tapit en effet le… huitième sortilège!

La suite de l’épopée la plus démente de la Fantasy, avec, dans les seconds rôles, une distribution prestigieuse: le Bagage, l’In-Octavo, Herrena la harpie, Kwartz le troll, Trymon l’enchanteur maléfique et, naturellement, La Mort…

Mon avis:

Bizarre, il manque un truc….

Ce livre débute de la manière la plus classique qui soit : par un lever de soleil décrit façon Pratchett. Technique, et en même temps, absurde, burlesque. À l’instar du premier tome, l’auteur reprend ce qui a fait sa réussite mais sans pour autant m’interpeller comme lors de notre première rencontre. Puis, au bout de quelques pages, je me rends compte qu’il y a un truc qui manque. Je retourne en arrière, je feuillette, et l’évidence me saute au yeux : il n’y a pas de chapitre! Après avoir navigué dans le livre en long et en large, cela se confirme et pour le coup je suis surpris, voire contrarié. Je ne crois pas avoir lu beaucoup d’œuvres avec ce type de découpage, où juste un saut de ligne permet de changer de décor ou de situation. Cela ne facilite pas l’immersion je trouve, ni l’envie de tourner les pages. Des auteurs comme Stephen King, Robin Hobb, G.R.R Martin ou encore Maxime Chattam savent le faire avec une petite phrase accrocheuse en fin de chapitre, qui vous précipite en avant dans l’histoire.

Grâce à un formidable Deus ex machina, totalement plausible dans le monde de Pratchett, nous retrouvons donc Deuxfleurs, Rincevent, et le Bagage pour de nouvelles aventures. Un fil conducteur sur la fin du monde est censé nous tenir en haleine tout le long du récit, mais, dans mon cas, cela  s’est essoufflé vers la soixante-quinzième page lors de ma première lecture. Les sauts de situations géographico-temporelles un peu à l’arrache,  les changements de personnages, et le manque d’indice sur la situation initiale qui porte à croire que la fin du Disque-Monde est proche, ont eu raison de ma patience et de mon intérêt pour le livre.

J’ai pour habitude de toujours finir mes livres, il m’arrive parfois de les poser, de les mettre de coté et d’y revenir plus tard, mais rarement de ne plus les ouvrir. Ce fut le cas pour ce Huitième Sortilège : je l’ai posé, j’ai finis la saga Autre-Monde, j’ai lu encore un ou deux autres romans, puis je l’ai repris. Ce fut difficile tant la linéarité de la narration n’est pas dans les habitudes de l’auteur. Il digresse souvent, nous emmenant dans des considérations très éloignées de son sujet. Ce ressort narratif, très agréable au début, s’essouffle au fil de la lecture, car il le répète tellement souvent qu’on finit par deviner son propos, et il n’amuse plus du tout. Quoiqu’il en soit, en une après-midi, j’ai enfin terminé ce volume.

Nouveaux héros, plutôt attachants.

L’un des points sympas du livre, c’est que l’auteur nous présente de nouveaux personnages. Au rang de ceux-ci, Cohen le barbare et Bethan la vierge sacrificielle m’ont bien plu. Cohen est caricatural, certes, mais très attachant. Imaginer un barbare qui n’est plus dans la fleur de l’âge, je ne l’ai jamais vu autour d’une table de jeu de rôle! Et ça marche vraiment. Herrena la Harpie, avec sa description un peu foirée à mon sens, car on ne sait pas si c’est Sydney Fox l’aventurière, ou Germaine la bûcheronne du village, m’a laissé de marbre, et contribue peu à l’histoire. La preuve, je ne me rappelle même pas, à l’heure où j’écris ces lignes, ce qu’elle est devenue. Car si la force du premier livre était bien entendu sa succession d’aventures rocambolesques sans but précis si ce n’est de faire souffrir Rincevent, ou de mettre ses personnages en situations, ici la narration a un but, du moins c’est ce que laisse entendre le début du livre et je trouve que le style burlesque de Pratchett se prête mal finalement à ce genre de récit. Pendant 250 pages, on se demande quel va être le dénouement, sans avoir le moindre indice des raisons de l’importance du sort coincé dans la tête du mage et de son rapport  avec cette grosse étoile rouge qui m’a furieusement fait penser à L’Etoile Mystérieuse de Tintin. En fait l’auteur meuble son histoire avec le même type d’aventures que dans le premier volume, sans pour autant que ça marche, comme un Gendarme à Saint Tropez, où les acteurs seraient fatigués et en panne de gags vraiment marrants. Attention, il y a eu des moments où j’ai souri, mais ri? Je ne crois pas, du moins pas comme dans le premier.

De bons moments quand même..

Il y a pour moi deux moments réussis dans le livre : la rencontre avec La MORT, et le final. La MORT, ce personnage déjà présent dans le premier tome est vraiment bien fait, et cette rencontre vers le milieu de l’histoire est un peu différente des précédentes. Ce fut la première fois du livre où j’ai retrouvé avec joie le style de l’auteur, avec ses descriptions aux images très noires, aux expressions décalées et ses jeux de mots. Terry Pratchett s’amuse de tout et surtout de la mort.

L’autre bon passage du livre est le final. D’abord parce qu’il nous libère, enfin, de ce livre poussif. Ensuite, parce que tout y est pour une fin réussie, même si on est un auteur burlesque. Il garde certains codes de narration plus classique qu’il saupoudre d’humour et de satire, notamment sur la religion et la démocratie, d’une manière fort adroite, pour livrer une vraie conclusion à ces deux premiers tomes, puisque le premier n’en avait pas vraiment une. Quant à la nature du dénouement, j’aurais dû me douter qu’il allait présenter quelque chose, disons, de décalé, par rapport à l’idée que l’on s’en fait tout au long de la lecture. Quand on a enfin une vue d’ensemble sur le livre, on se dit que l’histoire n’est pas si mal, mais que l’auteur a pris beaucoup trop de détour pour y arriver, à mon sens. Si je ne devais retenir qu’une seule phrase du livre, et elle me servira de conclusion, ce serait celle-ci :

Dans chaque personne saine d’esprit il y a un fou qui cherche à sortir.

Le boutiquier, Le Huitième Sortilège.

Terry Pratchett

Ma note sera donc de :

4/10

Oui c’est bas, je sais. Au plaisir de découvrir les tome 3 et 4, La Huitième Fille et Mortimer, qui démarrent deux  nouveaux cycles, les sorcières et la mort. Je ne doute pas, les spécialistes ayant annoncé que le cycle sur La MORT étant excellent, que je passerai un bon moment pour le coup avec le quatrième tome.

Comme il s’agissait à la base d’une lecture commune mais que j’ai lâchement abandonné en cours de route, je vous transmet le lien vers la revue d’une animatrice de Vendredi Lecture qui a elle aussi lu le livre et partagé son avis sur son blog  au moi de mai , comme c’était prévu : Des livres, des fils et un peu de farine: Le Huitième Sortilège

Plan de lecture des Annales du Disque-Monde

Bonsai!

ÉDITION PRÉSENTÉE: POCKET (2010) (FORMAT POCHE). TITRE ORIGINAL: THE LIGHT FANTASTIC. TRADUIT DE L’ANGLAIS PAR PATRICK COUTON (1996). ISBN: 978-2266211826

Revue Littéraire : Les Annales du Disque-Monde – La Huitième Couleur (Tome 1) de Terry Pratchett

J’ai décidé (ENFIN!) de me lancer dans la lecture du joyau de Terry Pratchett. En grand fan de fantasy, il aurait été dommage de passer à côté d’une œuvre majeure du XXème siècle. J’ai donc commencé par le début bien que vous pouvez lire les tomes indépendamment, l’idéal étant de respecter l’ordre de publication pour chaque cycle constituant les annales mais nous y reviendrons. Allez c’est parti!

Résumé (Quatrième de couverture):

Dans une dimension lointaine et passablemement farfelue, un monde en forme de disque est juché sur le dos de quatre éléphants, eux-mêmes posés sur le dos d’une tortue.
A Ankh-Morpork, l’une des villes de ce Disque-Monde, les habitants croyaient avoir tout vu. Et Deuxfleurs avait l’air tellement inoffensif, bonhomme chétif fidèlement escorté par un Bagage de bois magique circulant sur une myriade de petites jambes.
Tellement inoffensif que le Patricien avait chargé le calamiteux sorcier Rincevent de sa sécurité dans la cité quadrillée par la guilde des voleurs et celle des assassins; mission périlleuse qui va les conduire loin : dans une caverne de dragons et peut-être jusqu’aux rebords du disque.
Car Deuxfleurs appartient à l’espèce la plus redoutable qui soit : celle des touristes.

Mon avis:

Moi j’aime la fantasy!

Tout fan de fantasy devrait lire cette saga, ne serait-ce que pour redescendre un peu et ne plus se prendre au sérieux quant à la cosmogonie des livres du genre. Pratchett nous livre ici un texte riche, tant en terme de vocabulaire avec des mot de son invention, ce qui demande parfois un peu de connaissance étymologique, que de style. Il s’amuse à réutiliser les codes du genre pour ensuite mieux les tourner en dérision. Mon plaisir n’aurait sans doute aucun lieu d’exister sans la formidable traduction de Patrick Couton (bon il manque des mots parfois, des verbes essentiellement mais ce sont des coquilles courantes dans le monde de l’édition). Mais au delà des mots et du style que dire de l’histoire?

« …cela prouve que la Mort aussi a le sens de l’humour » page 32

Je ne vais pas vous réexpliquer comment se présente ce monde puisque le 4ème de couverture le fait très bien. Nous avons donc ici un monde de type fantasy avec sa cosmogonie, ses héros, ses habitants, ses dieux et La Mort (oui oui! c’est un personnage à part entière! Et un des meilleurs!). La particularité de ce dernier est donc qu’il est plat (petit clin d’œil à tous les amoureux de la théorie de la terre plate, bise aux plateux…dont je ne fais pas partie). Ce qui entraîne fatalement que si vous arrivez au bord, ben… vous tombez!

Nous suivons donc les aventures de Rincevent, un mage (enfin façon de parler, puisqu’il ne connait qu’un sort) et de Deuxfleurs, un touriste, le premier de son espèce sur le Disque, à travers des paysages tous plus fascinant qu’incroyables tant ils enfreignent les lois de la physique. Deuxfleurs rêve d’aventures, de voir des héros. Il en connait quelques-uns de nom d’ailleurs et il aura l’occasion de les rencontrer mais pas forcément sous les meilleurs hospices. Rincevent, ce personnage lâche, égoïste, vénal et porte poisse par excellence, va se retrouver dans tout un tas de situations plus rocambolesques les unes que les autres sous l’impulsion de son nouvel employeur avide d’explorations et d’expériences. Son coté perdant et pessimiste crée le comique et là où dans un livre de fantasy classique nos héros sauveraient le monde, on se retrouve à réfléchir quelle tuile va bien pouvoir leur tomber sur la tête!

L’Octarine, la Huitième couleur, la couleur de la magie…

On va donc tour à tour faire la rencontre d’assassins, de voleurs, d’une guilde du commerce nouvellement créé grâce à ce premier touriste de l’histoire, d’entité maléfique, d’un barbare aussi fort que son intellect est faible (ami rôliste vous savez de quoi je parle!), d’épée magique, de Dragons, de VRAI magicien, d’astronome et j’en passe! Tout ça sous le regard impassible de La MORT qui attend de pouvoir emmener Rincevent. Comme les mages peuvent voir la fameuse Huitième couleur, celle de la magie, l’Octarine(!) et que La MORT se reflète dans cette dernière (euh..oui, c’est un peu compliqué faudra lire le livre pour comprendre), cela nous donne des joutes verbales désopilantes entre notre pseudo-mage et la Faucheuse. Il y a un vrai gimmick avec le chiffre 8 tout au long de l’histoire et tous les jeux de mots possibles qui vont avec, l’auteur a dû bien se faire plaisir (ou pas!) à écrire ce livre.

Tous les codes du genre sont brisés, les héros sont caricaturaux à souhait et martyrisés. Dès les premières pages le ton est donné et si vous n’adhérez pas à ce style rocambolesque, burlesque et satyrique, alors malgré le nombre de pages relativement faible (265) vous allez avoir du mal à le finir.

Je ne peux pas vous parler des protagonistes sans citer le coffre magique sur pattes. Il est un personnage à part entière de l’histoire, et permet pas mal de situations loufoques. Plus le livre avance et plus on arrive à lire entre les lignes et comprendre certains événements décrit à posteriori, soupçonnant certains personnages d’en être responsable. Pratchett nous présente parfois juste les conséquences et là encore le style de l’auteur fait mouche, on se délecte des ces séquences explications-descriptions ou il s’amuse aussi bien avec les mots, les expressions, que le comique de situation. L’intrigue en fait est quasiment inexistante, et cela rejoint ce que Stephen King dit dans son livre Écriture, à savoir que si les personnages sont bien plantés, les différentes situations auxquelles ils sont confrontés, suffisent à porter le lecteur de page en page.

Pour ma part, en tant que Rôliste ( qui joue à des jeux de rôles sur papier) depuis un certain nombre d’années, j’ai traîné dans pas mal d’univers médiévaux-fantastique et pour le coup, je m’en suis payé une bonne tranche! J’ai ri ou souri tout du long. Rincevent devient très vite attachant dans son genre. Grand fan de Tolkien, référence incontournable sur le sujet, de Robin Hobb ou encore GRR Martin, David Gemmell, ce livre est pour vous… à condition d’avoir de l’humour et d’accepter que vos jouets soit un tant soit peu tournés en dérision.

Ce livre n’a pas été sans me rappeler un autre monde : celui de Naheulbeuk créé il y a environ 20 ans par Pen of Chaos, un auteur bien français lui pour le coup, sous forme de fichier audio mp3 et qui aujourd’hui se décline en BD, roman, Jeu de rôle et bientôt dans une série animé (du moins on espère).

Ce fut donc une bonne lecture et un grand moment de détente, à tel point que j’ai déjà commencé le deuxième tome du même cycle. À ce sujet, comme promis plus haut voici un plan récapitulatif de toutes les Annales avec ses différents cycles :

IMG_20180327_124149.jpg

Il n’est donc pas nécessaire de lire chaque tome à la suite, vous pouvez parfaitement commencer par d’autres cycles, même s’il est conseillé de les lire suivant l’ordre de publication à l’intérieur de chacun, facilitant ainsi la compréhension et procurant un plaisir maximal.

Ma note sera donc pour celui-ci de :

8/10

Et pourtant il parait que les premiers tomes ne sont pas les meilleurs, j’ai hâte de découvrir la suite!

Bonsai!

Edition: L’Atalante

ÉDITION PRÉSENTÉE: POCKET (2011) (Format POCHE). TITRE ORIGINAL: The Colour of Magic. TRADUIT DE L’ANGLAIS PAR PATRICK COUTON (1996). ISBN: 9782266211819.

Pour aller plus loin et voir la suite de l’aventure c’est ici : Le Huitième sortilège de Terry Pratchett (Tome 2 des annales du Disque-Monde)