Jeu de Rôle : Vampire La Mascarade V5 – Arkhane Asylum Publishing.

Hello There !

En matière de jeu de rôle, chacun a son parcours. Notre CV ludique est jalonné de souvenirs. Souvent on raconte nos anecdotes tard le soir – ou tôt le matin suivant le point de vue – aux jeunes novices, après la partie qu’on vient de jouer. On narre nos pépites, nos succès comme nos plus grandes bourdes, nos souvenirs mémorables. Si pour beaucoup de joueurs de ma génération on entend souvent revenir les noms de La Campagne Impériale (Warhammer 1ère édition) ou des Masques de Nyarlathotep (L’Appel de Cthulhu) – que je rêve toujours de jouer soit dit au passage – , en ce qui me concerne mes deux grands souvenirs sont d’une nature tout à fait différente : mon premier est un mandat de magistrature d’Émeraude dans La Légende des Cinq Anneaux et l’autre une chronique de Vampire. Deux campagnes, deux moments mémorables, aussi bien dû aux univers qu’aux joueurs qui y ont participé. Je pense qu’il y a une raison à cela. À l’époque où j’ai découvert Vampire La Mascarade, il y avait une grande place dans ma vie pour des jeux comme D&D ou Pathfinder – être un héros, vaincre le mal, les tactiques, sauver la ville, collecter du butin, le refaire la prochaine fois. C’était un prolongement naturel d’une autre de mes activités ludiques, le wargame historique, avec le côté fantasy en prime, une manière de conjuguer Le Seigneur des Anneaux à ma passion de l’Histoire et cette fois d’en être l’acteur, le créateur. Mais un jour, dans une de ces conversations entre chiens et loups, mes collègues du club ont commencé à me parler d’un autre jeu, plus viscéral, qui consistait en grande partie à explorer les personnages, à dénouer des intrigues politiques, quelque chose de plus immersif, de plus sournois, de plus narratif, dont tu ne cesses de retourner la trame et les mystères dans ta tête entre deux sessions : Vampire. Ils me parlaient de ça comme s’ils l’avaient vraiment vécu, ils réfléchissaient encore à certains éléments de la partie en se demandant lequel des PNJs ou des PJs les avaient doublés. Il me fallait essayer, c’était d’un contraste saisissant avec mes premiers jeux. Ce fut un coup de foudre direct. La profondeur de l’univers, les thématiques abordées et les possibles manières de les traiter, m’ont conquis et m’ont donné une bien plus grande liberté que les jeux de fantasy classiques qui s’articulent essentiellement sur les combats tactiques qui sont le moment tant attendu par les joueurs.

Attiré par l’essence vampirique même depuis toujours – mes lectures en attestent puisque j’avais déjà lu plusieurs romans d’Anne Rice à ce moment là – c’est avec délice que je me suis plongé dans le sang, que j’ai tenté de tirer mon épingle du jeu au milieu d’autres vampires tous aussi retors les uns que les autres – on parle de vécu, là. Vampire prend un cadre surnaturel, plutôt commun à chacun grâce à la pop culture, et l’utilise pour creuser les travers humains, le mal que nous nous faisons à nous-même ainsi qu’à ceux qui nous entourent, parfois par nécessité, parfois par maladresse, mais toujours avec des conséquences. Vampire, c’est le jeu de l’horreur personnelle et des intrigues politiques, Vampire, c’est Stephen King avec des D10 à la main qui t’invite à te pencher sur tes peurs, tes doutes, tes travers, et ça ne va pas vous plaire. Vampire, c’est le jeu de la paranoïa par excellence. La Parano avec un P s’il vous plait, parce que rien ne dit que votre voisin de table vous ait tout dit, ou qu’il soit même de confiance – du vécu je vous dis. Vampire, c’est l’histoire de la vie dans la mort, c’est parfois glauque, parfois gore, souvent sanglant, mais qu’il est bon de s’amuser le temps d’une nuit dans la cour des immortels décadents qui, pour passer le temps – que dis-je, l’éternité ! – jouent à « Petit coup bas entre amis ».

Bienvenue dans le Monde des Ténèbres.

AVERTISSEMENT

Je tiens à préciser que le monde des ténèbres est un monde violent et que les thématiques abordées et les images présentées dans le jeu sont destinées à un public averti, de préférence adulte. Continuez donc à vos risques et périls, ma responsabilité ne saurait être engagée en cas de non prise en compte de cet avertissement.

Pourquoi une V5 ?

Avant d’aller plus loin, nous allons faire un petit peu d’histoire et poser les concepts essentiels à la compréhension du jeu. Vampire : la Mascarade fut le premier jeu de White Wolf . Tout premier opus au sein de ce qui allait devenir Le Monde des Ténèbres, il modernise et transpose en jeu de rôle le célèbre mythe du vampire, dans une ambiance s’inspirant des Vampires d’Anne Rice (Entretien avec un Vampire, Lestat le Vampire, la Reine des Damnés). Ajoutez à cela les Loups-Garou, les Mages, les Fantômes, et les Changelins, et vous aurez un panorama large des grandes gammes qui vont au fur et à mesure enrichir l’univers qui n’est autre qu’une version alternative, fantastique, de notre monde. Il se caractérise, outre l’existence de créatures surnaturelles, par une ambiance « gothic-punk ». Revenons à Vampire. Depuis 1991, le jeu a connu trois éditions, des spin-off dont le plus célèbre est Vampire l’Âge des Ténèbres donnant l’opportunité de jouer dans un contexte médiéval, avant d’être reboot avec Vampire ‑ le Requiem en 2004. Il existe même un Grandeur Nature (GN) ! En 2011, White Wolf décide de sortir une édition anniversaire pour célébrer les 20 ans du jeu. Cette V4 plus connue sous le nom de V20 pour le contexte de sa sortie, a apporté une version révisée, massive et définitive des éditions précédentes avec pas moins de 530 pages. Succès immédiat après la demi-teinte de Requiem très différent de son aîné : la gamme est relancée. Quelques années après, en 2018, la V5 – la version actuelle et présentée ici – fait son apparition. Pourquoi une nouvelle édition et quels sont les changements ?

Un des constats frappants des éditions précédentes était que les parties ressemblaient plus à un Marvel’s World, peuplé de créatures s’apparentant davantage à des super héros grâce à leurs pouvoirs surnaturels, plutôt qu’à des Vampires. Les ajouts de pouvoirs, de lignées plus exotiques les unes que les autres avaient totalement fait oublier quel était le véritable enjeu pour un vampire, le problème central de son existence, à savoir la soif de sang. L’idée fondatrice de la V5 a donc été d’épurer le système pour que la condition vampirique soit de nouveau au cœur de la narration. Un recentrage bienvenu, sauf pour Grobill et Jean-Kévin qui étaient juste venus pour bastonner comme à D&D mais avec des crocs. Ici, le jeu se veut plus narratif, plus philosophique, plus profond, le tout mâtiné d’intrigues, de complots, de convoitises et de vengeances dignes des films de Scorcese ou Tarantino. Finis les combats à coup de pouvoir, bienvenue dans la réalité de la nuit : tu risques de perdre le peu d’humanité qu’il te reste – et le contrôle de ton personnage au profit de la bête – à force de vouloir faire le malin, car la soif n’est jamais bien loin et qui sait si tu vas pouvoir réfréner ton envie de croquer le cou de ce jeune homme. Afin de réussir ce pari, les développeurs ont donc mis la soif du vampire au cœur du système et fait évoluer le lore pour supprimer certaines possibilités trop manichéennes.

Allez c’est parti, je vous emmène à la découverte du Livre de Base, j’espère que vous avez la nuit devant vous et un bon calice pour vous restaurer.

Les premières pages

Courriers, enregistrements, photos, une intro à la façon du Journal de Beckett, ces pages ne sont pas répertoriés dans la table des matières. L’idée est d’introduire le monde de Vampire en le présentant au travers de divers documents expliquant les grands bouleversements depuis la précédente édition. Tout d’abord, conséquence directe de l’attentat du 11 septembre, certaines organisations gouvernementales ont pris conscience de l’existence des Vampires et une Seconde Inquistion est en marche. La destruction de la Fondation Tremere à Vienne en 2008 ainsi que le démantèlement du Nosferatu Schreknet ont destabilisé La Tour d’Ivoire – La Camarilla – qui tremble sur ses bases face à cette nouvelle menace. Le départ de certains Anciens répondant à l’Appel venu d’Orient, abandonnant ainsi leurs postes de pouvoir, a donné un regain de vitalité à la lutte constante qui fait rage entre les Anarchs – l’autre grande secte vampirique – et la Camarilla pour le contrôle des grandes agglomérations. La quasi dissolution du Sabbat entraîné dans sa guerre de la Géhenne, libère des espaces et offre de nouvelles opportunités pour de jeunes novices aux dents longues qui voudraient profiter de cette période trouble. Pour avoir de plus amples informations il faudra vous procurer l’ouvrage déjà présenté ici : Le Journal de Beckett.

Pour le néophyte de l’univers, tout ceci est probablement peu explicite à la lecture, mais la mise en forme nous rend déjà acteur en quelque sorte et attise notre curiosité, tel un jeune vampire qui découvre son nouveau monde, comprenant qu’il ne sera pas si facile d’y survivre mais que des opportunités existent s’il se débrouille bien.

Pour ma part j’ai vraiment été emballé par cette introduction d’un style assez novateur.

Concepts

Cette partie introductive nous présente le Monde des Ténèbres, ce qu’est un jeu de rôle ainsi qu’un exemple de partie, des éléments devenus assez courants de nos jours dans les manuels de base.

Société Vampirique

Certaines illustrations sont plutôt chouettes, comme celle-ci et la maquette est agréable de manière générale.

La suite nous donne des éléments sur le fonctionnement de la société vampirique, sa structure, ses sectes, ses conflits. On en profite pour nous synthétiser quelques éléments présentés dans les premières pages afin d’avoir un tableau global de la situation. On nous cite les 6 grandes traditions de La Camarilla – la secte vampirique la plus puissante – et on nous précise ce qu’est le jyhad en détail : une guerre de générations entre anciens et jeunes Vampires. On y trouve également un Lexique des Damnés que j’aurais plutôt vu en fin de livre personnellement.

Les Clans

Page de présentation de la section sur les Clans.

Viennent ensuite les Clans. En nombre resserrés, le livre de base nous en présente 7 : Brujah, Gangrel, Malkavien, Nosferatu, Toréador, Tremere et Ventrue; plus deux autres : les Caitiffs ou Sans Clan, et la grande nouveauté les Sangs Clairs.

Trois pages pour chacun afin d’expliquer qui ils sont, présenter quelques archétypes, leurs Disciplines respectives (ou les pouvoirs possibles si vous préférez) ainsi que leur Fléau, là aussi une nouveauté plutôt bien pensée. Les illustrations présentant les styles vestimentaires de chaque clan sont par contre d’un goût quelque peu douteux, tant je les trouve peu inspirantes ni différenciées, mais tout ceci est affaire de style 😉 .

Plus que 7 clans donc sur les 13 de la V20. Une manière de rappeler lesquels sont les plus courants et d’inciter les joueurs à être plus conventionnels dans leur choix de départ. Toutefois les possibilités sont déjà conséquentes et l’iintégration des Sangs Clairs est vraiment un choix très intéressant à la lecture, que ce soit pour pimenter l’histoire d’une coterie traditionnelle ou pour carrément en créer une composée uniquement de ces parias de la nuit et du jour.

Les Règles de Base

En une quinzaine de pages, nous faisons le tour des grands mécanismes de jeu ainsi que la manière d’utiliser les dés spéciaux tant à la mode chez tous les éditeurs. Le Storyteller System ou système du Conteur en VF est toujours au cœur du jeu mais avec quelques ajouts pertinents, soit dans les mécaniques afin de bien faire ressentir la nature vampirique des personnages, ou dans le matériel tel les dés de soif de couleur rouge.

Chaque personnage est caractérisé par des traits qui correspondent à ses aptitudes. Il existe 9 attributs regroupés en 3 catégories : physique, sociale et mentale. Chaque attribut se voit associer à un ensemble de compétences dérivées. Attributs ou compétences sont notés sur une échelle de 5 points. Le principe est toujours le même, lors d’un test on établit un groupement de dés à dix faces (D10) composés des traits que le Conteur estiment être les plus représentatifs de l’action tentée (par exemple Manipulation + Subterfuge), puis on lance le pool de dés. Tous les résultats au dessus ou égal à 6 sont des réussites. Avoir deux 10 est un critique et double le nombre de réussite – un 10 est une réussite, deux 10 = 4 réussites. Avoir deux 1 par contre est un échec critique. On compare le nombre de succès soit à un degré de difficulté ou alors en opposition. L’écart entre les deux représente la marge de succès, ou d’échec.

Plusieurs petites règles viennent faciliter la fluidité du jeu. Tout d’abord, si votre groupement de dés représente le double du seuil à atteindre on considère l’action comme réussie, il est donc inutile de faire un jet, c’est également le cas si un personnage surpasse trop largement son opposition, ou si c’est lui qui est trop dépassé. De plus, si le jet est un échec mais qu’il contient au moins une réussite, le Conteur peut proposer d’obtenir une victoire à la Pyrrhus, c’est à dire une victoire qui a un coût. Beaucoup de ses possibilités dépendent du roleplay du joueur.

Le système d’initiative, là encore, est simple puisqu’on résout d’abord les actions à distance puis le combat rapproché s’il y en a. Il est conseillé, afin de ne pas trop surcharger la partie en jet de dés, de limiter les conflits à 3 tours. Bien sûr, libre à vous de vouloir en faire un D&D et de vous battre jusqu’au dernier point de santé, mais ce n’est pas l’essence de ce jeu. Pour l’avoir testée, cette règle est vraiment pertinente et offre bien plus de possibilités narratives (fuite, enlèvement, interaction avec une troisième force etc.).

Une autre mécanique propose d’utiliser des points de Volonté afin de relancer jusqu’à 3 dés d’un test. Ces points de volonté sont variable d’un personnage à l’autre mais sont une ressource non négligeable, et bien sûr en quantité limitée, pour autant chaque journée de repos nous permet d’en régénérer un certain nombre.

Le système se veut narratif et non simulationiste et cet aspect est omniprésent lors de la lecture des règles. On se l’approprie très vite. Il est simple, fluide et on finit par apprécier que les jets de dés reviennent moins souvent que dans d’autres jeux, les rendant bien souvent plus importants et offrant de belles opportunités de tensions narratives.

La Création de Personnage

Who am I ?

Le gros morceau du livre. On nous livre ici la méthode afin de créer son personnage, les étapes successives nécessaires pour donner « vie » à son vampire. Un résumé de création sur deux pages, bien utile, vient faciliter le travail, à nous ensuite d’aller chercher les options qui nous intéressent.

Outre l’aspect technique qui se transpose au fur et à mesure de la création, il faut réfléchir au concept de notre personnage. Ensuite viennent les questions de Clan et Sire, Attributs et Compétences, puis les Disciplines dictées par le choix du clan. Le style de prédation, c’est à dire de quelle manière votre vampire préfère se nourrir, est une nouveauté intéressante qui impose des contraintes en terme de jeu afin de pimenter les parties. Pour finir, il vous faut déterminer les Convictions ainsi que les Attaches qui y sont associées. Il vous faut autant d’attaches que de convictions, c’est pourquoi je recommande de commencer qu’avec une seule conviction de manière à faciliter la prise en main du jeu. C’est également ici que chacun déterminera son Ambition – ce qu’il veut sur le long terme – et ses Désirs – quelque chose d’accessible plus facilement – permettant d’alimenter l’histoire et mécaniquement de pouvoir récupérer des points de volonté.

Il vous faudra ensuite déterminer une série d’Atouts fait d’Avantages et de Handicaps qui termineront les contours de votre avatar. Ils sont nombreux et cela peut prendre un certain temps pour les choisir.

On y trouve également les règles pour la création de la coterie, nom donné à un regroupement de Vampires en l’occurrence les joueurs, avec les différents types suivant le but souhaité par ceux-ci. Je conseille fortement de consacrer du temps à cette partie, tout d’abord parce qu’une première création peut sembler un poil intimidante, ensuite parce qu’il est nécessaire que les joueurs puissent réfléchir ensemble aux possibilités offertes par le jeu et ce qu’ils comptent y faire. Ceci déterminera leurs motivations communes dans le monde de la nuit.

Si vous désirez avoir une vue plus synthétique de la création je vous recommande l’excellent document créé par Outstar, la chargée de communauté chez World of Darkness et qui a été traduit et mis à dispo sur le site d’Arkhane par Monsieur Alceste. Vous pouvez également trouver sur sa chaine une vidéo expliquant pas à pas la création d’un personnage de manière assez didactique.

Le Vampire

Il m’en reste encore entre les dents ?

Soif, sang, état vampirique, la chasse, tout y est expliqué. Tout d’abord, on brise ou on valide quelques mythes sur la condition vampirique – oui le soleil tue 😉 – puis on entre dans le cœur du système.

L’importance du Sang a été remis au centre des préocupations avec cette V5. Un des points essentiels est l’obligation de lancer des jets d’exaltation du sang à plusieurs moments clés comme au réveil ou encore lors de l’utilisation des pouvoirs. On lance un D10, et si le résultat est inférieur à 6 alors c’est un échec et on coche une des petites cases de points de soif. Avec 5 cases au compteur ça peut vite monter. Passé 3 cases, la bête grogne intérieurement, cela se matérialise par le risque de plus en plus grand qu’elle prenne le contrôle sur nos actions lors de jets classiques. Car dorénavant chaque point de soif coché oblige le joueur à intégrer autant de dés rouges à son groupement. Ces derniers peuvent provoquer l’apparition de la bête avec des conséquences désastreuses sur les 1 ou les 10 générés par ceux-ci. Ils sont ici remplacés par des symboles assez explicites afin de visualiser rapidement le résultat, mais on peut parfaitement jouer avec des D10 classiques, il suffit juste de prendre des dés de couleurs différentes pour la soif, les symboles n’étant finalement que cosmétiques, mais diablement immersifs. Une mécanique bien pensée qui oblige les joueurs à réfléchir intelligemment à la gestion de leur bête intérieure sous peine d’en perdre le contrôle au profit du Conteur et de constater les dégâts.

Et pour quelques dés de plus.. De Sergio Giovanni

Les pouvoirs du Sang ainsi que la Résonance, nouvelle mécanique plus ou moins appréciée des joueurs, sont également décrits ici. Les pouvoirs sont liés à la puissance du Sang que détient chaque vampire. De plus, lorsqu’il se nourrit, les émotions de la proie donne une résonance à son sang qui peut amplifier certaines disciplines. L’idée derrière tout ça est d’obliger les joueurs à interpréter leur vampire de manière cohérente. La chasse est une grande partie de leur vie et ils choisissent avec soin leurs victimes, et comment ils vont en abuser.

On y parle également des liens de Sang qui peuvent exister entre Vampires ou avec certains humains – les goules, des serviteurs – et de ce que ça implique, ainsi que du plus grand pêché vampirique existant : La Diablerie. Elle consiste à boire le sang jusqu’à la dernière goutte d’un autre Descendant, le conduisant ainsi à la mort ultime. Plus simple à écrire qu’à faire en jeu, mais ça reste une des possibilités – risquée – offerte, attention tout de même à ne pas vous faire prendre sous peine de vous retrouver chassé par vos congénères et d’être diablerisé à votre tour !

Le dernier point abordé dans ce chapitre touche aux Convictions et Attaches. Ils permettent d’alimenter les mécanismes d’Humanité puisque chaque fois que l’on transgresse les Principes de la Chronique établies à la création de la coterie, ou alors ses propres Convictions, on prend une flétrissure sur sa jauge d’Humanité. En fin de partie, nous devons tester si cette perte est définitive ou si notre vampire a des remords. Bien évidemment, moins on a d’Humanité plus on est contraint. Il ne faudrait surtout pas perdre nos attaches qui sont souvent des personnes liées à notre passé humain, sous peine d’une perte conséquente de cette ressource.

Wake up Neo

Les Disciplines

La discipline, le truc so XXe siècle

Au nombre de 12, elles sont ce qui différencie le plus un vampire d’un autre – en dehors du style (#Toréador) ou de l’aspect (#Facederat), évidemment. Leur niveau varie de 1 à 5, comme les autres traits. Lorsqu’on gagne un point de Discipline, on doit prendre un pouvoir dont le niveau est égal ou inférieur à notre nouveau niveau dans la discipline concernée. Normalement, les vampires ont autant de points que de pouvoirs dans une discipline – ni plus ni moins. Chaque vampire peut avoir jusqu’à trois Disciplines mais il vous sera très compliqué au début de développer les trois. Concentrez-vous sur une ou deux maximum afin d’être efficace dans ce que vous souhaitez faire.

Les différentes disciplines sont : Auspex, Célérité, Domination, Force d’âme, Occultation, Présence, Protéisme, Puissance, Sorcellerie du sang, Rituels et Alchimie du sang clair.

Certaines sont communes à plusieurs clans comme Présence (Brujah, Toréador, Ventrue), d’autres très spécifiques comme Sorcellerie du Sang (Tremere) ou encore Alchimie de Sang Clair dont le nom est suffisamment explicite.

Je tiens à préciser en ce qui concerne ce que j’ai écrit dans cette section que c’est propre à la revue de ce manuel. L’ajout des suppléments tels que Camarilla ou Anarchs nous montreront que d’autres Clans existent et qu’ils peuvent posséder d’autres Disciplines.

Systèmes Avancés

Ce chapitre apporte des règles supplémentaires pour la gestion de certaines scènes comme les ellipses, les Jets Etendus – les actions qui ont une certaine durée dans le temps – et les Conflits Avancés, avec notamment la possibilité d’une initiative plus classique ou encore l’utilisation d’armes à feu en combat rapproché. Rien n’est obligatoire et vous pouvez prendre ce qui vous semble pertinent comme tout laisser de côté, c’est votre jeu.

Ce chapitre en profite pour expliquer également le système de dettes et de faveurs qui est au coeur des relations entre Descendants. Un élément important, car c’est bien là le cœur du jeu souvent : qui vous en doit une et à qui vous êtes redevable. Cela pourrait bien déterminer votre destin si vous n’y prenez pas garde.

Cités – Chroniques

J’aime la ville, surtout la nuit

Les villes, l’aire de jeu par excellence des Vampires puisque ces derniers ont besoin de vivre là où les humains sont les plus présents afin de se nourrir plus facilement. Les codes, le système social, les domaines propres aux Caïnites, tout est expliqué, même comment concevoir son propre domaine pour une jeune coterie qui arriverait à se faire une place au soleil, enfin non, pas tout à fait mais vous m’avez compris.

On vous donne des astuces afin de retranscrire l’atmosphère spécifique à une cité, comment organiser les domaines, les terrains de chasse et les clés pour créer votre propre ville « by night », le plus facile étant tout simplement de vous inspirer de la votre si vous habitez une grande agglomération, néanmoins vous pouvez trouvez également tout un tas d’éléments dans les éditions précédentes qui seront tout à fait utilisables dont le célèbre Chicago By Night, le premier cadre de la franchise – que l’on attend toujours en VF pour la V5.

Vous n’êtes pas limités dans l’espace et vous pouvez parfaitement jouer dans plusieurs cités, un vampire peut voyager, avec quelques contraintes certes, mais il peut. Pour ma part les Caïnites que j’ai joué ont beaucoup voyagé, et d’ailleurs je continue d’écrire le journal de mon dernier avatar qui s’est fait une spécialité de rechercher à travers le monde les livres en rapport avec l’histoire vampirique afin de créer la plus grande bibliothèque sur la question. Jimmy si tu me lis depuis ton refuge, je te passe le bonsoir.

Après que le décor soit posé, le chapitre suivant nous aide à créer notre Chronique, l’histoire que nous allons raconter ensemble. Les thèmes sont pléthores et dépendent du style de jeu que vous choisirez. Concevoir la Chronique en amont est essentiel et on vous donne ici quelques exemples possibles. Le symbolisme, les motivations et la dynamique de groupe sont traités afin de donner le maximum d’élément au futur Conteur. Bien évidemment vous n’êtes pas obligés de tout suivre à la lettre mais les conseils sont pertinents tant les parties de Vampires sont différentes d’autres jeux. Il faut garder en tête que chaque session se découpera en scènes afin de pouvoir gérer les ressources des personnages. Elles sont de longueurs souvent inégales et dictées par le roleplay et les interactions des joueurs. C’est parfois au Conteur de décider d’y mettre fin pour passer à la suivante. Evidemment, l’expérience aidant, il deviendra plus facile de savoir quand couper. Une session n’équivaut pas forcément à une nuit complète, elle peut en contenir plusieurs ou au contraire n’en être qu’une partie, mais chaque session contiendra forcément plusieurs scènes.

Dernier point et non des moindres, on revient sur le schéma des relations déjà évoqué lors de la création des personnages. Si vous voulez vraiment profiter au maximum des possibilités du jeu, je vous conseille grandement de le réaliser. Ça peut paraître intimidant au début mais le manuel nous explique comment l’apprivoiser et nous montre quelques exemples. Sans ça, vous risquez grandement d’oublier au fur et à mesure des sessions qui connait qui et qui veut manger qui, ce serait dommage de se priver de ce qui fait le sel du jeu, les relations entre chaque protagoniste et leur implications.

Le Vampirisme n’est pas une maladie chronique, non.

Outils – Sagas

La dernière partie du livre est une sorte de boite à outils où le Conteur retrouvera les indispensables pour les oppositions ou donner vie à son monde. Antagonistes, PNJs possibles, matériels ou encore Les Sagas reliant possiblement les joueurs aux grands du monde de la nuit, tout y est.

Le chapitre se conclut sur trois appendices : Appendice I: Actions ordinaires, Appendice II: Projets, et enfin le plus important à mon sens Appendice III: Conseils pour jouer avec bienveillance.

je vais m’arrêter sur ce dernier point qui rejoint mon avertissement en début d’article. Vampire est un jeu ADULTE. J’insiste bien là-dessus. Il n’est certainement pas calibré pour des adolescents en plein construction de personnalité et encore moins pour des enfants. Les thèmes abordés sont violents, on parle de prédation, d’abus de confiance et dans ces circonstances même des adultes parfois ont bien du mal à faire le distinguo entre un jeu et la réalité. La communication est essentielle et obligatoire entre tous les membres de la table. Certains peuvent avoir plus de difficultés avec la chasse qui par de nombreux aspects peut ressembler à un viol ou une atteinte sexuelle, ou encore avec les violences faites aux enfants voire tout simplement être atteint de phobies basiques. Tout dépend du vécu de chacun. Il est toujours possible en jeu de demander une interruption de scène grâce notamment à la fameuse X card que chacun se doit de posséder autour de la table, en espérant que tout le monde respecte ça. Le mieux reste encore ce que nous avons fait en début de Chronique lors de ma dernière table à savoir remplir un document de consentement afin que le Conteur et les autres joueurs sachent où se situent vos limites. Ce document peut et doit même être intégré à n’importe quel type de table afin de garantir une bonne ambiance et que cela reste bien un jeu, un divertissement.

La feuille de consentement, essentielle si on veut jouer dans le respect de chacun

Conclusion

Vampire est un jeu dont le lore et l’ambiance sont plus importants que le système, ce n’est donc pas pour tout le monde. Si vous chercher à taper du monstre, à acquérir des trésors, vous n’avez pas toqué à la porte du bon caveau. Ici ce sont la survie et le contrôle de votre personnage qui sont au cœur du jeu. Si vous avez de la chance vous arriverez peut-être à concrétiser quelques désirs voire votre ambition secrète, mais attention, les autres vampires ont aussi des crocs. Cette V5 a fait le pari de rénover le système afin de replacer au centre la condition vampirique avec son besoin perpétuel de se nourrir de sang plutôt que des conflits à coups de pouvoirs surnaturels. Ce dépoussiérage est une vraie réussite, plaçant la narration au cœur du jeu, un Messy Critical sur le jet de création en somme, pour tous ceux qui, comme moi, aiment le jeu de rôle plus pour son acting et la réflexion qu’il propose par reflet sur notre monde plutôt qu’autre chose.

Quelques illustrations que j’aime

Je proposerai prochainement des aides de jeu pour la V5 ici sur mon blog ainsi que la revue des autres manuels disponibles en français, en attendant comme dirait Jason Carl « Welcome and Good Evening. »

Bonsai !

Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs et issu du PDF du livre de base disponible à cet adresse : https://www.drivethrurpg.com/product/283287/Vampire-La-Mascarade-5e-edition?src=also_purchased

Les Ragots de la Taverne #8

Hello There !

Déjà en février, comme le temps passe vite. Il file et j’ai l’impression de n’avoir quasiment rien lu de l’année encore. Bon ce n’est pas tout à fait vrai, je suis dur avec moi-même comme souvent. Faisons donc le point de ce premier mois devant un bon café, histoire de reprendre des forces après un déménagement longue distance, hier, de la meneuse de chèvre la plus excentrique au nord de la Loire. Il faut bien s’entraider entre lecteurs, même si elle n’est pas team Coffee.

Coffee

Donc répertorions mes lectures du mois, j’ai terminé L’Affaire Charles Dexter Ward, l’intégrale 3 de Lovecraft des éditions Mnémos, j’ai englouti plus de 500 pages sur environ 900 du premier tome de Conan en poche version Patrice Louinet, j’ai relu une bonne partie de mon manuel de base de Vampire : la mascarade 5e édition et j’ai écouté plus de la moitié du Messie de Dune de Frank Herbert sur Audible, la suite de Dune qui me plait énormément. Je compte le terminer dans la semaine à venir, afin de démarrer en audio L’Eveil du Léviathan de la série de livre The Expanse de James S. A. Corey qui n’est autre que le nom de plume utilisé par Daniel Abraham et Ty Franck. Comme je l’ai dit j’ai bien envie que cette année oscille entre horreur/fantastique et Science Fiction. Ça fait très longtemps que je veux lire The Expanse, j’ai même déjà lu deux fois les premières pages. Je ne pense pas pour autant délaisser la Fantasy, mais elle se fera plus discrète et probablement que ce seront des lectures des nouvelles éditions révisés de Tolkien acquises en fin d’année dernière.

Dans d’autres registres j’ai écouté pas mal de podcasts et regardé des actuals plays. J’ai terminé le chapitre 1, soit 48 épisodes, des Chroniques de Chicago de Monsieur Alceste, fini de visionner également deux des ses émissions sur youtube, les fameux Messy Critical. Pour compléter mes lectures vampiriques, j’ai reçu le dernier ouvrage qui me manquait, le supplément de contexte sur le Sabbat, une faction qui n’est plus jouable dans cette version mais propose un antagoniste de haut niveau pour vos parties. Le blog proposera des revues sur la gamme très bientôt.

Mes lectures du mois : 1 terminée, 2 à plus de la moitié, sans compter le JDR.

Je me suis également penché sur Delta Green, un jeu de rôle publié par Arc Dream Publishing. Il s’agit d’une version contemporaine de l’appel de Cthulhu. Un mix entre X-Files et le classique de Chaosium. Le background du jeu m’a énomément plu. À la base développé comme un supplément pour l’Appel de Cthulhu de Chaosium (Descartes puis Sans Détour en France), les créateurs – rédacteurs de l’univers ont décidé de se lancer en solo et ont créé leur propre maison d’édition. Ils ont choisi le système Gumshoe pour piloter leur univers, un dérivé du Basic Role-Playing (BRP) utilisé dans L’Appel de Cthulhu mais plus simple à mon sens, privilégiant le narratif de manière encore plus prononcé que le BRP. La gamme n’existe qu’en anglais, aucun éditeur français ne souhaitant se risquer à acheter les droits de traduction puisqu’ils sont double, d’une part ceux détenus par Chaosium et de l’autre par Arc Dream Publishing. N’espérez donc pas en profitez en français pour le moment. Il existe néanmoins un ouvrage qui s’intitule La Chute de Delta Green publié chez Studio Deadcrows, une traduction d’une campagne parue chez Pelgrane Press aux USA. Il couvre une période spécifique de la timeline de l’univers se situant dans les années 60/70.

Les arrivages de la fin du mois.

Ce n’est pas la première fois que je m’intéresse à du contemporain, lors du premier confinement avec ma team nous avions joué pendant un temps à L’Affaire Greenberg en Chroniques oubliées Contemporain, une campagne complétement folle, totalement lovecraftienne mais se déroulant en 2018, au moment où Trump devient président. Le pitch m’avait beaucoup attiré. Delta Green est exactement dans la même veine, ou est-ce l’inverse ? Peu importe. Ce qui compte c’est le fun quand on joue. Comme j’aime me faire une idée de ce qu’un système de jeu et un univers peuvent rendre, je me suis écouté une partie en 3 actes réalisée par une team très sympa, La JDR Accademy. J’ai beaucoup ri et adoré l’ambiance autour de la table. Je vous donne le lien du premier épisode, il y en a 3.

Sur ce mini bilan de mois, je vous souhaite un bon dimanche, plein de lecture et de repos. Moi je retourne à mes livres, mes revues, avec du bon métal en fond , et un café pas très loin. Évidemment.

Bonsai !

Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs.

Revue Littéraire : Dune de Frank Herbert

Hello There !

Il est certaines lectures qui vous marquent mais pour lesquelles il faut du temps pour les assimiler. Dune en fait clairement partie. Alors que le film s’annonçait sur les écrans fin 2020 (au départ), je me suis rendu compte que je ne l’avais toujours pas lu. Profitant du train de la hype et préférant toujours connaitre le livre avant une adapatation cinématographique, j’ai creusé dans le sable de ma planète natale et déterré le joyau de Frank Herbert. Deux ans et demi plus tard, alors que je suis en train de finir l’écoute sur Audible de la suite, Le Messie de Dune, je vous livre ici ma revue d’un roman culte et dont la renommée n’est pas usurpée.

Quatrième de couverture :

Il n’y a pas dans tout l’empire de planète plus inhospitalière que Dune. Partout des sables à perte de vue. Une seule richesse : l’épice de longue vie, née du désert et que tout l’univers convoite.
Quand Leto Atréïdes reçoit Dune en fief il flaire le piège. Il aura besoin des guerriers Fremen qui, réfugiés au fond du désert, se sont adaptés à une vie très dure en préservant leur liberté, leurs coutumes et leur foi. Ils rêvent du prophète qui proclamera la guerre sainte et changera le cours de l’Histoire.
Cependant, les Révérendes Mères du Bene Gesserit poursuivent leur programme millénaire de sélection génétique : elles veulent créer un homme qui réunira tous les dons latents de l’espèce. Le Messie des Fremen est-il déjà né dans l’Empire ?

Mon avis :

Je ne connais pas la peur, car la peur tue l’esprit.
La peur est la petite mort qui conduit à l’oblitération totale.
J’affronterai ma peur.
Je lui permettrai de passer sur moi, au travers de moi.
Et lorsqu’elle sera passée, je tournerai mon oeil intérieur sur son chemin.
Et là où elle sera passée, il n’y aura plus rien.
Rien que moi.

Litanie contre la Peur du rituel Bene Gesserit

Le premier mot qui me vient à l’esprit est grandiose. Dune est un livre aux frontières de la fantasy à bien des égards. Afin de délivrer son message, Frank Herbert a imaginé un écosystème à l’échelle d’une planète semblable à un désert géant nommée Arrakis, ainsi que les peuples qui vont avec, leur histoire, leurs coutumes, liées à leur environnement. Chaque élément semble réaliste et cohérent, que ce soit la géographie, la météo, l’hydrographie, la faune et la flore, jusqu’aux éléments les plus SF tels que le distille, les boucliers ou encore les ornithoptères. Enfin, il a transposé les problématiques de notre propre monde à l’échelle de la galaxie devenue un empire complexe, parcouru de conflits. La planète est un personnage à part entière, au même titre que les protagonistes, elle est bien plus présente que certains d’entre eux tel l’Empereur, personnage à la fois omniprésent et absent, qui n’est mis en scène que très peu, souvent de manière détournée, et nous questionne sans cesse. Le côté féodal de la société nous permet de rester ancré dans un modèle que nous ne connaissons que trop bien, même si les seigneurs d’aujourd’hui sont d’un tout autre acabit. En ce sens la famille Leto, au cœur de l’intrigue, fait presque office de dirigeant aux concepts nobles voire parfois trop idéaliste, l’image même que nous attendons de ceux qui nous guide. Le grand opéra des manigances se déroule sous nos yeux, et dans ce futur dystopique, les règles n’ont pas changé, l’argent et le pouvoir sont toujours la clé et l’objectif. Ce pouvoir, c’est l’épice, une denrée rare qu’on ne trouve que sur Arrakis et qui permet le voyage intersidéral. Celui qui le contrôle, contrôle tout. Un worldbuilding bien structuré donc, facilitant l’immersion, et bien que le dépaysement semble total, nous ne sommes pas complètement perdu, nous avons les clés qui nous permettent d’accéder aux véritables messages du livre.

Le mystère de la vie n’est pas une question à résoudre mais une réalité à vivre .

Frank Herbert

Inspiré par de nombreuses religions tel que l’Islam, Dune a une portée universelle, comme souvent dans la bonne fantasy. Ce qui le classe dans la SF, finalement, c’est son décor galactique et ces gadgets technologiques car tous les bons ingrédients propre à la fantasy s’y retouve: la prophétie, le héros avec son mentor, sa famille perdue, un ennemi mortel et acharné, et bien sûr ses nouveaux alliés qui le guide au bout de sa quête initiatique. Un parallèle évident avec une autre oeuvre, de cinéma cette fois-ci : Star Wars. Si ces récits fonctionnent c’est parce qu’ils s’adressent à ce qu’il y a de plus profond en nous, un idéal de justice, d’espoir, de lutte contre l’oppression. Le livre a été écrit en 1965 et cela ne se ressent aucunement. L’auteur rédige d’une main de maitre son chef d’oeuvre, donnant à l’ensemble la forme d’une chronique historique par le biais d’épigraphe reprenant des citations extraites de livres. Des annexes liées à l’écosystème, la religion ou encore Le Bene Gesserit, une organisation composée de femmes, aux origines et motivations mystérieuses, ajoute à l’ambiance.

Les religions servent à créer des extrémistes et des fanatiques.

Frank herbert

Ce qui lui permet d’être novateur et différent de la fantasy classique au delà du décor, même si celui-ci joue énormément, ce sont ses thèmes. Si le plus présent – et au coeur de notre actualité – est l’écologie, il n’est pas unique, et ce n’est certainement pas la seule oeuvre à le traiter, Le Seigneur des Anneaux y consacre également une large part par le bais de l’arc narratif d’Orthanc. Non, Dune parle aussi et surtout de fanatisme religieux, et il s’agit bien du thème important du livre. On y traite également des dangers de la génétique, de la science deshumanisée, et des choix qui la guident. Dans Dune le concept écologique est très poussé, la vie engendre la vie, même dans les milieux les plus inhospitaliers. L’eau est un luxe, la survie un objectif permanent. Ainsi dans cet environnement, le fanatisme religieux naît plus facilement sur le terreau de l’ignorance et de la simplicité. Il est aisé d’abuser de la conscience de personnes vivant dans des conditions précaires et périlleuses, qui ne sont pas pour autant forcément faibles d’esprit mais juste enfermées dans des préoccupations plus primaires et par des réalités parfois fatales. Des Conditions qu’on a pu créer ou maintenir intentionnellement dans un but précis. La tentation est grande dans de telles circonstances de croire, d’espérer, sinon comment trouver la force de continuer ? La manipulation devient facile et à mon sens c’est ici qu’est le cœur du message. Il dénonce tout forme de manipulations tout autant que la défiance nécessaire à l’égard de l’homme providentiel, le messie, le danger de l’adoration aveugle, les croyances, les mythes annoncés depuis des éons immémoriaux, entraînant un fanatisme qui détruit tout sur son passage, et se retourne contre ceux qui l’ont attisé.

Le concept de progrès agit comme un mécanisme de protection destiné à nous isoler des terreurs de l’avenir.

Les Dits de Muad’Dib

Paul Atréides et sa mère, Jessica. Image tirée du film de Denis Villeneuve. Dune (2021)

Une petite note sur le film de Denis Villeneuve, dont la suite est annoncée entre le 1er et le 15 novembre 2023. La lecture du livre en tête, c’est avec peu d’espoir d’y trouver ce que j’avais lu que je l’ai regardé, tellement déçu de manière générale par les adaptations. Et pourtant. Pour une fois, un réalisateur a réussi. J’y ai quasiment vu les images que mon imagination avait construit lors de la lecture. Les décors, la photographie, un casting juste et au service d’une narration lente, contemplative, mais grandiose, magnifiée par la musique de Hans Zimmer m’ont transporté. Peut-être était-ce juste un hasard d’y retrouver ma propre vision, ou peut-être pas, dans tous les cas, j’ai pris beaucoup de plaisir à cette adaptation et je ne peux que vous conseiller de vous faire votre propre avis si ce n’est pas encore fait.

Conclusion

Frank Herbert nous livre une oeuvre profonde, une véritable réflexion philosophique, dont la portée ne peut être entièrement appréhendée en une seule lecture. Traitant de thèmes sensibles, mais qu’il nous faudra tôt ou tard régler si nous ne voulons pas être voué à disparaître ou à nous auto-détruire, il a su avec un style fluide et simple transmettre son message qui ne se révèle pas si aisément et qu’il nous faudra aller chercher sous le sable qui le recouvre délicatement. Aux frontières des genres, Dune les transcende, le débat concernant son affiliation n’a pas fini d’enflammer les lecteurs alors même que ce n’est pas l’essentiel : Dune est une oeuvre intemporel destinée aux générations futures, peu importe sa couleur, son genre. Frank Herbert nous met en garde, nous interroge, pour ceux qui voudront bien voir au delà de l’aventure. La fin qui se déroule plus vite que le début de l’histoire, un déséquilibre voulu, met en lumière que les rouages qui entraînent les grands changements prennent leurs racines profondément, et que leurs conséquences sont parfois aussi vives et imprédictibles que le temps qu’il aura fallu pour qu’elles apparaissent. Espérons que ce livre saura faire basculer l’histoire, pour le meilleur.

Note : 10/10

Bonsai!

Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs.

Les Ragots de la Taverne #7

Hello There !

La Taverne ouvre ses portes comme tous les dimanches matin, venez on va papoter de ma semaine, de mes envies de lectures, de jeux. En parlant de lecture, je me suis fait un petit plaisir lors d’une opération 2 poches achetés = 1 offert, j’ai craqué sur la nouvelle édition limitée de Dune chez Pocket et je me suis pris aussi un recueil de nouvelles de Philip K Dick pour le plaisir de lire la nouvelle qui a inspiré un de mes films préféré, Total Recall. Le recueil porte le même nom mais la nouvelle s’appelle Souvenirs à vendre. Je regrette que l’on modifie les titres comme ça au profit du cinéma pour être plus en vue. C’est comme Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques devenu Blade Runner, par rapport au film. C’est comme ça on y peut rien, mais bon. J’avais beaucoup aimé Le Maitre du Haut Chateau lu il y a deux trois ans et dont la chronique n’est toujours pas publiée (mais commencée cher lecteur et chère lectrice !). L’univers de K Dick est plein de niveaux de lectures différents et nous questionne énormément sur la réalité. J’adore.

En livre offert j’avais plusieurs choix, mais quand j’ai vu le résumé de Vostok de Laurent Kloetzer, et écrit dans les tous premiers mots «Antarctique», direct j’ai craqué. J’adore le mystère qui entoure ce continent difficile d’exploration et d’accès dû à des conditions climatiques extrêmes.

Hunter is Coming

Sinon j’ai replongé. Je suis de nouveau addict au Sang. J’ai une passion pour les monstres et spécialement pour les vampires. J’avais déjà parlé d’un ouvrage lié au jeu Vampire la Mascarade dans un précédent article et je vais probablement poursuivre dans cette veine. J’ai commencé à préparer des aides de jeux pour la V5 (5e édition du jeu) que je compte mettre en ligne sur ce blog, et je relis avec plaisir mes ouvrages de la gamme, alors que j’attends avec impatience la sortie de Hunter : The reckoning en mars chez Arkhane Asylum. Il s’agit d’un jeu qui vous permet d’interpréter non pas un vampire cette fois, mais un humain qui chasse les créatures surnaturelles. Le Monde des ténèbres va continuer sa mutation en 5e édition avec l’arrivée prochaine en VO de Werewolves: the apocalypse 5th edition , tandis qu’Arkhane, l’éditeur français détenteur des droits, poursuit la publication des suppléments de la gamme Vampire, et d’après l’apérôliste de Rôliste TV on devrait avoir La Seconde Inquisition en avril je pense. Pour l’heure j’attends de recevoir l’ouvrage sur le Sabbat alors que je possède déjà 3 des volumes publiés en français. Promis j’essayerai de parler de chacun, parce que cet univers bien sombre le mérite, et ça permettra aux néophytes d’y voir plus clair dans le Monde des Ténèbres. Étreindre de nouveaux descendants fait toujours partie des plaisirs de la non-vie, l’éternité est longue quand on est seul *se laisse aller à dévoiler ses crocs*.

Les ouvrages en ma possession

Il faut savoir qu’il existe une gamme de jeux vidéo également, et j’ai très envie de précommander ce magnifique coffret.

Il est rare que je craque pour des collectors mais celui-ci est magnifique

Pour en revenir à mes loisirs et mes partages ici, j’ai longtemps hésité à scinder mon activité en deux, avec deux blogs, un sur mes lectures/musiques, la première ligne éditoriale du blog, et un autre sur le jeu de rôle. Néanmoins je pense qu’à la longue, je m’épuiserai et finirai par délaisser l’un ou l’autre, faute d’arriver à alimenter suffisamment les deux. Et puis ce blog comme je l’ai dit dans ma revue sur Je suis Providence de Joshi, la biographie de Lovecraft, c’est un peu mon journal amateur, et chaque chose que j’y publie et une de mes facettes. Quelques part il s’agit bien d’un même thème, que ce soit au travers de la lecture, de la musique ou du jeu de rôle : l’imaginaire. Alors autant tout mettre ici. Je réorganiserai les étagères de la Taverne afin d’avoir plus de facilité à chercher et de clarté sur ce qu’on peut y trouver.

Voilà, avant de nous quitter et afin de conclure ce dimanche vampirique, je vous donne quelques liens pour approfondir l’univers. Le premier est en anglais, issu tout droit de la maison mère, il peut permettre de vous faire une idée de l’ambiance et l’univers d’une chronique de Vampire. C’est un Actual Play assez côté, pas autant que leurs amis de Critical Role, le stream le plus vu du monde, mais les acteurs de ce dernier y viennent régulièrement.

Le second est en français. Monsieur Alceste fait vivre le monde des Ténèbres à sa manière dans la la langue de Molière et publie tout d’abord un podcast, Les Chroniques de Chicago, que je suis avec beaucoup de plaisir. Il possède également une chaine youtube sur laquelle je me suis régalé à suivre une partie de Hunter : The reckoning. je vous laisse découvrir tout ça.

Le podcast sur Spotify :

La video :

Allez sur ce, bon dimanche et excusez moi d’avance si j’ai mis du sang dans votre tasse plutôt que le café habituel !

Bonsai!

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Revue Littéraire : Intégrale Lovecraft, Tome 1 : Les Contrées du Rêve aux éditions Mnénos

Hello There !

Ce soir, la tempête balaie les murs extérieurs de ma ville alors que la nuit enveloppe tout de son linceul de ténèbres. Le vent roule, se contorsionne, hurle et frappe sous les rebords du toit tandis que la pluie fouette et tapisse mes carreaux. Au travers, le paysage se liquéfie, parsemé de goutelettes scintillantes telles des milliers d’étoiles, et d’autant de coulées multicolores aux reflets oniriques. Malgré ce déchainement de fureur, sur mon bureau, une bougie famélique éclaire mon clavier, sa lumière vacillante vient parfois caresser les pieds d’un Cthulhu assis sur son trône qui me surveille à moitié endormi de sous mon écran. Mon carnet de notes et mon livre à portée de main, c’est avec un sourire malicieux que je m’apprête à rédiger cette revue. Howard Phillips Lovecraft. On peut dire qu’il a les honneurs de mon blog dernièrement, et c’est avec un plaisir non dissimulé que je poursuis cette série d’articles qui verra tous les volumes de Mnémos chroniqués. Il le mérite. Ma première revue à son sujet remonte à une lecture audio faite en 2018 du texte l’Appel de Cthulhu tiré de l’intégrale de Bragelonne qui à l’époque était le premier effort de publication assez complet tentant de regrouper tous ses textes importants en une édition unique. Puis j’avais fait le choix de parler du tome 2 de cette série intégrale, alors qu’on trouvait beaucoup plus d’éléments sur la blogosphère en rapport avec le premier tome. J’en étais à ma découverte de l’auteur, je ne savais pas vraiment vers quel type d’édition me diriger, d’ailleurs il y a beaucoup d’éléments de ces premières chroniques que je vais enfin pouvoir réviser à travers cette série d’articles, mes analyses n’étaient pas toujours justes. Mes recherches s’affinant – entre temps j’avais terminé de lire les 3 premiers tomes édités chez Bragelonne et il ne me restait plus que le quatrième concernant les contrées du rêves – je découvris un peu tard que Mnémos avait fait un financement participatif afin de retraduire tout Lovecraft en un magnifique coffret de 7 volumes. Manque de chance, j’avais loupé le train. J’allais devoir attendre la sortie dudit coffret en espérant qu’il en resterait. Ce ne fut pas le cas, mais la maison d’édition allait faire mon bonheur : ils annonçaient la publication de chaque tome séparemment dès 2022. Bingo ! L’occasion était trop belle d’autant plus que le premier tome en question contenait les textes que je n’avais pas encore lus : Les Contrées du Rêves. Alors, êtes-vous prêt à descendre avec moi les soixante-dix marches menant à la caverne de la flamme pour rencontrer Nasht et Kaman-Thah, les prêtres barbus ?

Quatrième de couverture :

Parallèlement à ses textes regroupés par la suite sous l’intitulé du Mythe de Cthulhu, H.P. Lovecraft a créé tout un univers onirique, une contrée sauvage et magique. Découvrant ses démons et ses beautés, ses cités aux merveilleuses flèches d’or, ses falaises d’onyx ou ses mers crépusculaires, Randolph Carter, le double littéraire de l’auteur, poursuit une quête sans fin, celle de Kadath l’inconnue.

Pour la première fois en France, l’intégrale de l’œuvre de fiction de Lovecraft est publiée dans une traduction unifiée, réalisée par David Camus, qui a consacré dix ans à ce chantier. Cette édition en sept tomes est complétée d’un large choix d’essais, de correspondances, de poésies et de textes révisés par l’écrivain, de cartes en couleurs, ainsi que d’études et de très nombreuses notes par les meilleurs experts de l’œuvre.

Textes de Lovecraft contenus dans ce volume : La Quête d’Iranon (The Quest of Iranon), Polaris (Polaris), La Malédiction qui s’abattit sur Sarnath (The Doom That Came to Sarnath), Hypnos (Hypnos), L’Étrange maison haute dans la brume (The Strange High House in the Mist), Le Bateau blanc (The White Ship), Celephaïs (Celephaïs), Ex Oblivione (Ex Oblivione), Ce qu’apporte la lune (What the Moon Brings), Le Livre ( The Book), Les Chats d’Ulthar (The Cats of Ulthar), Les Autres Dieux (The Other Gods), Le Témoignage de Randolph Carter (The Statement of Randolph Carter), La Quête onirique de Kadath l’Inconnue (The Dream-Quest of Unknown Kadath), La Clé d’argent (The Silver Key), À Travers les portes de la clé d’argent (Through the Gates of the Silver Key), Azathoth (Azathoth).

Mon avis :

Cette édition intégrale possède un écrin somptueux qui ne cesse de me ravir, moi l’amoureux des livres. Couverture rigide, dos élégant, que je préfère en blanc d’ailleurs comme ma présente édition plutôt que le noir du coffret intégral (mais ce n’est qu’une question de goûts), double pages de garde intérieures décorées d’une magnifique carte des Contrées du Rêve en couleur, et un papier à l’épaisseur idéale, le tout pour une prise en main agréable. Même si HPL disait lui-même que l’objet-livre ne comptait pas, seulement son contenu, je ne peux tout de même que m’extasier devant cette finition de qualité qui se veut à la hauteur de l’oeuvre de l’auteur de Providence. Indéniablement, cette édition surpasse tout ce qui a été fait jusqu’ici en France, que ce soit dans la finition, l’esthétique, mais surtout dans la traduction et l’agencement des récits et contes. Ce recueil ainsi que le second n’ont pas été totalement le fruit du Crowdfunding. En effet le travail avait commencé en 2010 avec une première édition de ces Contrées du Rêve qui a servi de base. Après une introduction générale de l’intention de cette nouvelle traduction par David Camus, nous avons deux préfaces, celle de la première édition, suivie d’un addendum pour le présent livre. Elle nous donne le ton de ce recueil, les enjeux, et ce que le traducteur a tenté modestement de rendre à César – surnom que Lovecraft n’aurait pas renié lui qui se faisait appeler Lucius le romain. Trois textes viennent compléter la version publiée en 2010 : Ex Oblivione, Ce qu’apporte la lune et Le Livre, pour un total de 17 entrées.

Dans chacun des autres volumes de l’intégrale, l’ordre chronologique d’écriture des textes a été privilégié, mais il n’en va pas de même pour celui-ci. David camus nous en explique la raison en préface :

Ici, le parcours – puisqu’il s’agit, dans tous les cas, d’une proposition de voyage – emprunte la temporalité des rêves, qui n’est pas toujours chronologique. Les œuvres sont donc présentées dans l’ordre qui nous a paru offrir la meilleure expérience de lecture – ou onirique, si vous préférez. Une expérience qui débute par « La Quête d’Iranon », dont les décors évoquent l’Antiquité, et se prolonge, en passant par les temps modernes, jusqu’au voyage entrepris par Carter au sein même de ces Contrées, où il recherche Kadath.

David Camus

Voilà l’itinéraire tracé, nous n’avons plus qu’à nous allonger tranquillement, la tête bien calée sur notre oreiller et à sombrer au pays des rêves pour y retrouver toute la féérie onirique déployée par Lovecraft. Mais que nous raconte ces textes ? Qu’évoquent-ils ? Et pourquoi les avoir regroupés ensemble ? Je vous propose de découvrir mes notes de lectures dans leur état brut afin de vous faire une idée.

  • La quête d’Iranon : On dirait du Tolkien dans sa poésie aux accents antiques, aux noms chatoyants. La morale de la quête d’Iranon c’est que lorsqu’on perd ses rêves on meurt. Le rêve rend éternel et le beau repousse la mort. C’est aussi une métaphore du passage à l’âge adulte selon moi.
  • Polaris : Rêve et réalité se confondent à la lueur des étoiles. Où commence le rêve ? Où finit la réalité ? Le rêve est une porte entre les mondes? Rythme, conception, figures de style et vocabulaire poétique, tout y est. Un de mes préférés. La passivité du héros est une métaphore à peine voilée du sentiment d’inutilité de Lovecraft pendant la WW1 alors qu’il ne put rejoindre un bataillon d’engagement pour des raisons de santé. 
  • La Malédiction qui s’abattit sur Sarnath : remake de Sodom et Gomorrhe avec de belles descriptions qui perdent le lecteur, alors que la finalité est présente dès le début. Thème (étonnant ?) de Lovecraft sur la peur de l’autre, de l’inconnu.
  • Hypnos : il pose les jalons de la suite de son œuvre avec « l’indescriptible » laissant l’imagination du lecteur faire le reste. Voyage astral ? A-t-il réellement un ami ? Le rencontre-t-il réellement à la gare ou s’agit-il déjà de sa statue ? Encore une fois perte du réel. Peur du vieillissement et de la mort.
  • L’étrange Maison Haute dans la Brume : Conte onirique, symbolique du chemin vers le rêve (on monte), histoire d’ambiance avant tout. première nouvelle où nous apercevons la ville de Kingsport qui n’est autre que la transcription de la cité de Marblehead dans le Massachusetts avec ses maisons de style coloniale qu’affectionnait particulièrement HPL.
  • Le Bateau Blanc : Quête onirique d’un royaume mais les présages sont trompeurs. Et la mort ou le désespoir guette celui qui veut trop savoir.
  • Celephais : Encore une fois le rêve rend fou et aveugle. Il peut conduire un homme de la misère au suicide en cherchant à braver l’interdit.
  • Ex Oblivione : Les drogues pour oublier le monde, rêver et mourir.
  • Ce qu’apporte la lune : Plutôt la mort dans l’horreur que la folie et la peur. Comme souvent tout démarre bien, le décor est bucolique puis l’horreur et la nécrose s’installent.
  • Le livre : Occultisme mystique, livre magique ouvrant sur d’autres dimensions de l’espace. j’adore!!
  • Les chats d’Ulthar : Conte onirique incroyable, montrant toute l’affection que HPL portait aux chats qui le lui rendaient bien.
  • Les autres Dieux : Texte relatant l’histoire d’un soi-disant sage voulant percer le secret des dieux dans les royaumes oniriques, à chacun d’y voir une morale.
  • Le témoignage de Randolph Carter : Excellent texte à l’ambiance crypte et cimetière, comme dans le molosse, précurseur aussi à mon sens de Charles Dexter Ward. J’adore !
  • La quête onirique de Kadath l’inconnue : Presque un roman, un voyage au bout du rêve. Suite d’aventures, digne d’un jeu de rôle, où il réintègre énormément de thèmes et de personnages déjà révélés dans d’autres textes (Pickman, les Chat D’Ulthar, les ruines de Sarnath, etc)
  • La Clé D’argent : Un conte sur l’enfance, l’âge des rêves que Carter s’efforce de retrouver par tous les moyens.
  • À travers les portes de la clé d’argent : Cette suite écrite sur l’insistance de Hoffman est beaucoup moins bonne que la précédente. L’influence de Lovecraft m’y semble mineure tant les ficelles sont grosses et peu poétique.
  • Azatoth : Un de mes poèmes en prose favori que j’avais déjà cité lors de la revue du tome 2 du Mythe par Brage.

Il m’est difficile de choisir mes textes préférés tant j’ai été envouté tout le long de ma lecture. Un voyage sublime, d’une poésie incroyable qui pose un contraste saisissant avec les textes qui traitent de l’horreur cosmique et pour lesquels il est plus connu. Ici le fantastique se veut féérique, onirique, et l’auteur nous y livre une prose poétique à bien des égards. Il m’est plus aisé de vous dire plutôt ceux qui m’ont moins marqué sur ce recueil, comme À travers les portes de la clé d’argent, qui d’ailleurs est le fruit d’une collaboration que Lovecraft n’avait pas vraiment souhaité, ne voulant pas apporter de suite à La Clé d’Argent. Les textes sont inégaux en terme de longueurs, certains allant de quelques pages tandis que d’autres comme La quête onirique de Kadath l’inconnue font la taille d’un roman, et quel roman, malgré certaines redondances ! Nous sommes à la limite de l’oeuvre de Fantasy. Je dirais tout de même que j’ai une affection toute particulière pour Polaris, Celephais, Le livre qui semble avoir été une tentative de retranscrire en prose les Fungi de Yuggoth, un ensemble de sonnets poétiques, Le témoignage de Randolph Carter pour son côté macabre et suggestif, La Clé D’argent pour sa quête du monde de l’enfance qui nous est à jamais perdu, et Azatoth pour sa sublime poésie colorée. Je pourrai rajouter La Quête d’Iranon, L’étrange Maison Haute dans la Brume, Le bateau Blanc et bien évidemment La quête Onirique de Kadath L’Inconnue chacune cultivant l’étrange et le surnaturel mais possédant bien souvent une morale ou un message caché. David Camus nous dit à juste titre que Lovecraft, ne cesse de nous échapper pour mieux nous envelopper. En tout cas aujourd’hui il ne peut plus fuir sa renommée, bien qu’il arriverait encore à tourner ça en dérision, voire à croire que tout ceci n’est qu’un rêve.

Conclusion

David Camus nous livre une traduction très pure, au plus proche de la version originale, qui m’a fait redécouvrir Lovecraft. Sa préface nous donne les pistes de lecture à suivre, les chemins cachés au détour d’une phrase, d’un titre, et il peut être intéressant pour vous de la relire à posteriori une fois le voyage terminé comme moi je l’ai fait, car certains éléments ont un sens nouveau. Les notes de bas de pages qui parsèment le tout facilitent la compréhension globale et sont un véritable plus. Ici, Lovecraft n’est pas traité comme un auteur à la mode qui fait gagner de l’argent, mais bien comme un artiste, un esthète de la littérature à l’univers complexe et magique qui mérite d’avoir une traduction à la hauteur de son talent. Mnémos y ajoute un écrin de très belle facture qui rend le voyage d’autant plus agréable. L’hommage et le respect de l’oeuvre sont perceptibles à tous les niveaux, ce qui semble bien être l’objectif de cette présente édition, validé de bien belle manière. Et si d’avenir on me demandait quelle édition je recommande pour découvrir Lovecraft, je répondrai sans détour (désolé pour le jeu de mot, les fans du JDR comprendront) : l’intégrale MNÉMOS.

Note : 10/10

Ce qu’on en dit ailleurs : Albédo Au Pays des Cave Trolls

Ainsi s’achève notre ballade onirique, le réveil approche, on se retrouve très bientôt pour la suite des revues sur cette intégrale, en attendant, rendez-vous sur les chemins des Contrées du rêves, en bon rêveur que nous sommes, lecteurs d’imaginaire.

Bonsai!

Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs.

Les Ragots de la Taverne #6

Hello There !

Attendez, on va retirer le givre du clavier, ce sera plus pratique pour écrire. Chez vous aussi ça gèle ? Bon j’avoue que j’aurais préféré la neige qui est plus poétique à mon sens que les plaques de verglas luisantes et traitresses qui ne cessent d’apparaitre l’hiver chez moi. Sûrement un relent de mon enfance à la montagne où la neige était notre joie de l’hiver avec les jeux associés qui vont avec. Mais bref, pour l’heure il faut saler l’entrée de la Taverne si on ne veut pas glisser et mettre le client de mauvaise humeur à cause d’un derrière en compote. Ce client toujours prompt à vous incendier et vous tomber dessus alors que le bon sens aurait invité à la prudence. Eh oui, aujourd’hui il faut toujours bien préciser, rappeler, spécifier , justifier, parce que vous comprenez, faire fonctionner son cerveau, c’est compliqué, encore plus quand il s’agit de bon sens. À croire que les écrans ont tout simplement éradiqué notre faculté à réfléchir et analyser. Mais comment l’humanité peut-elle réussir à envoyer des téléscopes dans l’espace ?!

Les « Piliers de la création » photographiés par Hubble puis par James Webb. — Nasa/esa/UPI/SIPA

Il n’empêche, histoire de nous redonner la bonne humeur et la pêche, mon groupe préféré à sorti son deuxième single cette semaine, comme ça, bam! sans prévenir : Screaming Suicide.

Bon, ok, on repasse pour le côté joyeux, et je l’ai moins aimé que le premier single Lux Aeterna. Mais tout de même, 60 ans et toujours autant de rythme, de pêche, de tonicité dans l’exécution. Et un texte comme souvent très engagé. Mais là où il y a 20 ou 30 ans ils auraient juste balancé ça et débrouille toi pour en chercher le sens, gratte sous le vernis de la surface pour y révéler la vraie signification de notre chanson, désormais le clip s’accompagne d’un édito, une description afin de bien prévenir les gens : « attention on ne fait pas l’apologie du suicide, hin, au contraire, on veut aider ceux qui ne se sente pas bien ». Si dorénavant on est obligé de faire ça c’est bien parce que internet est accessible à tous, y compris et surtout aux enfants qui n’ont pas le bagage intellectuel suffisant pour comprendre et analyser la signification de tout ce qu’on y trouve. Alors plutôt que de mettre des avertissements sur les livres comme le souhaite Maxime Chattam – que j’aime beaucoup au passage – je préfererais qu’on trouve un moyen de faire comprendre aux parents qu’une tablette par enfant à la maison ce n’est pas une solution, ni leur rendre service.

La lecture est une question d’envie avant tout et peut permettre d’atteindre une certaine maturité. De toute façon il est plus facile de refermer un livre lorsqu’il devient dérangeant que d’arracher ses yeux d’une vidéo sur youtube lorsqu’un passage n’est pas approprié. Vaste débat je le sais, et c’est avec plaisir que Maxime Chattam peut venir à la Taverne boire un bon café pour en débattre.

Un autre débat a fait rage cette semaine, au delà de l’affaire D&D qui n’en finit pas de ne pas terminer, mais que par chez moi on boycotte plus que jamais, délaissant l’héroic fantasy pour des rivages plus horrifiques avec L’appel de Cthulhu, jeu pour lequel je compte continuer à présenter la gamme au travers de quelques articles et notamment sa version dérivée contemporaine, Delta Green, qui me hype de fou, ou encore Vampire du Monde des ténèbres dont j’ai déjà parlé également et qui mérite une exposition plus conséquente sur mon blog tant l’univers est unique. Non l’autre débat c’est cet article assez à charge du Figaro sur Levy et Musso, demandant lequel des deux est le plus nul. Pour info, je ne lis aucun des deux, et je ne pense pas que je les lirai un jour, pas du tout mon genre. Je ne me prononcerai pas sur leur qualité respective, mais que si l’article dérange, c’est probablement qu’il y a un malaise dans ce que l’édition propose aujourd’hui et comment elle le fait, et surtout dans ce que les gens consomment. Finalement le reflet de notre société pose question. Mais rassurez-vous, en leur temps des Huxley et Orwell ou encore plus tôt, des Flaubert et des Balzac, n’étaient pas très jouasses de ce qu’ils voyaient aussi, donc tout va bien, nous sommes toujours sur les même rails, le paysage et la destination n’ont pas changé !

Allez, bonsai !

Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs.

Un mois avec Lovecraft

8 décembre 2022. Kerbaden.

22h30. Je viens de refermer mon livre, Je Suis Providence de S.T. Joshi.

Un grand vide s’empare de moi alors que, mon livre encore entre les mains, je contemple fixement mon exemplaire des Montagnes Hallucinées & Autres Récits d’Explorations des Éditions Mnémos posé à gauche devant moi, sur la table basse du salon. Tremblotante à côté de mes livres empilés, la flamme de ma bougie parfumée ondule, faiblarde, avant de s’éteindre. Comme un signe. Je viens de passer un mois avec HPL et pour moi c’est comme s’il venait de mourir pour la seconde fois, seul, ignoré, oublié, sans descendance. Pourtant cette fois-ci, ce n’est pas tout à fait vrai. Cette fois-ci, j’étais là, j’ai été témoin, je l’ai accompagné, impuissant à changer quoi que ce soit à sa destinée, bloqué dans les couloirs du temps. Un témoin muet, inaudible. Un témoin touché au cœur.

Lire un auteur mort dont on connait les généralités communes est une chose, mais lire Je Suis Providence c’est comme le voir ressuciter pleinement, c’est vivre à son époque, prendre part à ses relations, ses expériences, son évolution, ses études, ses correspondances, son quotidien, pendant 47 ans. Alors l’accompagner jusqu’à cette fin si poignante après tant de mots partagés, c’est comme perdre un ami.

Je comprends – du moins je peux avoir une début d’idée – ce qu’a dû ressentir David Camus après plus de 10 ans passés à retraduire Lovecraft, parce que moi, après un mois complet à partager son quotidien et lui le mien, je suis parcouru de beaucoup d’émotions différentes allant de la tristesse à la consternation en passant par l’admiration et le rire.

Il est 22h30 et je n’ai pas envie de dormir. J’ai envie de prendre mon livre sur la table et relire une de ses nouvelles, la toute première que j’ai lu, La Cité Sans Nom. Me mesurer à nouveau à l’immensité de son talent littéraire. Et me perdre dans l’abîme du cosmos, sombrer jusqu’à n’être plus qu’un petit point, perdu parmi les étoiles…

8 Janvier 2023. Kerbaden.

Cette Préface a été écrite dans la foulée de la fin de ma lecture. Pour la première fois je voulais saisir l’instant. Pour la première fois je voulais écrire à chaud, le cœur encore saignant, ce qui me traversait. Au départ, je m’étais fixé l’idée de rédiger toute ma revue d’une traite car, oui, je ne voulais pas dormir. Je voulais rester encore un peu avec lui, à son chevet. Et vous vous demandez sans doute ce que j’ai fait après avoir écrit ce passage… nous en parlerons plus tard. En tout cas je n’ai pas pu tout écrire. Je me connaissais, je le savais. Il fallait laisser refroidir les cendres avant de fouiller dedans. Allez, suivez-moi, je vous emmène de l’autre côté de l’Atlantique, à Providence.

Hello There !

Une fois n’est pas coutume, seulement un mois après sa lecture, et dans la foulée des Onos Awards, où Lovecraft fut le grand vainqueur de 2022, je publie ma revue. C’est suffisamment rare pour être souligné. Vous verriez mes articles en attente, certains sont sur des livres lus il y a deux ans ! Mais au jeu de la mémoire et des notes, je m’en sors plutôt bien. Alors pourquoi écrire si vite sur ce livre qui m’a profondément marqué, à tel point que j’y pense encore malgré d’autres lectures entamées ? Pour graver dans le marbre cette expérience. Ce blog c’est un peu mon journal de lecture (j’y reviendrai plus tard), et autant je me moque dans quel ordre sont rangées certaines lectures, autant celle-ci j’ai eu besoin qu’elle soit ancrée temporellement, parce que pour moi, il va y avoir un avant et un après. On se remémore tous certaines choses par rapport au contexte, c’est l’une des mémoires dont nous disposons. Il arrive que, certaines fois, certains éléments disparaissent de cette mémoire contextuelle pour passer dans la mémoire à long terme, tout simplement parce que nous l’avons perdu. Hors ici, je ne le veux pas, cette revue est un témoignage, tout autant qu’un hommage. Une trace, infime soit-elle, dans l’immensité du net. Elle ne survivra pas à l’oeuvre de Lovecraft, je n’ai aucun doute, ni non plus je l’espère à ce livre colossale qui parle d’un homme avant tout.

Quatrième de couverture :

Howard Phillips Lovecraft (1890-1937) est un auteur qui fascine autant par son oeuvre que par sa personnalité. Ayant influencé avec ses récits fantastiques et horrifiques (comme L’Appel de Cthulhu) de nombreux écrivains comme Stephen King, ses fictions et sa vie ont été soumises à de nombreuses interprétations pas toujours exactes, véridiques et précises. 

Spécialiste des littératures de l’imaginaire et de Lovecraft en particulier, S.T.Joshi travaille sur sa biographie depuis plus de 20 ans. Par son érudition et son ampleur, elle est aujourd’hui considérée comme la référence au niveau mondial. 

Pour la première fois en France, sous la direction de Christophe Thill et avec le concours d’une équipe de dix traducteurs, cette biographie est proposée aux lecteurs. 

Traduit de l’anglais (américain) par Thomas Bauduret, Erwan Devos, Florence Dolisi, Pierre-Paul Durastanti, Jacques Fuentealba, Hermine Hémon, Annaïg Houesnard, Maxime Le Dain, Arnaud Mousnier-Lompré & Alex Nikolavitch.

Un Essai plusieurs fois tenté.

D’aussi loin que je me rappelle, dès la sortie du livre, j’ai eu envie de le lire. Je me le suis donc procuré en Ebook. Mais le nombre de pages, monstrueux sur ma liseuse, et les débuts généalogiques très factuels ne m’avaient pas permis de rentrer dedans, car il ne s’agit pas ici d’un roman. Début novembre, ça faisait deux mois que je ne lisais plus suite à un covid plutôt retord qui m’avait fatigué au-delà de ce que je pouvais imaginer. Alors que je préparais mes petites commandes de Noël, le site de la Fnac me proposa d’autres produits basés sur mes achats précédents. Le premier sur la liste était le tome 1 de Je suis Providence. Hésitant, vu mon peu d’engouement pour la lecture à ce moment là, l’idée me vint que si je n’avais peut-être pas réussi à le lire c’était à cause du format numérique. Dans un geste réflexe je l’ajoutai à mon panier, en me disant que je verrais bien, que ça se tente. De plus, il ne s’agissait ici que du format semi poche, qui était moins épais et peut-être plus digeste. Il faut comprendre mon désarroi de l’époque : Je suis un amoureux des pavés, pourtant celui-ci me faisait peur et m’avait même repoussé en Ebook. Cependant j’étais dans un « ras le bol » général, un trop plein de fantasy, par rapport au JDR et mes lectures, plus rien ne me bottait, la dépression, ce monstre sur le seuil, guettait à ma porte. Lire une bio allait peut-être me donner de l’air, de plus je n’étais pas obligé de me forcer à tout avaler, je pouvais la picorer. Je ne savais pas que ce livre allait m’entraîner par-delà le mur du sommeil et de mon heure de coucher habituel, moi qui n’arrivais plus à veiller le soir. Au final, je l’ai dévoré d’une traite, enchaînant les deux tomes, dans une boulimie livresque comme je n’en avais pas connu depuis longtemps. Mais alors pourquoi cela a-t-il été magique ?

Tout commence à Providence.

Pour situer le contexte et mes essais ratés, je me dois d’expliquer ma rencontre avec celui que je pensais être le reclus de Providence à l’époque. Notre premier contact eut lieu dans ma jeunesse lorsque Stephen King le cita dans une préface et qu’un ami me parla du Jeu de Rôle L’Appel du Cthulhu auquel il était en train de jouer. Je fis bien le lien avec le titre instrumental éponyme de Metallica sur Ride The Lightning mais ça en resta là. Plusieurs années plus tard, la culture littéraire en plus, je situais largement Lovecraft, mais la fantasy ayant jeté son voile rouge sur moi, je ne pris pas le temps de lire son oeuvre, jusqu’a ce qu’on me propose de faire d’une pierre deux coups et de découvrir la lecture en audio et HPL. J’ai déjà parlé de cette expérience et je ne vais pas y revenir. J’étais aspiré, mon âme était perdue. 4 ans plus tard, toute l’intégrale Bragelonne dévorée – et encore plus tard, je prends davantage de plaisir à lire l’édition de Mnémos dans la traduction de David Camus, plus complète, plus proche de l’original, mais ça c’est une autre histoire à venir bientôt – , je ne pouvais me contenter d’en rester là. Il faut me comprendre, je suis un peu obsessionnel : quand quelque chose me fascine, il me faut creuser, il faut que j’en sache plus sur le sujet qui me taraude, et si c’est une oeuvre, je me dois de connaitre son auteur, son contexte et son processus de création. Pour deux raisons, tout d’abord j’ai une soif de connaissance inextinguible. Lorsque la porte a été ouverte, ma curiosité, ma soif de découverte sont dures à étancher. Tant que je n’ai pas la sensation d’avoir fait le tour d’une question, je passe difficilement à autre chose. Ensuite, tout simplement parce que je n’aime pas dire des âneries sur un sujet que j’aime, et en ce qui concerne Lovecraft beaucoup de choses ont été dites et peu sont vraies.

Beaucoup de gens imaginent Lovecraft, enfermé entre ses quatre murs, volets clos, écrivant compulsivement des textes aux sens étranges, misanthropiques, pessimistes, en proie à toutes sortes de pathologies mentales, dépressif, mélancolique, incapable de nouer de contacts normaux avec ses semblables. Certains croient même qu’il a en sa possession un étrange livre auquel il fait référence dans ses textes, Le Nécronomicon d’Abdul Alhazred, et qu’il a percé des mystères qui l’ont rendu fou. D’autres disent qu’il n’a jamais quitté Providence, ville de taille moyenne du Rhode Island, située entre New York au sud et Boston au Nord.

S. T. Joshi né en 1958, découvrit Lovecraft à l’âge de 13 ans. Captivé par ces récits et la prose surnaturelle de HPL, il se lance lui-même dans l’écriture de fictions avant de changer d’avis à l’age de 17 ans et de vouloir devenir critique littéraire. Il choisit de rejoindre l’université de Brown à Providence, réputée posséder plusieurs documents manuscrits de Lovecraft, dans le seul but de rédiger une idée de livre qui le travaille : H. P. Lovecraft: Four Decades of Criticism (1980). Totalement sous l’emprise de l’oeuvre et fasciné par l’homme, il continue de travailler et de publier sur Lovecraft, Lovecraft’s Library (1980; rev. ed. Hippocampus Press, 2002), An Index to the Selected Letters of H. P. Lovecraft (1980; rev. 1991), Selected Papers on Lovecraft (1989), and An Index to the Fiction and Poetry of H. P. Lovecraft (1992). Il édite également les mémoires de Sonia Davis The Private Life of H. P. Lovecraft (1985) et Collected Poems (1988) de Donald Wandrei, contemporain et ami de Lovecraft. Le temps avançant, sa connaissance de l’auteur devint très approfondie et assez complète. Ses recherches constantes l’amenèrent à exhumer des lettres ainsi que des textes manuscrits originaux, permettant de rééditer dans leurs justes formes certains des plus grands récits de Lovecraft, passablement déformés dans les mains d’Arkham House. Son travail de recension méticuleux et précis de tout ce qui touche au Maitre de Providence l’incita naturellement à s’intéresser aux autres auteurs de fictions, contemporains ou influenceurs, gravitant autour de Lovecraft, complétant ainsi son panorama littéraire de fictions fantastiques. En 1993 il se lance dans la rédaction de ce qui allait devenir LA biographie de référence d’un auteur désormais célèbre grâce en grande partie à son travail : Je Suis Providence. En 2010, Hippocampus Press publie une version intégrale et mise à jour de la biographie, suite aux découvertes réalisées entre temps. Il aura fallu plusieurs années pour que ce livre arrive en France grâce à l’impulsion de passionnés et un crowfunding. Je vous renvoie à l’article d’Actu SF sur la genèse de ce livre monumental dans tous les sens du terme. Bien qu’on voit à quel point ce livre n’est pas un livre comme les autres, pourquoi est-il à ce point un must pour tous les fans de Lovecraft ?

Du Gentleman Colonial au Cosmicisme.

Pour comprendre l’oeuvre d’un auteur, je pense qu’il faut en saisir sa pensée, sa vision philosophique. Nous sommes le produit de notre éducation et de notre époque. Lovecraft n’échappe pas à la règle bien qu’il le réfuta pendant très longtemps et se voulait un gentleman du XVIIIe siècle. Il n’hésitait pas d’ailleurs à signer Grandpa nombreuses de ses lettres, signifiant ainsi qu’il se sentait vieux avant l’heure. Pour autant qu’est-ce qui a pu le conduire à tant de décalage et souhaiter être né deux siècles plus tôt et comment a-t-il pu finir par développer un schéma de pensée conduisant à son cosmicisme ?

« le passé est réel — il est tout ce qui existe ». Pour Lovecraft, le futur est une inconnue tant il est imprévisible ; inversement, le présent n’est que le résultat inévitable de tous les événements passés, que nous en soyons conscients ou non.

S. T. Joshi

Le début du livre s’attarde à nous expliquer les racines de Lovecraft, que ce soit tout d’abord sa terre natale, le Rhode Island, aussi bien que sa généalogie. Passé ce préambule qui a finalement fini par me happer, notament pour sa dimension historique sur les origines de l’état d’implantation de l’écrivain, on entre dans le vif du sujet avec une description de son environnement familial. Issu de l’aristocratie de Providence, il se retrouve très vite orphelin de père dans des circonstances dramatique et c’est son grand père maternel, Whipple Phillips, qui va se charger de son éducation. Cette figure paternelle de substitution, qui ne manque pas de ressource financière étant un homme d’affaire audacieux, ouvrira la perception et développera la curiosité du jeune Howard notamment grâce à une bibliothèque fournie située dans les soupentes du grenier et n’hésitera pas à passer tous les caprices de son petit-fils lorsque ce dernier voudra obtenir certains accessoires pour ses études. D’un un autre côté c’est dans ce terreau familial aristocratique, que les germes du racisme de Lovecraft vont naitre. Élevé dans l’aryanisme, qui n’était pas encore la théorie que les nazis en feront, Lovecraft, comme beaucoup de ses contemporains, pense à tort que la race indo européenne est une race culturellement supérieur, et je simplifie beaucoup.

Vers six ou sept ans, j’étais un païen fervent, tellement intoxiqué par les beautés de la Grèce que j’en vins à croire à moitié aux anciens dieux et aux esprits de la nature. J’ai véritablement édifié des autels à Pan, Apollon et Athéna, et j’ai guetté au crépuscule, dans les bois et dans les champs, les dryades et les satyres. Un automne, je crus fermement avoir aperçu des créatures sylvestres en train de danser sous des chênes ; une sorte « d’expérience religieuse »aussi vraie à sa manière que les extases subjectives des chrétiens. Lorsqu’un chrétien me dit qu’il a « ressenti » en lui la réalité de son Jésus ou de son Jéhovah, je peux lui répondre que j’ai « vu » Pan aux pieds fourchus et les soeurs des Phaëtuses d’Hespérie.

H. P. Lovecraft

Car le petit Lovecraft, bien qu’il vive reclus, n’allant pas à l’école, est une personne vive d’esprit. À deux ans, il récite déjà de la poésie. Grandissant, il se passionne tout d’abord pour l’antiquité. Ses lectures des philosophes grecs et romains l’inspirent et il commence à rédiger des poèmes. Puis vers ses huit ans, il découvre les sciences. Sa soif de connaissance inextinguible sur ce nouveau sujet d’étude et de passion le pousse à réclamer un nécessaire de chimie pour des expériences et un téléscope pour regarder les étoiles. Ahh, les étoiles. Tout petit déjà, il est attiré par l’immensité du ciel. Un amour qui ne se démentira jamais. Il commence à rédiger très tôt des journaux amateurs qu’il distribue au sein de sa famille et de leurs amis sur ses découvertes scientifiques, il propose des almanachs précis sur les mouvements stellaires. Un peu en marge, celui qu’on regarde avec distance depuis le bord du champ alors qu’il a l’œil à son téléscope, est couvé par sa famille. Malheureusement, la fortune familiale s’effondre et sa mère et ses tantes se voient contraintes de déménager. L’heure d’essayer d’aller à l’école à sonner, et Lovecraft envisage une carrière d’astronome. Malheureusement, il est un élève moyen en mathématiques.

Adieu carrière scientifique, d’ailleurs il ne sent pas la santé de continuer à aller à l’université. Pour autant il n’est plus le reclus qu’il a été. Il s’est fait des amis. Ils ont des jeux, ils créent une association de détective tant il se passionne pour les aventures de Sherlock Holmes. Car il lit beaucoup. De tout, y compris du pulp magazine, littérature populaire bien souvent sans envergure. Alors qu’il traverse une période dépressive dûe à son incapacité à réaliser son rêve et son échec scolaire, il écrit dans le courrier des lecteurs de certains pulps et à force de critiques, parfois acerbes voire comiques notamment sur l’astrologie, il va nouer des contacts qui vont lui permettre de se lancer dans le journalisme amateur. C’est ce tremplin qui permettra à Lovecraft d’envisager l’écriture comme remède à ses névroses. Je condense et schématise volontairement car le but de cette revue n’est pas de vous raconter en détail le livre, mais de vous montrer à quel point le texte est riche, détaillé, précis et documenté.

Facette méconnue de Lovecraft, il possède un humour décapant, la preuve avec cette réponse faite à un astrologue dénommé Hartmann, ici déformé en Francisco artmano dans un courrier des lecteurs :

«Le transit croisé de Jupiter et d’Uranus au-dessus du soleil et de la lune alternativement radiaux le 9 mars 2448 prouve sans ambiguïté que le monarque américain sera renversé cette année-là lors d’un soulèvement populaire emmené par le général José Francisco Artmano et qu’une nouvelle république sera fondée, la capitale étant ramenée de Mexico à Washington. Plus terrible encore, le trigone collusif quaternaire de Mars, Mercure, Vulcain et Saturne, dans la 13e maison du Cancer le 26 février 4954, sert de signe avant-coureur immanquable pour nous montrer le jour horrible où notre Terre périra infailliblement par suite de l’explosion subite et inattendue des gaz volcaniques qu’elle renferme.»

« […] le calcul du transit à rebours alterné excentrique de la future projection de la comète de Delavan autour du carré quartile progressé de l’inclinaison prolongée de l’orbite rétrograde de Saturne éclaircit la situation confuse en l’espace d’un instant, élucide le problème d’une manière aussi simple qu’évidente et rend à l’homme l’espoir sans lequel le cœur se briserait. » Bref, la comète de Delavan heurtera la Terre 56 ans avant l’explosion de notre planète et emportera tous les habitants du globe sur sa queue pour les emmener vivre « à jamais […] dans la paix et l’abondance » sur Vénus. Voilà le genre humain sauvé ! Tout le monde, cependant, n’en sortira pas indemne :

Je m’aperçois à mon grand regret que des fragments de l’explosion de la Terre en 4954 frapperont la planète Vénus où ils créeront d’énormes dégâts et causeront de graves blessures au señor Nostradamo Artmano, le descendant en droite ligne de notre talentueux professeur Hartmann. Le señor Artmano, sage astrologue, sera touché au crâne par un gros volume d’astronomie soufflé depuis la Bibliothèque publique de Providence, et son esprit se ressentira tellement de sa commotion cérébrale qu’il ne sera plus en mesure d’apprécier les préceptes divins de l’astrologie

H. P. Lovecraft, complété et cité par S. T. Joshi.

Pour autant ces éléments nous montrent deux choses et répondent à nos questions. Lovecraft était issu d’un milieu bourgeois qui véhiculait encore les valeurs coloniales du XVIIIe siècle, avec notamment tous les travers que l’on accorde à l’auteur comme son antisémitisme, son racisme notoire, et son caractère hautain. Néanmoins, Joshi, par sa présentation et sa prise de position affirmée et subjective, nuance ce tableau par une description précise des mœurs de l’époque, un travail de recherche documenté avec preuves à l’appui. Il analyse de manière perspicace le terreau familial de Lovecraft, nous livrant ainsi une compréhension nouvelle de sa personne, avec citations à l’appui et extraits de lettres. Pour autant, il ne l’excuse pas. Loin de là. Comme il le souligne dans la préface, son travail n’est pas fait pour glorifier l’homme mais bien pour restituer la vision de l’écrivain au travers du prisme de son époque avec tout l’arrière-plan politique, économique, intellectuel, social et culturel nécessaire. Son travail de biographe, aussi minutieux que celui d’un historien, le pousse obligatoirement à prendre parti, permettant ainsi au lecteur de pouvoir se forger sa propre opinion par accord ou désaccord avec l’une ou l’autre des positions. L’étude de sa pensée philosophique que l’auteur considère, » non seulement comme intéressante en elle-même, mais aussi comme formant la base d’une grande partie de son œuvre ainsi que de son comportement personnel » nous permet de voir avec justesse l’homme qui se cache derrière les mots, et ses textes prennent un sens nouveau. Il veut permettre à Lovecraft de pouvoir nous transmettre sa vision avec justesse, puisqu’il ne peut plus le faire lui-même.

Ce à quoi je fais allusion ici, c’est la cristallisation esthétique de ce sentiment brûlant & inextinguible où l’émerveillement se mêle à l’oppression, où l’imagination sensible ressent lorsqu’elle se confronte, avec ses limitations, à l’abîme vaste & provocateur de l’inconnu. Voilà qui a toujours été l’émotion majeure de ma psychologie, & bien qu’elle soit moins répandue chez la majorité de nos concitoyens, il s’agit néanmoins d’un facteur permanent & clairement défini dont peu de personnes sensibles sont entièrement dépourvues.

H. P. Lovecraft

Alors comment Lovecraft finit-il par tendre vers le cosmcisme, ce mouvement de pensée qui postule qu’il n’y a pas de présence divine connaissable dans l’univers et que les humains sont particulièrement insignifiants dans l’infini intergalactique ? À la lueur des éléments présentés, on déduit aisément les causes et les raisons qui conduisirent le maître de Providence à adhérer à cette philosophie. À mon sens, Lovecraft avait une hyper sensibilité aux choses qui l’entouraient, il était doté d’une très grande conscience de lui-même ainsi que de l’univers et de son immensité. Au fur et à mesure que sa connaissance scientifique croissait, un sentiment d’insignifiance, renforcé par sa propre expérience de vie, s’installa en lui. Fasciné par les vastes espaces interstellaires, et consterné par les plates préoccupations humaines, au sein d’une époque dans laquelle il se sentait en décalage, il bâtit cette doctrine qu’il entreprit de verbaliser dans ses écrits. Mais plutôt que de désespérer, au contraire, il essaya de profiter un maximum de son temps pour continuer à apprendre, s’émerveiller.

Tout finit à Providence.

Sa nature tripartite : l’amour de l’étrange et du fantastique, l’amour de l’ancien et du permanent, l’amour des vérités abstraites et de la logique scientifique.

S. T. Joshi

La vie de Lovecraft se déroule sous nos yeux. Parfois détestable, parfois poignant, souvent drôle et pertinent, l’homme ne laisse pas insensible que ce soit par ses prises de positions assez extrêmes, propre à la jeunesse par méconnaissance du monde, ou par son incacapcité chronique à rentrer dans le moule d’une société qui aime formater les gens afin que chacun y joue son rôle. Il existe cependant un point de bascule assez frappant dans sa vie, un moment charnière qui transformera l’homme : son passage à New York. Il y passera deux ans suite à son mariage avec Sonia Davis, un échec retentissant pour celui qui est assexué et ne vis que pour la transcendance intellectuelle. Son racisme et son antisémitisme atteignent des hauteurs répugnantes qui se manifestent notamment dans un texte écrit à cette période alors que sa production littéraire au sein de la mégalopole est assez maigre, Horreur à Red Hook. La ville cosmopolite l’étouffe, seuls ses amis, intellectuels comme lui, lui permettent de tenir le coup. Pourtant, à bout nerveusement, et appauvri au delà de l’inimaginable, nous le plaignons. Comment peut-on vivre avec seulement 2 dollars pour se nourrrir par semaine ? Comment supporter de le voir se faire voler ses costumes alors qu’il n’a déjà pas d’argent et que son apparence et inestimable pour lui ?

En fait, il y a peu de personnes inutiles & ratées qui me découragent et m’exaspèrent plus que ce vénérable Ach’Pé-El. Je connais peu de personnes dont les accomplissements sont si éloignés de leurs aspirations ou qui, en général, ont encore moins de raisons de vivre. Il me manque toutes les aptitudes que je souhaiterais avoir. J’ai perdu, ou vais probablement perdre, tout ce que je chéris. D’ici une décennie, à moins que je ne puisse trouver un travail qui me rapporterait au moins dix dollars par semaine, je devrai choisir le chemin du cyanure, puisque je ne pourrai plus garder les livres, les tableaux, les meubles et autres objets familiers qui sont ma seule raison de rester en vie […]

H. P. Lovecraft

Il faut parfois pourtant traverser les flammes de l’enfer, pour renaitre : lui a été forgé dans les braises de New York. Son retour à Providence, avec tout ce qu’il affectionne, ses batisses coloniales, ses jardins apaisants, ses sept collines qui dessinent leurs profils dans l’encadrement de sa fenêtre, sera l’eau qui refroidit le fer chauffé à blanc. Un nouveau Lovecraft apparait, et ses textes ne seront plus jamais les mêmes. C’est là, dans les mois et années qui suivent le retour, qu’il va écrire deux de mes textes préférés : L’affaire Charles Dexter Ward et Les Montagnes Hallucinées. Le premier n’est ni plus ni moins qu’autobiographique en un sens tant les références à lui-même sont nombreuses, et bien que Joshi nous présente pour chaque période une étude minutieuse et détaillée de chaque texte dans leur contexte, apportant des éléments que seules les sources personnelles de Lovecraft, telles des lettres, des carnets, des notes griffonnées nerveusement peuvent étayer, il n’est nul besoin de cette analyse pour comprendre, après ce que nous venons de lire, en quoi ce texte est très personnel, tel une thérapie. Lovecraft évolue. Ses nombreuses relations épistolaires, car il ne refuse jamais de répondre à quelqu’un qui le contacte, cumulant jusqu’à presque 97 entrées de correspondances en cours à la fin de sa vie, lui permettent de revoir sa pensée philosophique, d’affiner sa compréhension du monde, à tel point que le Républicain aryaniste conservateur convaincu du début du XXe siècle va se transformer en socialiste, votant même pour Roosevelt avec son New Deal à l’orée de sa dernière décennie. Il révise sa position sur les gens de couleurs et devient plus tolérant au fur et à mesure qu’il s’ouvre et voyage, au point qu’il souhaite lui-même que certains écrits de jeunesse dans son journal amateur, The Conservative, puissent disparaitre. Joshi nous décrit dans le détails ses excursions et voyages à partir de carnets dédiés écrits de la main même de HPL, dont le plus célèbre qui fut édité rapporte un voyage au Québec qui changera drastiquement son jugement sur les non anglo-saxons qu’il détestait tant auparavant.

L’homme grandit. Le carcan étouffant de son éducation et du terreau de sa jeunesse se fissure mais trop tardivement : il a gâché son temps il le sait. La pauvreté s’insinue de plus en plus, au fur et à mesure que les années passent, et ce qui pourrait lui permettre de subvenir à ses besoins, à savoir son talent et sa culture littéraire, il refuse de les brader. Il n’a même pas soumis L’affaire Charles Dexter Ward aux maisons d’éditions alors que certaines s’intéressent, sans qu’aucun projets n’aboutissent, à ses écrits et réclament un roman. Il a réussit à comprendre qu’au travers du fantastique, de la SF ou de l’horreur, les genres littéraires qui l’attirent, il pouvait faire une critique sociale, et présenter sa vision de la position de l’homme dans l’ordre des choses, notamment à partir de ses lectures scientifiques qui à l’époque exploraient beaucoup de directions différentes (certaines sont d’ailleurs aujourd’hui démenties, notamment par Einstein). Son érudition scientifique qui transparait dans ses textes n’est pas feinte et trouve sa source dans ses passions de jeunesses et des rêves irréalisés. Sa vision artistique ne se marchande pas sur l’autel du mercantilisme et du capitalisme qui selon lui salit tout. Il est un esthète et en tant que tel préfère mourir avec ses idées plutôt que de se vendre. Il s’abreuve de la substantifique moëlle de chaque livre, chaque échange, chaque voyage, quitte à sacrifier son alimentation. La connaissance comme sustentation. Malheureusement, et j’aimerais pourtant que ce soit vrai, la connaissance ne permet pas au corps de survivre, et sans corps, pas d’esprit. Lovecraft, qui a finit par réussir à trouver des motifs de satisfaction et de plaisir dans la vie développe un cancer de l’intestin grêle diagnostiqué beaucoup trop tard et meurt, stoïque et silencieux tel un gentleman, le 15 mars 1937. Il est incroyable de constater qu’il a tenu jusqu’à bout à son statut d’intellectuel, au point de tenir un journal de son hospitalisation jusqu’à ce qu’il ne puisse plus écrire, déchiré par la douleur. C’est lorsque le New York Times publie son carnet de malade quelques jours plus tard, que ses amis New Yorkais apprennent la triste nouvelle.

« douleur — somnolence — douleur intense — repos — grande douleur. »

Entrée du journal du 2 mars 1937

Sa première publication posthume, mais certainement pas la dernière, nous en sommes témoins. Howard Phillips Lovecraft est enterré au cimetière de Providence – Rhode Island, en petit comité avec son unique tante restante, sa mère étant morte de folie en 1921. Il avait 47 ans.

La résonnance.

Alors que nous approchons de la fin de cettre revue, qui est allée bien au-delà de ce que j’aurais imaginé, j’aimerais répondre à cette question posée en début d’article : pourquoi ce livre de près de 1800 pages, si j’additionne le total des deux volumes, m’a-t-il autant marqué ? En quoi l’histoire d’un auteur méconnu de son vivant, raciste, mysogine par endroit, mais aussi sensible, intellectuel, intelligent, cultivé, et curieux a-t-elle pu me fasciné ?

Tout d’abord que les choses soient bien claires : je ne cultive aucune forme de racisme ou de mysoginie quelconque, mais ça je pense sans doute que ça transparait dans ce blog. L’oeuvre d’HPL, m’avait frappé bien avant que je me confronte à l’homme. Son cosmicisme résonnait en moi de manière particulière, car très tôt j’ai développé de mon côté semblabe philospophie alors même que je ne l’avais pas lu, ni été influencé. Et c’est là une des pierres angulaires de mon expérience de lecture : la résonnance de la perception du monde. De bien des manières ce livre m’a permis de comprendre comment son expérience de vie à pu lui permette de produire une oeuvre unique, d’une qualité rare. Comment sa sensibilité, son raffinement ont été une malédiction et une bénédiction. J’y ai vu bien des choses. Je me suis senti beaucoup moins seul d’un seul coup. Ce que certains appelle pessimisme, moi je l’appelle réalisme. Grâce au travail sensationnel de S. T. Joshi, tellement bien agencé et fluide dans sa narration, j’ai pu pendant un mois partager le quotidien de quelqu’un qui hormis des travers détestables propres à son époque, était d’une rare intelligence, d’une profonde sensibilité, dans une grande détresse parfois, mais qui plaçait l’intellectuel au dessus de tout. Il a toujours su garder son flegme tout britannique, lui qui prêtait allégeance à la couronne d’Angleterre. Cette personnalité m’a vraiment interpellé, résonnant profondément quant à ma philosophie, et ma vision du monde.

Pour encore plus mettre en balance ce que je viens de dire, ma relectrice N°1 me fait remarquer que je devrais peut-être, au vu du pavé qui s’annonce à lire pour vous, découper ma revue et la publier en deux parties, en faire un autre article pour plus tard. Non, je ne le veux pas. Ceci est ma trace, ma petit oeuvre à moi, modeste, dans l’infini de textes qui peuplent notre monde, et s’il il est trop long pour vous, trop indigeste, tant pis. Tout comme Lovecraft, le seul lecteur que j’ai en tête lorsque j’écris, c’est moi. Et pour ça je ne transigerai pas avec ma prose.

Pour clore cet article, je dois vous confier que suite à cette lecture beaucoup de chose me sont passé par la tête. Comme je l’ai dit en ouverture, ce soir là lorsque j’ai terminé cette biographie, je ne pouvais le quitter, et mon esprit vagabonda un moment avant de prendre mon livre et de lire La Cité Sans Nom. Tout en lisant me vint une idée, une vision. Tout d’abord je repensai à cet expérience de journalisme amateur. Et si mon blog était mon journal amateur ? Et si cet espace que j’ai depuis bientôt 5 ans était cet endroit où je pouvais y transmettre ma vision du monde ? Ainsi renaisse les phénix. Puis dans la continuité un autre élément me percuta. Adolescent je rêvais de vivre aux USA, ou du moins de les visiter. À 45 ans je n’ai toujours pas concrétiser ce rêve. Faute d’opportunités, de moyens. Et si ? Et si ce premier voyage là-bas, avant de me conduire dans le Maine, que j’ai beaucoup parcouru en livre à cause d’un autre auteur, passait, pour sa première étape, par Providence, avant de remonter au travers de la Nouvelle Angleterre, via Kingsport, Dunwich, Arkham puis vers Bangor. Bien sûr, si j’arrive jusque là…

Conclusion

Pourquoi cela est-il magique ? Exploitée minutieusement, cette correspondance monumentale permet de retracer le fil quasi quotidien de la vie de Lovecraft tant elle fourmille de détails, de sa liste de course New Yorkaise avec les prix correspondants aux horaires des changements de car lors de longues excursions.

Joshi nous expose son quotidien et le met en parallèle avec son oeuvre. Tel le cycle de la vie, dont il estimait n’être qu’un des multiples grains insignifiant de passage, il a été inspiré par d’autres comme Chambers, Bierce, Dunsany, Poe, puis dans une perpétuation, offrit ses idées, son oeuvre à l’imitation, partageant son univers avec Robert E Howard, Clark Ashton Smith, Robert Bloch, August Derleth – que je ne porte pas particulièrement dans mon coeur, même avant la lecture de ce livre – chacun rajoutant sa personnalité et sa sensibilité par dessus, et il nous invite, nous, maintenant, à perpétuer la fiction d’horreur fantastique, à reprendre le flambeau et à faire nôtre ses yog sotthtories, comme il les appelait.

Je suis Providence est une biographie colossale sur un auteur devenu incontournable et qui je l’espère à présent est immortel, à la manière d’un shakespeare ou un Hugo. S. T. Joshi nous restitue sa vie et sa philosophie, tant dans leurs aspects négatifs que dans la manière dont il a transformé la littérature. Le Maître de Providence s’avère être un commentateur avisé et piquant des événements de ce début de XXe siècle. Sous la plume du biographe, le quotidien s’écrit, l’auteur fantastique devient humain avec tout ce que cela implique. Nous sortons de cette expérience avec de nouvelles clés de lecture quant à son oeuvre. Les mythes mensongers nés à la fin des années 50, malheureusement véhiculés en grande partie par celui qui permit que son oeuvre fut publiée, sont battus en brèche, pulvérisés. Le reclus de Providence, n’était finalement pas si reclus que ça. Mais pour le découvrir, il vous faudra faire comme moi, et prendre le car. Il parait que le chauffeur vient d’Innsmouth. Vous verrez, il est sympa. Alors qu’attendez-vous ? Montez. Regardez, il n’y a pas de lune ce soir, on voit très bien les étoiles. D’ailleurs, là-bas dans le champs, un homme nous fait au revoir, debout près de son téléscope.

Note : 11/10

Bonsai!

Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs.

Les Ragots de la Taverne #5

Hello There !

Quelle semaine, mais quelle semaine ! Mais allez-y entrez. Je vous sers votre café. Par contre essuyez-vous les pieds, on est dans une taverne ici, pas un de ces pubs anglais à bière avec les poches qui vont avec. Cultivons le raffinement aussi bien que mon café l’est sous les lattitudes ensoleillés.

Certaines ont osé parler de bar en ce qui concerne mon honorable établissement. Jamais ses chèvres ne rentreront chez moi c’est sûr. Mais je trouve qu’il y a du panache dans son bilan, à défaut de café. Et j’aime son allusion à peine voilée aux pratiques commerciales d’aujourd’hui qui consistent à publier un auteur non pas pour la qualité de ses textes, mais parce qu’il représente une minorité, ou un étendard en vogue. Bien évidemment Robin Hobb n’est pas un homme. C’est une femme aujourd’hui… mais qui était un homme avant ! Ah, le transgenre. J’ai rien contre puisque je suis pour la liberté de chacun vous le savez. Par contre, ce que je n’aime pas, c’est qu’on me bassine avec les particularités de chacun. On ne peut pas foutre la paix aux gens, minorité ou pas ? Je suis rôliste. Je fais partie d’une minorité, pourtant je ne brise pas menu les rouleaux des gens pour que les ouvrages de jeu de rôle soient mieux représentés dans les librairies. Et je pourrais. Il y a bien des livres de cuisine, des livres de bien-être, des livres de sport, des livres sur les bagnoles, alors pourquoi pas du JDR ? Pour moi, chacun a le droit de vivre ses aspirations, ses rêves, ses envies comme il l’entend à partir du moment où sa liberté n’empiète pas sur la liberté des autres. Lorsqu’on tente d’imposer son mode de vie, sa vision, on devient ce qu’on tente de combattre bien souvent. En parlant d’inclusivité et de Dragons. L’ancien, plus si vénérable, a choisi que son trésor sous Erebor n’était pas suffisant. Je ne vais pas rentrer dans des détails juridiques complexes et sûrement de peu d’intérêt pour vous, mais pour la faire courte, Wizard of the coast, l’éditeur du jeu de rôle le plus célèbre, revenu à la mode après une sacrée traversée du désert grâce à des séries comme Stranger Things, a décidé que dorénavant tous ceux qui utilisent l’Open Game License (un document qui permet d’utiliser gratuitement une partie du système de jeu) devrait payer des royalties en fonction de leurs revenus. Et pour justifier leurs intentions ils invoquent quoi ?

L’inclusivité..

Pathétique est le mot qui me vient à l’esprit. Sous couvert de l’inclusivité, qui est un joli gros arbre derrière se cacher ou encore un magnifique fourre tout pour justifier ses actions mercantiles ou politiques, ce dragon aux écailles rutilantes, en oublie ceux qui lui ont permis de continuer à exister. C’est le rescapé qui assassine son sauveur, le naufragé qui empoisonne l’équipage qui l’a récupéré en mer. Pour ma part, cela fait déjà longtemps que je ne joue plue à D&D mais à d’autres systèmes et mes propres univers. N’empêche que je suis écoeuré par tant de cupidité.

Si vous voulez en savoir plus sur la question, je vous renvoie vers l’article de mon confrère Xapur, qui m’a devancé d’une journée (la Taverne n’ouvre pas le samedi) sur la question et qui est bien plus complet.

D’ailleurs n’hésitez pas à parcourir son blog de jeu de rôle, il a plein d’éléments intéressants pour ceux qui ne connaissent pas.

Je me rappelle l’époque où je visitais son blog de voyage dans l’univers du Seigneur des Anneaux sur Lord of The ring Online, alors que j’y jouais aussi..Tiens, quitte à cotoyer des dragons, je vais aller y faire un tour, ceux-ci ne me prennent plus mon argent depuis longtemps, je me suis abonné à vie à ce jeu il y a plus de 10 ans pour 110 €, et j’ai fait une affaire.

Bonsai !

Edit: Je tiens à préciser que sous couvert de Troll – des Cavernes – , Robin Hobb a bien voulu, à l’insu de son plein gré, servir de référence à mon propos. Je suis un grand fan de ce qu’elle écrit, ce qu’elle véhicule, de sa vision du monde. Pour autant, j’avoue que quand j’achète un livre, je ne suis pas en train de calculer si c’est un homme ou une femme qui l’a écrit, parce que le talent et l’intelligence du propos n’ont pas de genre, de couleur de peau, d’inclinaison sexuelle. Sur ce, bon dimanche !

Prévision 2023

Hello There !

Dans la foulée du bilan, La Taverne, en pleine effervescence, balance sans aucun complexe ni aucune annonce préalable ses prévisions 2023. Comme ça. Je me suis dit que pour éviter la ruée, les spéculations racolleuses et le tout people qui campe devant ma porte 3 jours avant – mais quel monde de crétins fous – , il valait mieux faire comme Metallica avec M72, son prochain album, et garder secret la date de sortie des prévisions. Et puis ça m’évite de tomber en pénurie de café comme mon Mac Do qui est toujours en rade de jus d’orange. Je n’aime pas faire faux bond à mes visiteurs.

Mais du coup que prévoit-on à la Taverne ? La fin de la civilisation occidentale ? La découverte d’une cité préhumaine ? Nous vivons une sacrée époque de surproduction culturelle, et j’ai l’impression qu’on tente de nous faire enquiller chaque nouveau produit comme des petits fours, pour ne pas avoir le temps de se rendre compte à quelle point le goût du précédent était merdique. Heureusement, quelques maisons d’édition protègent encore un savoir faire et une sélection de qualité. Quoiqu’il en soit à la Taverne, vous le savez, on est très sélectif. La vie est courte, et me faire gaver comme une oie dans un but purement mercantile par un marché sans cesse alimenté et en constante expansion, non merci. Il peut m’arriver d’avoir un coup de cœur pour une sortie ou que ma curiosité soit titillée au point d’acheter, mais d’une manière générale je ne fonctionne pas comme ça. La hype a peu d’emprise sur moi. Mon entrainement Jedi sans doute.

Tout ça pour dire que je sélectionne avec soin les livres que j’achète et je lis. Ça ne m’empêche pas de réussir à pondre une liste d’Envies De Lecture. J’avoue je ne dis plus PAL, je trouvais que ça avait un caractère obligatoire, respecter un ordre, des délais, Pile De Dossier à traiter au coin du bureau. Alors que envie, ben… On le sait, les envies ça va, ça vient. La lecture est un plaisir, pas une contrainte. Après chacun fonctionne comme il lui plait, mais moi la formulation compte. Donc prenez cette liste pour ce qu’elle est : mes envies du moment. Bien sûr dans la vie rien n’est figé, d’autant qu’on ne sait jamais, une sortie pourrait finir par m’intéresser !

La liste Fantasy

Conan Le Cimmérien – Le Livre de PocheRobert E. Howard – traduction Patrice Louinet
Conan L’heure du Dragon – Le livre de PocheRobert E. Howard – traduction Patrice Louinet
Conan Les Clous Rouges – Le Livre de PocheRobert E. Howard – traduction Patrice Louinet
Le Seigneur de Samarcande – Le Livre de PocheRobert E. Howard – traduction Patrice Louinet
Elric, Intégrale 3 – PocketMichael Moorcock
Justicière – Les archives de RosharBrandon Sanderson traduction Mélanie Fazi
Le SilmarillionJRR Tolkien Nouvelle traduction de Daniel Lauzon
Contes et Légendes InachevésJRR Tolkien Traduction révisée
Le retour du RoiJRR Tolkien Nouvelle traduction de Daniel Lauzon
Malice John Gwynne

Voici donc une liste de 10 titres très typés barbare. À l’heure où j’écris ces lignes, j’ai déjà lu un tiers du Cimmérien, et je suis sous le charme. J’avais évoqué à des proches lors de la sortie en poche, il y a mille ans avant le Covid, qu’un jour je me pencherais sur Howard, un des précurseurs de la Fantasy moderne. Et comme souvent, vu que je ne fais pas les choses à moitié, je prévois la trilogie + Le Seigneur de Samarcande sur les conseils de Patrice Louinet lui-même (ça sonne bizarre prononcé très vite), le traducteur d’Howard. D’ailleurs soyez vigilant, je pense qu’il a un truc dans les tuyaux avec David Camus chez Mnémos.

Pour le reste, j’aimerais finir l’Intégrale Elric commencé avant la guerre du Covid, continuer Les archives de Roshar – je ne suis pas en retard puisque j’en suis au volume 3 sur 4 publiés, et qu’il n’y a pas d’annonce pour un tome 5 dans l’immédiat – et goûter à Malice aux Éditions Leha, recommandé par Robin Hobb, rien que ça. Sans oublier, comme j’en ai parlé dans mon bilan, les oeuvres de Tolkien retraduites ou révisées, histoire de parcourir à nouveau La Terre du Milieu.

La liste SF

Le Messie de DuneFranck Herbert
Fondation Isaac Asimov
Les Portes CélèstesJean-Michel Ré
Joker’s Wild : Wild Card 3Martin et autres
The Expanse : l’Éveil du LéviathanJames SA Corey
Sept RedditionAda Palmer
Ecotopia – Folio SFErnest Callenbach
RenaissanceJean-Luc Marcastel

Deux ans que je dis que je veux lire de la SF… vais-je y arriver ? Voilà une vraie question. Un premier pas a été fait : j’ai bénéficié d’une promo Audible et j’ai commencé en audio Le Messie de Dune, et j’ai Les Portes Célestes, le second tome de La Fleur de Dieu, en attente derrière. Un autre pas également puisque j’ai acquis les deux premiers tomes de Fondation en Folio SF, ainsi qu’Ecotopia qui a été un achat compulsif il faut le dire. Il me restera à me procurer The Expanse et Sept Redditions que je ne possède pas encore. La série d’Ada Palmer m’avait vraiment charmé quand je l’ai lu et j’ai trop attendu pour lire la suite. C’est le cas également de Wild Cards qui reste un excellent souvenir de lecture, même si j’étais mitigé lors de la lecture du deuxième tome. En tout cas il ne tient qu’à moi de m’y mettre, mais face aux autres livres de ma sélection.. Rhaaa mon cœur balance. Heureusement, Fondation m’attire grandement et j’ai presque fini Le Messie de Dune en audio. On espérera que 2024 ne sera pas une énième fois l’occasion de me lamenter sur l’envie de lire de la SF !

La liste Fantastique

L’Affaire Charles Dexter Ward – tome 3 – MnémosIntégrale Lovecraft traduction Davis Camus
Le cycle de Providence- tome 4 – MnémosIntégrale Lovecraft traduction Davis Camus
Récits horrifiques – tome 5 – MnémosIntégrale Lovecraft traduction Davis Camus
Essai Correspodance Poésie- tome 6 – MnémosIntégrale Lovecraft traduction Davis Camus
Autour de Lovecraft – tome 7 – MnémosIntégrale Lovecraft traduction Davis Camus
Le Roi en Jaune – Édition CallidorRobert W. Chambers
DraculaBram Stocker
FrankensteinMary Shelley

Bon Comment dire..Ça fait beaucoup. Ça fait beaucoup de Lovecraft. Mais quand on aime on ne compte pas ! Il faut être honnête, cette traduction est une véritable redécouverte de ses textes. La lecture est agréable et l’écrin somptueux, ça donne envie. En parlant d’écrin, j’ai acquis Le Roi en Jaune, et les premières pages lues à la volée sont intrigantes et attirantes, les illustrations de toute beauté. De plus Chambers est un auteur qui a inspiré Lovecraft, notamment sur ces textes des Contrées du Rêve. Enfin, je me suis rajouté aussi deux classiques : tant qu’à aller aux sources du fantastique autant y aller à fond et étudier des romans références.

Et le reste ?

En ce qui concerne l’activité du blog, La Taverne a repris des horaires d’ouverture plus réguliers et on papote au coin du feu avec un café le dimanche matin en s’échangeant des ragots geek. J’ai un planning assez rempli de revues littéraires à écrire, probablement pour les 6 mois à venir, mais au milieu de tout ça j’aimerais reprendre les chroniques musicales et, si j’en ai l’occasion, écrire à nouveau des articles sur les manuels de jeux de rôle que je possède, il semble que ce type d’article ait bien plu. Enfin j’ai plein d’autres idées en tête, mais j’en parlerai dans les ragots si ça se concrétise !

Conclusion

26 livres. La norme généralement à la Taverne, avec les trois compartiments bien équilibrés, même si cette année on ne trouve pas de gros pavé à la livre des Martyrs. Espérons que pour une fois la liste Fantasy ne se mette pas à gonfler, éclipsant totalement les autres. J’ai deux autres lectures que je ne peux classer dans ces tableaux, fautes d’être de la SFFF. Le premier c’est Au Revoir Là Haut de Patrice Lemaitre, que je possède depuis plusieurs années, et vous le savez je suis un fan d’histoire. Et le second c’est Madly, Deeply, les carnets intimes d’Alan Rickman en VO que mes filles m’ont offert à Noël. Ça monte le total à 28. Autant d’étapes d’une sorte de piste de lecture, d’itinéraire au travers des étoiles, à la découverte ou redécouverte de nouveaux horizons. Une année qui risque d’être marquée par les auteurs des années 30, Howard et Lovecraft, à la correspondance dont on pourrait voir bientôt la parution. Sisi. C’est mon petit doigt qui me le dit, et il ne me ment jamais. Ou alors.. ?

Rendez-vous comme toujours en janvier 2024, pour relire cet article et se marrer ensemble de ce qui aura été accompli ou pas ! En attendant je vous souhaite de chouettes lectures, pleines d’émotions, d’enrichissement, de jolis voyages, et je vous dit à dimanche matin, je vous paie le café, promis.

Bonsai!

Toutes les images présentées dans cet article sont la propriété exclusive de leurs auteurs, en l’occurence pour les livres, le tavernier. Et je le connais, il est pas commode quand il a pas bu son café !

Bilan 2022

Hello There !

C’est le moment, c’est l’instant, préparez les épices ! Voici venue l’heure du bilan tant attendu. Une année où j’ai lu moins de livres. La cause ? Et bien l’année dernière, je me vantais d’être un français chanceux qui n’avait pas eu le covid. Malheureusement, la rentrée de septembre me fut fatale. Une expérience qui ne fut pas trop dévastatrice dans l’ensemble, étant vacciné, mais désagréable. Et je dois avouer que les temps qui ont suivi j’en suis ressorti fatigué, et mes capacités cognitives s’en sont trouvées amoindries. Mon temps de concentration était très réduit, il m’était difficile de me focaliser sur l’activité en cours. Très handicapant quand vous êtes enseignant. Bilan : Deux mois quasi sans lecture.

J’ai quand même une liste honorable, du moins à mon échelle. On est loin des 70 à 120 bouquins lus par certains, de ce que je vois sur la blogosphère. Un chiffre que je trouve monstrueux et dont je me pose la question de l’intérêt et du réalisme, parce qu’avec une famille et un travail, comment peut-on lire autant ? La taille des livres joue c’est évident, et à la Taverne on n’est pas très amuse-gueule, on préfère les grosses pièces de viande juteuse, du coup forcément, ça fait moins en quantité. Mais surtout, j’aime savourer ce que je lis, j’aime méditer dessus. Je ne suis pas gourmand, je suis gourmet. Je lis pour l’enrichissement culturel, et par dessus tout pour ressentir des émotions, voyager. Je n’ai pas honte de dire qu’il m’arrive de pleurer sur mes livres, comme dernièrement avec Le Dieu Estropié, mais je peux rire, m’enflammer, trembler. Un livre, c’est une porte sensorielle. Tout se passe au niveau du cerveau, de l’esprit. Et comme toute expérience de ce genre j’ai besoin de temps pour l’intégrer, la digérer. C’est pourquoi je pense que je ne lirai jamais 70 livres dans l’année, quand bien même je ne lirais que des livres de 200 pages. Je veux pouvoir me retourner sur mes lectures et m’en rappeler avec précision. De plus je ne fais pas que lire puisque je joue à des jeux vidéo, je pratique le jeu de rôle, même si moins depuis septembre (une pause s’imposait), je passe du temps avec mes filles (jeux de société, films, séries). Bref, ce petit aparté, non pas pour me justifier, mais pour préciser que je ne comprends pas la démarche derrière autant de livres engloutis. J’aimerais beaucoup plus savoir ce que ces bloggueurs gardent de leurs lectures de manières approfondies, en terme de sensations, émotions, perception du monde, plutôt que de m’afficher ce nombre effarant, empilant les titres, dans ce qui me semble plus être un genre de compétition, sponsorisé par les SP.

Mais sans plus attendre voici donc le bilan 2022 avec ses promesses tenues et non tenues, ses Shoggoths, ses Nazgûls, ses dragons cracheurs de feu, ses peuples étranges et ses contrées du rêve. Allez, asseyez vous au comptoir de la Taverne, je vais vous servir un bon café et vous présenter mes lectures, sans oublier bien évidemment la cérémonie des désormais célèbres Onos Award, toujours copiés, jamais égalés, mais totalement enviés.

Liste des livres lus

Voici la liste de mes lectures 2022 dans l’ordre chronologique. Comme toujours, le petit astérisque vous indique s’il s’agit d’un livre qui était dans ma PAL 2022.

Le livre des martyrs, tome 08 : La Rançon des Molosses *Steven Erikson
La chute de Gondolin *JRR Tolkien et Christopher Tolkien
Les archives de Roshar, tome 3 : Le livre des radieux, partie 1 *Brandon Sanderson
Les archives de Roshar, tome 4 : Le livre des radieux, partie 2 *Brandon Sanderson
Le guide Stephen KingYannick Chazareng
Intégrale prestige, tome 1 : Les contrées du rêve *H.P. Lovecraft traduction David Camus
La voie de l’ascendance, tome 1 : La Complainte de DanseurIan C Esselmont
Intégrale prestige, tome 2 : Les montagnes hallucinéesH.P. Lovecraft traduction David Camus
Le livre des martyrs, tome 09 : La Poussière des Rêves *Steven Erikson
Le Seigneur des Anneaux, illustré (Lee), tome 1 : La Fraternité de l’Anneau JRR Tolkien traduction daniel Lauzon
Le Seigneur des Anneaux, illustré (Lee), tome 2 : Les deux Tours JRR Tolkien traduction daniel Lauzon
Assassin’s Creed, tome 6 : Black Flag Oliver Bowden
Feu & Sang / intégrale GRR Martin
Lovecraft : Je suis providence, tome 1S.T. Joshi
Lovecraft : Je suis Providence, tome 2 S.T. Joshi
Le livre des martyrs, tome 10 : Le Dieu estropié *Steven Erikson

16 livres en tout. Mais un peu plus de 10 000 pages tout de même. Bien sûr je ne compte pas les livres de jeu de rôle, et j’en ai lu pas mal, notamment dans le cadre d’un contrat de relecteur pour un éditeur. Sur les 16 livres, 12 sont de la Fantasy. Un record depuis que je fais ce blog. D’habitude, il s’agit d’une catégorie bien représentée, mais de manière générale, mes lectures s’équilibrent entre le fantastique et la SF. Les livres restants sont un livre documentaire (Le guide Stephen King) , un livre de fantastique (Les montagnes Hallucinées – intégrale tome 2) et une biographie (Je suis Providence en deux tomes). Si je compare avec ma prévision 2022, on remarquera que pour une fois j’ai quasiment collé à ma programmation en Fantasy. Seul Le Fou et l’Assassin et Gagner la Guerre n’ont pas été lus. Je rajouterais que je n’avais pas anticipé de lire si tôt Le deuxième tome de l’Intégrale Mnémos, mais que c’était plus ou moins prévu. Les deux thèmes perdants ici, sont donc la SF, totalement délaissée cette année (même si certains textes de Lovecraft en sont), et le Fantastique, surtout les Stephen King. Je n’ai tout simplement pas réussi cette année à me mettre dans cette ambiance, et le challenge de L’Automne du King est tombé en plein dans ma traversée du désert. Il y a aussi deux livres commencés mais non terminés : Carrie (environ 150 pages lues) et Justicière 1ère partie (environ 50% lu), le troisième opus des Archives de Roshar que j’avais entamé à la suite du Livre des Radieux. Ce dernier sera repris sans aucun doute possible, j’ai adoré l’univers comme j’en ai parlé ici, par contre Carrie qui était une relecture, va rester un moment sur ma table basse je crois. J’ai profité de la diffusion de House of Dragon pour relire une seconde fois Feu & Sang en édition intégrale de GRR Martin, poussé par une envie de comparaison du script avec l’original. Le jeu des séries évènements de la rentrée de septembre m’a amené également à profiter de l’été pour me replonger dans l’univers de Tolkien. Des articles sont en préparation sur ces deux sujets. Enfin, comme annoncé sur Twitter en janvier 2022, cette année devait être malazéenne ou pas. Elle le fut. J’ai pu engloutir les 3 romans parus ainsi que le premier spin-off d’un nouveau cycle écrit cette fois-ci par Ian Cameron Esselmont. Le Livre des Martyrs étant arrivé à son terme, nous termineront bientôt le grand chantier des 10 revues sur le blog.

Quoi qu’il en soit, il est temps, passons aux Onos Awards ! Hollywood, toujours envieux et peu imaginatif depuis quelques décennies, a tenté cette année de créer le buzz à coup de gifle. En arriver là pour tenter de voler la vedette aux Awards les plus attendus de la galaxie, c’est vraiment pathétique. The show must go on, comme chantait Freddy, et les vrais savent où venir pour de vraies récompenses. Je rappelle que le jury, pluri-éclectiquo schizophrénique, est composé de pas moins d’UN membre mais ne croyez pas pour autant que les votes sont facilités, ils sont cependant sincères, sans aucune pression politique ou commerciale que ce soit. La Taverne tient à son indépendance et sa liberté d’expression ! Ladies & Gentlemen, here we go.

Si Viggo est venu ce n’est pas par hasard

Les Onos Awards

La plus belle surprise : Dans mon paysage littéraire, on y trouve généralement des livres de l’imaginaire – majoritairement de la Fantasy – , des documentaires ou romans historiques, des mangas, des BD, et peu d’autres choses. Je n’aurais pas cru qu’une biographie m’aurait autant happé. Je n’ai eu aucune hésitation quand il a s’agit de choisir LE grand gagnant de ces Awards. C’est avec une joie immense et beaucoup d’émotions, que je remets le Onos award de la plus belle surprise et du meilleur livre lu en 2022 à Je suis Providence de S. T. Joshi. L’article consacré à cette expérience de lecture est dans les tuyaux, mais je peux vous dire que ce fut un plaisir, un voyage indicible. C’est le livre qui m’a permis de reprendre après ces deux mois sans lecture. Un travail de compilation incroyable, un chef d’oeuvre de biographie, à mettre dans toutes les mains des fans du Maitre de Providence.

La déception de l’année : Assassin’s Creed Black Flag d’Oliver Bowden. Une vraie déception. Le livre n’a aucune originalité si ce n’est de raconter les évènements de la vie d’Edward Kenway dans l’ordre chronologique, là où le jeu à des séquences flash back. Amis gamers, tenez-vous en au jeu et ne perdez pas votre temps ici : L’histoire du livre est exactement identique à celle du titre d’Ubisoft. Une déception surtout quand on sait que pour l’opus précédent, Forsaken, le livre associé à AC III, le pari avait été pris de conter des éléments annexes du point vue, non pas du protagoniste du jeu mais de Haytham, ce qui était un vrai plus et une vraie réussite.

Le livre sans plus : Le guide Stephen King de Yannick Chazareng. Un petit livre lu en quelques heures, pratique pour le néophytes mais peu utile pour le fan ultime du King que je suis. Je le lis et le suis depuis trop longtemps pour ne pas être au courant de tous les petits détails proposés dans ce livre. Cela ne veut pas dire que ce guide est sans intérêt, ni que le livre n’a pas lieu d’être, soyons honnête, mais dans mon cas ce fut juste une espèce de rappel plutôt que de la découverte.

L’auteur de l’année : Il a bercé mon année de bien des manières. 85 ans après sa mort, sa popularité n’a jamais été aussi haute. Il est le maitre du cosmicisme et le garant de la civilisation. J’ai nommé Howard Phillips Lovecraft. Avec pas moins de deux recueils de textes lus dans cette nouvelle traduction sincère et proche de l’original signée David Camus aux éditions Mnémos, et Je suis Providence aux Édition Hélios où j’ai suivi pas à pas le quotidien de HPL, il a été comme un arrière plan à mon année, un colocataire, et je ne me lasse pas de son talent. Avec le documentaire Aux Sources de la Fantasy, où un épisode lui est consacré, et ma campagne Les Montagnes hallucinées en cours avec ma team JDR, il a été omniprésent. Bien que je l’ai découvert réellement sur le tard (je le connaissais de nom mais n’avais lu aucun de ses textes avant 2018), il est devenu un de mes auteurs favoris. C’est avec plaisir que je lui consacrerai bientôt plusieurs articles et que je lui remets le Onos Award de l’auteur de l’année.

L’auteur « découverte » de l’année : J’essaye tous les ans de découvrir un auteur. Cette année, je n’ai pas été puiser très loin puisqu’on a vu la naissance d’une nouvelle série aux Éditions Leha afin de ne pas laisser orphelins les lecteurs du Livre des Martyrs dont je fais partie. La complainte de Danseur écrit par l’ami de Steven Erikson, Ian Cameron Esselmont, est une lecture fluide et très agréable. J’ai été agréablement surpris par la facilité d’accès du texte, bien plus que celui d’Erikson. Une véritable porte d’entrée à l’univers comme le décrit Leha, mais pour autant je pense qu’on apprécie encore plus le roman lorsqu’on a déjà lu la série du Livre des Martyrs. En tout cas, j’ai passé un excellent moment avec ce livre, et j’attend la suite du cycle avec impatience, afin de mieux profiter de la plume de Mr Esselmont, notre lauréat 2022.

La relecture qui fait du bien : Comme je l’ai déjà précisé, j’ai eu deux relectures cette année : Feu & Sang de Martin que j’avais lu en deux parties à sa sortie mais qui dans son édition intégrale agrémentée de magnifiques illustrations, le tout dans une écrin impeccable, n’est vraiment pas la même expérience, et Le Seigneur des Anneaux. Je relis régulièrement la trilogie de Tolkien (je dois en être à ma cinquième ou sixième fois) mais je ne l’avais jamais lu dans la nouvelle traduction de Daniel Lauzon. Cette lecture, au coeur de l’été, a été un plaisir exquis. Ce texte retravaillé, dont j’ai lu les deux premières parties – La Fraternité de l’Anneau et Les Deux Tours – est fluide, très fluide, et mis à part les noms propres qui peuvent être problématiques pour ceux qui sont habitués à la traduction de Ledoux, utilisée aussi dans la VF des films de Jackson, nous avons une traduction qui fera référence. Nous en parlerons bientôt à la Taverne, mais pour l’heure je suis ému de remettre cet Onos Award de la meilleur quasi-relecture, de fait, à ce classique de la Fantasy.

L’univers à approfondir (à nouveau) : Replonger au coeur de La Terre du Milieu, que ce soit en livre ou au travers de la série diffusée sur Prime video traitant des Anneaux de Pouvoir, tout cela m’a fortement donné envie de voyager à nouveau dans ce merveilleux univers sur lequel j’ai déjà beaucoup lu. Bon, la série ne m’a pas laissé un souvenir mémorable et fait pâle figure en comparaison à House Of The Dragon de HBO. Il se trouve que cette année j’ai acquis les magnifiques rééditions de Bourgois Le Silmarillion et Les Contes et Légendes Inachevés dans leur nouvelle traduction et révision, des livres que je n’ai pas lu depuis presque 20 ans. Avec Le Retour du Roi encore à lire pour compléter la trilogie, je compte bien m’installer au creux des ailes des Aigles et survoler à nouveau Valinor, Beleriand, Numenor, les Montagnes de Brume, l’Argonath, puis rentrer au matin, appelé par le cor d’Argent, à Minas Tirith, contempler la bannière du Gondor flottant au vent sur la tour d’Ecthelion. Un mot tout de même sur le monde de Roshar que je n’oublie pas, mais j’avoue, face à mes amours de jeunesse, c’est le cœur qui parle. Voilà pourquoi cet Onos Award va à La Terre du Milieu.

Le cycle que j’ai terminé et qui mérite son Onos Award : Une récompense un peu spéciale, car généralement elle prime un univers qui m’a marqué et que j’ai hâte de continuer, mais cette année nous allons faire une exception et récompenser un parcours de cinq années : celui du Le Livre des Martyrs. Évidemment, allez-vous dire. Une série démesurée, titanesque, un projet dément, mais j’en ai déjà tellement parlé sur le blog. Quel final ! Quel panache ! Les revues des tomes 9 et 10 sont prévues pour les mois à venir. Comme vous savez, j’aime prendre le temps de compiler mes notes, réfléchir, méditer, avant de restituer mon avis de lecture sur ce type de série. C’est surtout à Leha, en fait, que je voudrais attribuer ce Onos Award – l’auteur a déjà été moult fois nommé et récompensé ici – pour avoir déjoué tous les pronostics et avoir livré au public la version française de ce cycle pas comme les autres, dans une édition magnifique. Et ce n’est pas fini.

La mention spéciale : Je suis un amateur de beaux livres quand il s’agit d’auteurs que je chéris plus que tout. Un éditeur a enfin apporté l’écrin mérité et nécessaire à un auteur inconnu de son vivant mais tellement omniprésent dans la culture aujourd’hui, Lovecraft. Depuis début 2022, Les éditions Mnémos, après le succès du financement participatif quant à une édition intégrale des œuvres du maître de Providence, ont entreprit d’éditer tome par tome cette intégrale, permettant à tous ceux qui n’avaient pas eu la chance de pouvoir pledger de profiter tout de même de ce travail fantastique. C’est avec une profonde admiration que je remets cet Onos Award de la mention spéciale, tant pour le contenu que pour la beauté, la finition des livres, avec ses cartes en garde de devant et postérieure, à Mnémos qui publiera le dernier tome, le n° 7, en mars 2023. Bravo pour ce travail d’édition.

Conclusion

Malgré une activité plus restreinte et chaotique, j’ai pu voyager de bien des manières cette année et passer de très grands moments de lecture. Si je ne devais retenir qu’un nom pour 2022 ce serait Lovecraft. Bien évidemment, comme les années précédentes, en terme de pages et de hype, le Cycle des Martyrs, qui est arrivé à son terme, aura grandement rythmé mon année, d’autant plus que j’ai rencontré Steven Erikson et Ian Cameron Esselmont à Rennes en dédicace. Mais la saveur de ces récits lovecraftiens, redécouverts pour la plupart dans une édition splendide, puis ce mois passé à lire la biographie de Joshi m’ont profondément marqué. 2022 fut également mon retour en Terre du Milieu après bien des années passées loin d’Elle. Un there and back again qui commença par la lecture de La Chute de Gondolin en février et qui se conclut par un cadeau, la réédition des Contes Et Légendes Inachevés, qu’on m’a offert en fin d’année, venant supplanter mon vieil exemplaire. 2022 donc, année des fins et des renouveaux, année des nouveautés aussi, puisque la Taverne ouvre les dimanches matin à ceux qui veulent venir partager quelques ragots en mode culture geek. 2022 s’en va, sans une seule lecture SF, beaucoup de revues sur le Livre des Martyrs et peu d’autres livres. Alors si on pensait à remédier à ça en 2023 ?

Je ne sais pas de quoi sera faite cette année – et c’est ce qui crée tout l’intensité de la vie ! – mais une chose est sûre, je n’en ai pas fini avec Lovecraft et ses auteurs fétiches ou contemporains, ni non plus avec La Terre du milieu. Et la SF m’appelle, de là-bas, au fin fond du cosmos, où Azatoth et Yog Sottoth attendent, où La Fondation d’Asimov me garde secrètement une place, ou Ada Palmer toque aux hublots de ma capsule spatiale depuis quelques mois, me montrant les tomes suivants de Terra Ignota, me rappelant le plaisir pris en lisant Trop Semblable à l’ Éclair

Et la route se poursuit sans fin, descendant de la porte où elle commença…Et vers quel lieu, alors ? Je ne saurais le dire.. Je ne saurais dire…

Merci Monsieur Lovecraft pour cette année.

Bonsai!